5e dimanche de Pâques, année B

Auteur: Cochinaux Philippe
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : B
Année: 2005-2006

Jn 15, 1-8

Il avait tout pour lui. Parfois, certains pouvaient avoir le sentiment que tout se qui passait entre ses mains devenait toujours de l'or. Lui, il n'avait pas l'impression d'être plus doué que les autres même s'il reconnaissait qu'il avait eu beaucoup de chance dans la vie. Il avait grandi dans une famille aimée et aimante. Il s'était toujours bien entendu avec ses parents. Pas de crise majeure et jamais un mot plus haut que l'autre. Lorsqu'il a quitté le nid familial pour s'envoler sur la route de sa propre destinée, cela s'était fait dans la douceur. Il réussissait très bien professionnellement, mais si pour lui l'essentiel était ailleurs : son couple, ses enfants, sa famille, ses amis. De plus, il donnait pas mal de son temps, avec son épouse d'ailleurs, dans différents projets associatifs car tous deux croyaient à l'importance de la solidarité humaine et ce, au nom de la foi en Dieu qui les habitait chacun. Il avait bien tout pour lui : le mari idéal, le père rêvé, l'ami recherché. Il était heureux et pourtant il avait un nuage sur sa vie. Il était frappé de la jalousie de certaines personnes à son égard. Il regrettait certains faux sous-entendus le concernant. Cela le peinait. C'est vrai, il avait une belle vie mais c'était tout simplement parce qu'il avait fait sienne une des paroles de saint Paul : « car lorsque je suis faible, c'est alors que je suis fort ». Il avait fondé sa vie sur la richesse de ses fragilités. La source de sa vitalité, il la puisait dans sa foi en un Dieu d'Amour et de Pardon. Alors, il ne comprenait pas pourquoi certains le jalousaient, lui en voulaient. C'est vrai, il n'est pas toujours facile de reconnaître que d'autres que nous portent du fruit, voire beaucoup de fruit. Pourquoi eux et pas nous ? Cette attitude peut sembler peut-être humainement compréhensible mais répréhensible lorsque nous nous plaçons dans le champ de notre foi. Chacune et chacun d'entre nous, sommes appelés par Dieu à porter du fruit, du fruit en abondance lorsque nous acceptons d'enraciner nos vies en lui, lorsque nous choisissons de mettre nos pas dans les traces du Christ. Il est le chemin, la vérité et la vie. Nous ne pouvons pas nous tromper et nous devenons plus libre encore lorsque la lumière divine éclaire nos vies. Demeurer en Dieu, c'est nous accepter tel que nous sommes afin de construire nos vies à partir de qui nous sommes. Chacune et chacun nous avons une destinée à réaliser. Cette dernière commence ici-bas dès l'instant de notre conception. Nous existons dans le c½ur de Dieu. Notre vie prend sa source et s'enracine en lui. De la sorte, nous rayonnons de ce qui habite au plus profond de nous car nous savons que la sève divine coule en nous comme le souffle de l'Esprit. Dieu n'attend pas que nous portions du fruit. Non, il s'attend à ce que nous en donnions beaucoup. Nous sommes ses sarments et nous ne pouvons que nous réjouir lorsque certains d'entre nous en portent beaucoup. Il n'y a aucune raison de les jalouser car les fruits de Dieu ne sont pas le succès qui est toujours éphémère ou encore la réussite sociale, non les fruits divins portent les noms d'actes d'amour, de gestes de tendresse. Nous sommes donc conviés à nous réjouir lorsque d'autres se mettent à donner beaucoup de fruits car il y a un pendant à une telle réjouissance. Si je peux me réjouir lorsque quelqu'un réussit sa vie à partir de qui il ou elle est, je pourrai également avoir de l'empathie, de la compassion lorsque quelqu'un passe à côté de lui-même ou se trouve en situation de souffrance. En effet, la vraie personne compatissante est celle qui se réjouit du bonheur de l'autre car si je ne suis pas capable d'une telle joie lorsque quelqu'un porte du fruit, ma compassion est mensonge. Comment, en vérité, pouvoir accompagner quelqu'un dans sa détresse, si je ne suis pas en même temps heureux du bonheur d'un autre. Ma compassion ne serait plus compassion mais pitié, voire réjouissance d'aller bien lorsque l'autre ne le va pas. Alors sommes-nous des êtres compatissants, pleins d'empathie face à la souffrance de l'autre ? Pour le savoir, c'est très simple, il suffit d'être capable de pouvoir de se réjouir lorsque mon prochain donne non pas des fruits mais beaucoup de fruit. C'est de cette manière que nous serons, dans l'Esprit, Dieu à l'½uvre en notre monde.

Amen.

5e dimanche de Pâques, année B

Auteur: Devillers Raphaël
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : B
Année: 2005-2006

Alors que le récit du dernier repas de Jésus avec ses disciples est assez bref dans les premiers évangiles, il s'allonge sur cinq chapitres dans l'évangile de Jean. Non seulement ce dernier remplace le récit de l'institution de l'Eucharistie par celui du lavement des pieds (qui en est l'image), mais il met sur les lèvres de Jésus un long discours d'adieu, le tout étant encadré par l'insistance sur l'amour de Jésus pour les siens.

