Lc 24, 35-48
Elle s'en était allée sur la pointe des pieds, comme elle avait toujours vécu. Sans déranger personne. Ses funérailles furent recueillies et empreintes d'émotion et surtout d'espérance. Il faut dire que sa foi avait toujours été grande. Elle était parvenue à la transmettre à ses enfants et ses petits-enfants. Avec aisance et simplicité, elle aimait leur parler de Dieu. C'était tellement naturel pour elle qui vivait cette intimité divine de manière quotidienne et sans doute, plus encore, depuis le décès de son mari, il y a quelques années déjà. Elle l'avait rejoint en toute confiance et reposait auprès de lui dans le petit cimetière du village. Quelques jours après l'enterrement, ses enfants se retrouvent dans la salle attenante au bureau du notaire écoutant la lecture du testament. Soudain, c'était comme un tonnerre puis un éclair et voilà qu'elle se retrouve au milieu d'eux assise sur la chaise qui était restée libre. Elle les regarde et sourit comme à son habitude. Le notaire et les enfants sont pris de stupeur, effrayés, se demandant s'ils n'étaient pas tous entrés dans un même délire collectif. Puis elle leur parle : « oui, c'est bien moi, je suis juste revenue quelques instants pour vous dire que tout va bien de l'autre côté de la vie et que je vous y attends toutes et tous dorénavant ». Sur ces mots, elle repart comme elle était venue. Les autres, laissés seuls dans la pièce, restent stupéfaits. Ils ne savent plus quoi penser. Ils n'en croient pas leurs yeux et leurs oreilles. C'est impossible. Personne ne peut revenir ainsi de la vie éternelle. Ils sont bouches bées, sans voix. Ils viennent de faire l'expérience de l'indicible de la Résurrection.
Et si cette histoire nous était arrivée à chacune et chacun de nous. Ne serions-nous pas également pris de stupeur ? N'aurions-nous pas l'impression d'avoir eu des hallucinations alors que nous sommes à jeun ? Arriverions-nous à croire une telle histoire si nous ne l'avons pas vécue nous-mêmes ? Ces questions nous permettent alors d'avoir un peu d'indulgence et de compassion pour les disciples qui viennent de vivre une telle expérience car nous n'aurions sans doute pas réagit différemment d'eux. Il n'y a pas de mots pour décrire ce qui est de l'ordre de la Résurrection. Comme l'écrivait un jour un poète, la Résurrection explose dans un silence qui ne peut se comprendre qu'en Dieu. Nous nous trouvons donc ainsi bien démunis face à ce mystère. Aucune certitude, juste une espérance et surtout une confiance dans l'expérience vécue par le Christ. Alors plutôt que d'essayer de vouloir comprendre rationnellement le mystère de la Résurrection, ne pourrions-nous pas revenir à nous et inverser la dynamique. Nous sommes face à la Résurrection comme nous le sommes face à Dieu. Puisque je ne peux pas dire qui est Dieu, je peux me poser la questions suivante : qui suis-je devant Dieu ? La compréhension de mon propre mystère me permettra d'entrer petit à petit dans celui de Dieu. S'il en est ainsi pour Dieu, nous pouvons faire une parallèle avec la Résurrection : puisque je suis incapable de dire ce qu'est la Résurrection, je peux alors me demander ce que la Résurrection signifie pour moi ou en d'autres termes : qui suis-je face à la promesse de ma propre résurrection ? Comment est-ce que je me situe face à cette espérance ? Ai-je envie d'y croire et si oui, en quoi cela va-t-il changer ma vie maintenant ? A ces questions, je ne puis répondre à votre place. Ce que je crois, c'est simplement que la confiance en la Résurrection me fait prendre conscience que la mort nous la traverserons pour nous retrouver en présence de ce Dieu qui vit déjà en nous par l'Esprit. Cette confiance est une invitation constante à vivre intensément notre vie terrestre car elle est la première étape vers la vie éternelle. La Résurrection est non seulement celle des morts mais aussi celle des vivants. Par essence, nous sommes des êtres résurrectionnels. Comment en être sûrs ? se demandent sans doute certains. La certitude de la résurrection vient en vivant sa vie aujourd'hui. Soyons alors toutes et tous des êtres ressuscités.
Amen.