Au c½ur de l'ensemble rayonne la magnifique allégorie de la VIGNE - ce qui donne le plan suivant :

* 13, 1 : Jésus ayant aimé les siens qui sont dans le monde les aima jusqu'à l'extrême...

* 14 : discours sur la foi

· 15, 1-17 : allégorie de la Vigne

* 15, 18 - 16, 33 : discours sur les persécutions

· 17 : la grande prière sacerdotale avec la finale : ...."Père, tu m'as aimé avant la création du monde...A ceux-ci, je ferai encore connaître ton Nom afin que l'amour dont tu m'as aimé soit en eux et moi en eux..."

Ce schéma fait tout de suite comprendre l'idée essentielle de l'ensemble : Le Père a donné tout son amour au Fils qui l'a offert et continuera de le donner intégralement aux siens jusqu'à la fin de l'histoire.

L'image la plus adéquate pour exprimer ce mystère est celle de la VIGNE, qui est donc centrale.

LE CHANT DE LA VIGNE AIMEE ET DECEVANTE

On connaît le célèbre "chant de la vigne" par lequel Isaïe exprimait la tendresse de Dieu pour son peuple Israël et son immense déception devant la conduite de ses élus ( Isaïe 5 ) :

" Il en attendait le droit...et c'est l'injustice ;

Il en attendait la justice...et il ne trouve que les cris des malheureux".

En effet si Dieu fait alliance avec un peuple, ce n'est pas le choix d'une élite et le rejet des autres nations. Quiconque est l'élu de Dieu doit au contraire appliquer des exigences très strictes de justice et ainsi servir de modèle et d'avant-garde pour le monde. Or le drame, c'est que l'élection devient souvent une assurance : persuadé d'adorer le vrai Dieu, on est fier de lui rendre un culte dans son temple... mais on ne construit pas la société telle que Dieu la veut, c'est-à-dire une société de respect de chacun, de partage équitable, de justice sans compromission. Alors les cris de détresse des malheureux rendent vain le chant des cantiques. Si belles, si fastueuses soient les liturgies, elles deviennent blasphématoires lorsque le droit est piétiné.

Dans les évangiles synoptiques, Jésus a repris l'image de la vigne pour condamner les vignerons homicides, ces autorités qui organisent le culte mais tolèrent l'injustice et qui finalement feront tuer celui qui leur dit leur vérité ( Matthieu 21, 33 ...)

LA VIGNE DANS SAINT JEAN : JESUS ET LES SIENS

Avancée théologique considérable : la Vigne est personnifiée, c'est Jésus en personne !

Je suis la vraie Vigne et mon Père est le Vigneron. Tout sarment qui est en moi mais qui ne porte pas de fruit, mon Père l'enlève.

Tout sarment qui donne du fruit, il le nettoie pour qu'il en donne davantage. Vous, vous êtes nets et purifiés grâce à la Parole que je vous ai dite : " Demeurez en moi comme Moi en vous".

De même que le sarment ne peut porter du fruit par lui-même s'il ne demeure pas sur la vigne, de même vous non plus, si vous ne demeurez pas en Moi.

De même qu'il se proclamait le Vrai Berger de son peuple, ici Jésus s'approprie la métaphore qui désignait le peuple élu. Il ne s'agit pas de son projet à lui : c'est son Père qui l'a choisi afin d'être le Cep qu'il plante...en terre d'Israël, oui, mais sur le Golgotha ! Les poutres de bois sont le tuteur sur lequel l'Amour du Père arrime son Fils qui, vivant de l'amour éternel de son Père, va s'étendre, se prolonger à l'infini dans sa communauté. Les disciples ne sont plus seulement des élèves à l'écoute d'un maître, des brebis marchant à la suite du berger mais ils sont EN JESUS, ils demeurent EN LUI. Ils sont son extension comme les sarments sont les ramifications de la vigne.

Cela, ils le sont par Sa PAROLE à Lui ; et ils ne le demeurent que si cette PAROLE demeure en eux, si elle est l'influx, l'élan qui les meut et les anime.

Seule la stricte application de l'Evangile maintient le croyant en Christ. Car le Père vigneron ne veut pas d'un arbre décoratif, une plante ornementale dont la beauté serait le nombre, l'éclat, la grandeur. Une vigne n'est plantée QUE POUR LE FRUIT ATTENDU !

Donc le sarment infécond sera retranché : sa stérilité le fait exclure. Quant au sarment fécond, il doit s'attendre à être taillé, émondé. Les épreuves, les attaques trancheront ses excroissances, ses rejets superflus, ses pensées trop humaines, ses assurances trop égoïstes : il verra là un travail divin, douloureux mais indispensable, afin de lui faire produire toujours davantage. Tous les saints lui apprendront combien il faut souffrir pour être de plus en plus purifiés par une PAROLE de feu.

Je suis la Vigne et vous êtes les sarments. Celui qui demeure en moi et en qui je demeure, celui-là donne beaucoup de fruit...car en-dehors de moi, vous ne pouvez rien faire.

Si quelqu'un ne demeure pas en moi, il est comme un sarment qu'on a jeté dehors et qui se dessèche. Les sarments secs, on les ramasse, on les jette au feu et il brûlent.

Si vous demeurez en moi et que mes paroles demeurent en vous, demandez tout ce que vous voudrez et vous l'obtiendrez.

Ce qui fait la gloire de mon Père, c'est que vous donniez beaucoup de fruit : ainsi vous serez pour moi des disciples.

Jésus répète, selon le style méditatif de Jean, il insiste très fort : le lien avec lui est décisif mais n'est jamais acquis une fois pour toutes - ni par un rite ni par une inscription dans une religion ni par des mots. Seule l'obéissance, la pratique fidèle et persévérante de SA PAROLE peut assurer "le chrétien" qu'il est bien "EN CHRIST", un vrai sarment de la Vigne. Car la tentation de l'homme est toujours de chercher son bonheur et de construire l'humanité en prenant d'autres chemins que celui de Jésus : LA PÂQUE, mystère de mort et résurrection.

Les sarments stériles sèchent et, au lieu de brûler du feu de l'amour, ils se consument en consommant égoïstement et inutilement.

Pour terminer, Jésus prévient : il ne suffit pas d'avoir de la bonne volonté, un bon caractère, des qualités éminentes. Un sarment du Christ ne tient et n'est fécond que s'il PRIE, si, du fond de sa pauvreté et de ses échecs, il SUPPLIE le Père pour obtenir la grâce de donner les fruits escomptés. En ce sens, il sera exaucé car il procurera "LA GLOIRE DE MON PERE."

Mais quel est donc ce fameux fruit attendu ? La seconde partie du texte nous le révèlera dimanche prochain

5e dimanche ordinaire, année B

Auteur: Materne Pierre-Yves
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : B
Année: 2005-2006

« Tout le monde te cherche ». N'avons-nous jamais eu droit à cette remarque de la part des autres ? Cela fait plaisir de savoir que « tout le monde » s'intéresse à nous. Evidemment, c'est peut-être pour qu'on nous annonce une mauvaise nouvelle. Peu importe, nous sommes devenus - peut-être seulement pour quelques instants - une personne incontournable. Voilà qui nous donne un sentiment de grandeur, de puissance. Nous aimerions bien être félicité, remercié ou encore sollicité à nouveau. Pensons au médecin tellement réputé, au professeur tellement adoré, ou encore au prêtre tellement demandé. On se bat pour l'avoir, on fait la course pour l'entendre. Vous voilà investi d'une bien lourde responsabilité. Il ne faudrait pas décevoir ou paraître choquant.

Dans l'évangile, le texte ne donne pas les sentiments des disciples lorsqu'ils retrouvent Jésus dans un endroit désert. Sont-ils inquiets ? ou furieux ? ou seulement étonnés ? La place est laissée au travail de notre imagination. Toutefois, le contexte nous donne des indices. Jésus commence à se faire connaître (nous sommes au premier chapitre de l'évangile selon Marc) par sa parole et par ses actions thérapeutiques. Il a commencé par guérir la belle-mère de son ami Simon, et ce n'était qu'un prélude à une multitude de guérisons et d'exorcismes. Le résultat est là : toute la ville de Capharnaüm, tout au long de la soirée, se presse autour de Jésus. Le matin, les gens sont de nouveau là pour de nouvelles guérisons. Mais le principal intéressé s'est volatilisé pour prier à l'écart, au calme. Les disciples sont probablement contrariés par cette absence de l'acteur principal. Jésus fait faut bon.

La réponse ne s'est cependant pas faite attendre. « Partons ailleurs... ». Comme si Jésus n'était pas là d'abord pour être un thérapeute populaire. Il est plutôt l'homme qui marche, le pèlerin qui brûle d'impatience d'annoncer une nouvelle. Il veut aller dans d'autres lieux, dans d'autres villages, pour proclamer la Bonne Nouvelle. Jésus n'est pas venu pour être adulé ou même pour soigner tous les malades de la région. Il porte un message et les actions éclatantes viennent pour donner du poids à sa parole. Il n'attend pas qu'on le félicite, qu'on l'adore. Il n'a pas le temps pour cela, comme si justement son temps était compté. Sans doute, il éprouve de la satisfaction personnelle en apportant du bonheur aux autres. Comme chacun de nous, il est content de faire du bien aux autres. Mais il n'a pas le temps de se complaire, sa mission le presse d'avancer.

Nous aussi, nous sommes invités à vivre notre vie de telle manière qu'elle soit porteuse de la Bonne nouvelle. La foi en Dieu nous pousse à suivre le Christ sans chercher les honneurs. La foi se vit dans le service des autres, en se moquant du regard d'autrui. Il ne s'agit pas tant de faire des choses que de vivre pour les autres. Notre satisfaction sera grande si nous arrivons à nous oublier un peu pour laisser l'autre continuer sa marche vers Dieu. C'est quelque chose que les disciples ont dû apprendre à Capharnaüm déjà. Amen.

6e dimanche de Pâques, année B

Auteur: Materne Pierre-Yves
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : B
Année: 2005-2006

« Dieu est amour » écrit Saint Jean, voilà qui résume tout l'Evangile. Nous sommes toujours émerveillé devant une telle déclaration. Alors qu'il vit ses derniers instants privilégiés avec ses disciples, Jésus les invite à demeurer dans l'amour comme ils ont demeuré avec lui. Tout cela nous plaît mais la culture ambiante ne nous aide pas forcément à aller jusqu'au bout de cette dimension humaine et mystique. Notre société a tendance à renverser les termes. On passe alors de « Dieu est amour » vers l'amour est dieu. En effet, les images et les discours nous focalisent sur la puissance du désir et du sentiment. On est appelé à ressentir, à exprimer nos désirs qui deviennent un peu un nouvel absolu. Les sentiments sont présentés comme le fondement unique aux liens et aux engagements. Que fait-on alors lorsqu'il y a des interruptions, des nuages, des remises en question ? Le mot « amour » est très beau et en même temps tellement complexe. Pourtant, nous n'avons qu'un seul mot pour dire une réalité qui a différentes dimensions. La langue grecque, qui est celle de l'évangile, distingue différents types d'amour. D'abord, il y a le désir, la passion, l'éros qui nous pousse vers autrui. Ensuite, on a l'amour d'amitié (philia) qui introduit dans la relation une égalité, une réciprocité et une fidélité. Enfin, il y l'amour dont nous parle Jésus, l'agapè (charité). C'est l'amour qui suppose une volonté, un respect décidé et assuré. C'est ce qu'a rappelé le pape Benoît 16 dans son encyclique intitulée « Dieu est amour ». Avec intelligence, il reconnaît la place de l'éros tout en reliant celle-ci aux autres dimensions. N'est-ce pas un peu ce que Jésus nous invite à faire ?

Le Christ lui-même se positionne en disant : « Je ne vous appelle plus serviteurs mais amis ». En vivant avec ses disciples, Jésus a fait connaître ce qui l'habitait, dans un partage amical. C'est donc lors d'un repas, en signe d'amitié, que Jésus insiste pour dire que les disciples ne sont pas des serviteurs à commander mais des amis qui sont ses égaux. « Je vous appelle amis ». Ceci a inspiré les grands auteurs spirituels de tout les temps. Pensons à Maître Eckhart, ce dominicain médiéval qui voyait la relation entre l'homme et Dieu comme une relation d'égalité et d'amitié. Nous retrouvons cette insistance chez quelqu'un comme T. Radcliffe, ancien maître général des dominicains. Dieu veut devenir l'ami de chaque être humain.

Très bien, mais le plus bizarre reste que Jésus nous parle de l'amour comme d'un commandement. « Ce que je vous commande, c'est de vous aimer les uns les autres ». Est-ce qu'on peut aimer sur ordre ? Est-ce que l'amour n'est pas plutôt spontané que commandé ? Pourtant Jésus insiste : « vous êtres mes amis si vous faites ce que je vous commande ». C'est peut-être là une originalité du christianisme : l'amour est un commandement, un « tu dois ». Ici, on peut avoir envie de fuir. C'est pourtant un sommet : à côté d'un amour spontané, il y a un amour décidé. C'est le fruit d'un engagement, d'une volonté de respect et reconnaissance. Sinon, comment répondre à cet appel qu'on retrouve ailleurs et qui dit « aimez vos ennemis ». Aimer, ce n'est donc pas seulement une affaire de passion et de désir. Jésus nous pousse à aller plus loin : demeurer dans son amour en prenant une décision. C'est un acte de foi aussi difficile que celui de croire en Dieu aujourd'hui. Encore une fois, la proposition chrétienne nous provoque au défi. Amen.

6e dimanche de Pâques, année B

Auteur: Devillers Raphaël
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : B
Année: 2005-2006

La magnifique allégorie de la Vigne, plantée au centre du grand discours d'adieu de Jésus -son testament -, nous révélait la stupéfiante union de Jésus Seigneur avec les siens : " Je suis la Vigne et vous, les sarments...". Jésus n'est pas qu'un maître spirituel enseignant des disciples, un pasteur guidant ses ouailles : il vit actuellement et se prolonge en ceux et celles qui sont comme "branchés" en Lui.

L'insistance portait sur l'absolue nécessité d'adhérer au Christ, condition indispensable pour réaliser le projet du Père : porter du fruit. Quel fruit ? Rien n'en était dit. La réponse va être donnée dans la suite du texte qui est lu aujourd'hui.

Mais au préalable, trois versets (9 à 11), placés comme en charnière entre les deux volets du diptyque donnent, en clair, un enseignement capital :

9. Comme le Père m'a aimé, moi aussi je vous ai aimés.

Demeurez dans mon amour.

Les soucis d'organisation, de cérémonies, de prescriptions morales risquent toujours de le faire oublier : tout l'Evangile est une question d'amour. Dieu aime, Dieu n'est qu'amour, il est Père de Jésus et celui-ci nous assure qu'il n'a voulu, n'a fait qu'une chose : transmettre intégralement cet amour aux siens. La foi, c'est accueillir, dans notre pauvre corps, le torrent infini de l'Amour divin. Jésus n'imite pas son Père : il aime "comme lui" c'est-à-dire par Lui, à cause de lui. Le Père est source, Jésus est le médiateur qui ne retient rien pour lui.

10. Si vous êtes fidèles à mes commandements, vous demeurerez dans mon amour - comme moi, j'ai gardé fidèlement les commandements de mon Père et je demeure dans son amour.

Au plan biologique, chacun est inséré définitivement à sa place dans son arbre généalogique ; au niveau de la foi, l'homme peut ou non demeurer irrigué par l'amour de Jésus. Unique façon d'être sûr de sa foi : pratiquer l'Evangile, être fidèle aux commandements de Jésus autant que lui l'a été au dessein de son Père. Il nous faut résister à la tentation d'inventer notre religion ou de l'adapter à nos mesures, nous remettre sans cesse en question devant l'Evangile qui nous précise exactement les sentiers de la fidélité.

11. Je vous ai dit tout cela pour que ma joie soit en vous et que vous soyez comblés de joie.

Si dures que paraissent certaines prescriptions de l'Evangile, Jésus ne parle que pour mettre les siens dans la vérité, donc pour les combler d'une joie inaltérable, la sienne, celle de baigner dans la vérité, d'exister dans la confiance, de réaliser sa vocation d'homme.

L' UNIQUE FRUIT DE LA VIGNE

Avertis de la grandeur de la foi, irrigués par la sève de l'amour du Père, en communion de vie avec notre Seigneur Jésus, nous pouvons alors entendre l'obligation de fructifier :

Mon commandement, le voici : aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés.

Il n'y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis. Vous êtes mes amis si vous faites ce que je vous commande. Je ne vous appelle plus serviteurs car le serviteur ignore ce que veut faire son maître ; maintenant je vous appelle mes amis, car tout ce que j'ai appris de mon Père, je vous l'ai fait connaître. Ce n'est pas vous qui m'avez choisi, c'est moi qui vous ai choisis et établis afin que vous partiez, que vous donniez du fruit et que votre fruit demeure. Alors tout ce que vous demanderez au Père en mon Nom, il vous l'accordera.

Ce que je vous commande, c'est de vous aimer les uns les autres.

Le pluriel du verset 10 se concentre dans un singulier : non un conseil, une suggestion mais un ordre unique répété à l'entrée et à la fin du paragraphe : VOUS AIMER LES UNS LES AUTRES. Exigence dans la logique de l'image de la vigne : comment les sarments pourraient-ils continuer à vivre s'ils ne demeurent pas attachés les uns aux autres ?

Remarquez que Jésus ne dit pas d'aimer les autres ! Certes il est bien, il est louable de mener une existence honnête, de rendre service aux voisins, de défendre les droits de l'homme, de prendre part à une ½uvre philanthropique...Mais tout cela, les païens le font aussi !

Ce qui doit manifester la vérité et l'efficacité du projet de Dieu, c'est que l'on voie des hommes et des femmes que tout sépare (rang social, condition culturelle, couleur de peau, nationalité, âge...) et qui pourtant sont rassemblés en une véritable communion. Trop souvent les chrétiens s'offrent une poignée de main, s'imaginent généreux par un geste en faveur d'une ¼uvre...sans que cela les prive en rien...et continuent imperturbablement à s'ignorer les uns les autres. En paroisse, si la communion à l'Hostie ne réalise pas la communion réelle entre membres, elle est hypocrite.

Les jeunes savent que beaucoup de chrétiens sont dévoués, gentils, serviables...néanmoins ils ne nous rejoignent pas. Dans un monde terriblement dur, d'égoïsme exacerbé, de compétitivité implacable, de familles décomposées, de violence larvée, ils se demandent si quelque part une fraternité est possible. Ils connaissent les ¼uvres ( l'abbé Pierre mais aussi les restos du c½ur de Coluche, St Vincent de Paul mais aussi Oxfam et Médecins sans frontières...) mais mal accueillis par la société, anxieux devant un avenir incertain, désemparés parce que éduqués sans repères, ils sont en quête d'espaces d'accueil - tels que leur en présentent les cellules de l'Arche ou de Taizé.

Là il est moins question de faire que d'être et d'être-ensemble.

Là on est appelé non à dépanner des inconnus mais à "donner sa vie pour ses amis" à l'exemple de Jésus.

Là on ne s'enferme pas dans une secte close mais on se sait partie d'une Vigne, d'une Eglise aux dimensions du monde, et on communique avec les frères et s½urs lointains.

Là on sait que l'on est institué pour aller et fructifier et que pour réaliser ce dessein divin, il importe de prier, de demander sans cesse que le Père soutienne sa Vigne, la défende et promeuve son extension universelle

Demeurer sarment, adhérer au Christ : LA FOI

Nous aimer les uns les autres : LA CHARITE.

Obéir au commandement : LA JOIE

Pour être une vigne en perpétuel développement : L'ESPERANCE.

Au c½ur de son testament, le Seigneur nous a dit l'essentiel.

6e dimanche ordinaire, année B

Auteur: Collin Dominique
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : B
Année: 2005-2006

Que de bruit fait-on autour de Dieu ! Que de cris en son nom ! Que d'appels à la vengeance, à la condamnation, à la haine ! Il suffit que quelques caricatures malheureuses soient diffusés par les médias, pour qu'un flot de paroles, de plus en plus outrancières se déversent jour après jour.

Où se trouve Dieu finalement, dans quelle parole, dans quelle prise de position ? Qui a raison ? Qui a tort ? Est-ce bien respecter la volonté de Dieu que de s'insurger en son nom, à réclamer punition et condamnation ? La religion devient de plus en plus bien inquiétante avec ses fondamentalismes, chrétiens, musulmans ou autres... Où est Dieu ? Que dit-il ?

Aussitôt que le lépreux est guéri, Jésus le renvoie avec cet avertissement sévère : « Attention, ne dis rien à personne ! » Jésus sait que ses actes, son message, son identité risquent sans cesse d'être incompris, détournés de leur sens, mal interprétés. Il sait que l'humain désire un dieu à la mesure de ses fantasmes de toute-puissance. Il sait aussi que ceux qui disent agir au nom de Dieu confondent parfois leurs propres désirs avec ceux qu'ils sont sensés servir au mieux.

« Va te montrer aux prêtres », dit Jésus au lépreux. Eux devraient pouvoir comprendre le sens de cette guérison : elle est un témoignage : témoignage de l'action bienveillante et discrète de Dieu. D'un Dieu pris de pitié devant la souffrance humaine, d'un Dieu qui veut le salut et le bonheur de ses enfants, à condition qu'ils le veuillent bien eux-mêmes. « Si tu veux, tu peux me purifier ». « Je le veux, sois purifié ».

Sa purification deviendra un témoignage. Pourquoi ? La lèpre, comme vous le savez, était considérée par les Juifs de l'époque comme une maladie particulièrement honteuse, la marque du péché. Le lépreux est donc une image enlaidie de la condition humaine, il est, pourrait-on presque dire, une caricature de l'humain, voulu à l'image et à la ressemblance de Dieu. Dieu ne supporte pas la caricature, mais pas celle qui le vise lui, mais celle qui nous vise nous : le mépris, la haine, le rejet, l'exclusion, le déni d'amour. Depuis Jésus, Dieu a pris visage d'homme pour montrer, avec la plus grande vérité possible, que la seule image de Dieu est le visage d'un homme et d'une femme : visage où se lit la beauté de la création, la bonté du dessein du créateur, la grandeur du créé. Dieu ne supporte pas qu'on caricature l'humain. Mais sa colère est douceur car elle est compassion : « Pris de pitié devant cet homme, Jésus étendit la main, le toucha et lui dit : « Je le veux, sois purifié ». La réaction de Dieu devant la caricature de l'humain n'est pas la haine, la condamnation ou l'incitation à la violence. Elle est tressaillement du c½ur, compassion vraie, tendresse exprimée. Elle est aussi humble et silencieuse : « Ne dis rien à personne ! »

La lèpre qui caricature l'humain et la religion blesse Dieu. Elle devrait nous blesser également. Elle devrait nous inciter à réagir. Mais uniquement avec les armes de la tendresse et de la compassion. Seul l'amour concret, effectif, restaure en chaque humain l'image de Dieu. Ne nous trompons pas de combat : quand nous voulons, à tout prix, défendre les droits de Dieu, en fait, ce sont nos besoins de puissance que nous voulons défendre. Dieu, lui, est vulnérable : il est manifesté tout autant qu'il est caché dans le visage de l'humain. Il n'est caricaturé que par la haine et la violence faite à n'importe lequel visage. Il n'est restauré dans sa beauté que par la compassion et l'amour exprimé à un visage.

7e dimanche de Pâques, année B

Auteur: Cochinaux Philippe
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : B
Année: 2005-2006

Jn 17, 11-19

Le premier août de cette année, cela fera juste dix ans. Un triste anniversaire plein d'espérance et pourtant difficile à oublier. Il venait de rentrer d'une longue journée où il avait rencontré pas mal de gens. Il était fatigué et heureux de rentrer à la maison. Son chauffeur parqua la voiture dans le garage. Ils étaient ensemble lorsqu'il poussa la porte d'entrée de sa maison. A ce moment, la bombe explosa et tous deux furent déchiquetés. Lui, il avait 19 ans et s'appelait Mohammed, un bon musulman ouvert et chauffeur de métier. L'autre avait 56 ans et était évêque d'Oran. Il était également frère dominicain et jusqu'à l'instant de ma propre mort, je lui serai toujours reconnaissant d'avoir eu la fraternité de m'ordonner prêtre. Je suis heureux mais surtout fier de me dire que par l'ordination presbytérale, je peux m'inscrire dans la lignée de ses fils dans la foi. L'homme dont je vous parle, celui pour qui j'ai tant d'admiration et qui a accepté de laisser couler son sang pour une cause noble et juste s'appelle Pierre Claverie. Il fait partie de ces quelques personnes que nous rencontrons dans nos vies et dont nous regrettons toujours la brièveté de l'instant passé ensemble. Il y a juste seize ans, il était parmi nous à Rixensart pour nous parler de son combat pour la vérité, de son refus d'accepter l'escalade de la violence. Pierre était un frère non seulement dominicain mais un véritable frère en Christ. Il était animé d'une telle foi et d'une telle confiance en l'évangile que rien n'aurait pu l'arrêter. N'ayez pas d'inquiétude, je ne suis pas entrain de le canoniser devant vous. Il n'en a pas besoin et celles et ceux qui ont eu la chance de le rencontrer refusent d'entrer dans une escalade de la sanctification car cela irait tellement à l'encontre de ce qu'il était. Pierre était un révolutionnaire non pas dans le sens qu'il voulait tout changer, qu'il ne supportait pas l'église, qu'il aurait été prêt à dynamiter notre institution ecclésiale. Loin s'en faut. Pierre était un révolutionnaire de Dieu, c'est-à-dire un homme, un frère qui a choisi de prendre les armes de la quête de la vérité pour s'opposer au monde d'injustice et de violence dans lequel il baignait depuis des années. Telle était sa vocation, tel a été le sens donné à sa mort de martyre comme tous les autres qui ont donné leur vie pour l'église d'Algérie. Nous pouvons aisément nous émerveiller d'une vie donnée en plénitude pour l'évangile. Nous pouvons commencer à nous battre pour sa cause de canonisation mais nous passerions à côté de l'essentiel de ce qu' a été le témoignage de sa pèlerinage terrestre. Il croyait en la quête incessante de la vérité. Il l'avait fait sienne jusqu'à y donner sa vie. Sans pour autant entrer dans une dynamique aussi radicale, l'évangile de ce jour nous invite à faire un chemin parallèle. Dans la foi en Jésus Christ, nous ne sommes plus complètement du monde duquel nous sommes issus. Toutes et tous nous sommes des révolutionnaires mais des révolutionnaires de Dieu. Nous n'avons que deux types d'armes : la quête de la vérité et la douceur de l'amour. Toutes les autres sont des pièces factices, des chemins d'égarement vers le succès facile, le pouvoir d'écraser l'autre, la quête incessante du toujours plus, la violence induite par le temps laissé au temps alors que notre société n'a plus de temps au temps. Etre disciple, c'est accepter de refuser les fausses divinités de notre société ; c'est reconnaître que la vie véritable ne se vit pas dans l'urgence de l'instant mais plutôt dans l'instant laissé au temps pour que nous ayons suffisamment de temps justement pour retrouver l'essentiel, l'existentiel. Notre société, de par le biais de différents médias, nous propose une fausse facilité, un confort de vie basé sur le mensonge et la négation de ce qui fait la spécificité de notre humanité. Notre foi en Dieu nous presse à ne pas entrer dans une telle spirale qui conduit à l'anéantissement de ce que nous sommes en vérité. Une fois encore, alors que le Christ s'en est retourné au Père et que nous attendons la venue de l'Esprit Saint sur chacune et chacun de nous à l'occasion de la Pentecôte, nous sommes priés de nous détourner des fausses valeurs de ce monde auquel nous appartenons sans pour autant nous identifier à celui-ci car nous avons acquis la conviction profonde que le Christ nous propose un chemin de vérité qui s'enracine dans la lumière de Dieu, la seule qui puisse éclairer nos vies pour nous conduire sur le chemin de nos destinées.

Amen.

7e dimanche de Pâques, année B

Auteur: Devillers Raphaël
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : B
Année: 2005-2006

Ce soir-là, Jésus partage avec ses disciples un repas qu'il sait le dernier : dans quelques heures, il sera arrêté et mis à mort. Il livre aux siens, inconscients, son testament mais à quoi bon prolonger le discours, ajouter des explications, répéter les mêmes choses ? Ce dont ces hommes ont besoin, ce n'est pas seulement de leçon mais de force. Car s'il importe de recevoir des révélations, encore faut-il pouvoir les mettre en pratique. A l'homme, c'est impossible.

Aussi Jésus se met-il en prière. Tous ces liens d'affection qu'il a noués avec ses amis, il faut les relier à leur source : le PERE.

A nous aujourd'hui, au lendemain de l'Ascension, de méditer cette longue prière de Jésus du chapitre 17 de Saint Jean dont la liturgie nous fait entendre la section centrale.

A l'heure où Jésus passait de ce monde à son Père, les yeux levés au ciel, il priait ainsi :

" ....PERE SAINT : garde mes disciples dans la fidélité à ton Nom que tu m'as donné en partage, pour qu'ils soient UN, comme nous-mêmes.

Quand j'étais avec eux, je les gardais dans la fidélité à ton Nom que tu m'as donné. J'ai veillé sur eux et aucun d'eux ne s'est perdu - sauf celui qui s'en va à sa perte, de sorte que l'Ecriture est accomplie..."

La prière est scandée par l'invocation au PERE - ici PERE SAINT : juxtaposition paradoxale de la transcendance indicible (Saint) et de l'intimité la plus tendre (Père). Proximité et respect, affection et adoration.

Jésus, le Bon Pasteur a toujours gardé ses brebis dans la paix, aucune ne s'est perdue, sauf une malheureuse qui a quitté la communauté. Judas en effet s'est levé et est sorti dans la nuit pour prévenir les autorités. Car la foi n'est jamais une prison. L'amour de Jésus nous laisse tellement libres...que nous pouvons le lâcher et le trahir.

A présent qu'il va disparaître à leurs yeux, Jésus confie les siens au Père : c'est en vivant "au nom du Père", c'est-à-dire à se sachant "enfants du même Père", qu'ils pourront demeurer unis. Jésus ne prie ni pour leur santé, ni pour l'amélioration de leur tempérament, ni pour la réussite de leurs travaux : mais uniquement pour leur UNITE. A quoi servirait tout le reste s'ils ne demeurent pas ensemble ? Divers mais unis. On n'est pas dans l'Eglise pour faire son numéro individuel.

Seule la grâce de la confiance dans le Père peut permettre aux hommes, tellement différents les uns des autres, de demeurer en communion. C'est en reconnaissant chaque "autre" comme "fils du même Père" que le croyant résiste à la terrible force centrifuge qui nous éloigne et parfois nous dresse les uns contre les autres. On a vu naguère comment une "république de camarades" décidés à construire des "lendemains qui chantent" a basculé dans l'abîme.

LA SPIRITUALITÉ DU DON.

On est frappé par la répétition du verbe DONNER (rien moins que 17 fois dans ce chapitre !). Jésus est pauvre : intact de tout amour-propre, il ne s'attribue aucun mérite dans les initiatives et les réalisations de sa mission. Il a tout reçu de son Père : l'½uvre à accomplir, le Nom à garder, le pouvoir sur toute chair, les Paroles, les disciples.... Jésus ne fait pas : il reçoit son être, ses enseignements, ses actes. C'est pour cela qu'il a veillé scrupuleusement à ne dévier en rien, à obéir en Fils, à ne faire que la Volonté de son Père. C'est pour cela qu'il ne capte rien, n'accumule jamais : ce qu'il a reçu gratuitement, il le donne par grâce à son tour. Richesse de la vraie pauvreté. Transparence.

LE DON D'UNE PAROLE : JOIE ET HAINE

Maintenant que je viens à Toi, je parle ainsi, en ce monde, pour qu'ils aient en eux ma joie, et qu'ils en soient comblés.

Je leur ai fait don de ta Parole, et le monde les a pris en haine parce qu'ils ne sont pas du monde, de même que moi je ne suis pas du monde. Je ne demande pas que tu les retires du monde mais que tu les gardes du Mauvais. Ils ne sont pas du monde comme moi, je ne suis pas du monde.

Dans aucun évangile, on ne voit Jésus ponctuer ses enseignements à la manière des prophètes : "ORACLE DU SEIGNEUR". Il n'est pas porte-parole occasionnel : il est cette PAROLE DE DIEU, il est le VERBE, le LOGOS fait chair et venu dans le monde.

Cette Parole, elle va continuer à retentir dans les disciples grâce à l'Esprit "qui leur fera souvenir de tout ce que Jésus leur a dit" (14, 26) et grâce à l'Evangile de Jean qui l'a transmise. A ceux qui demeurent à son écoute et surtout qui l'observent et vivent à sa lumière, grande et inaltérable joie sera donnée : joie d'être dans la Vérité.

Mais ils souffriront beaucoup car la fidélité à cette Parole les démarquera des styles de vie imposés par "le monde". On sait l'ambivalence de ce mot chez Jean qui a écrit : " Dieu a tellement aimé le monde qu'il a donné son Fils, non pas pour condamner le monde mais pour que le monde soit sauvé par Lui" (3, 16) mais qui ici dénonce "le monde" comme la puissance fermée à la grâce, rebelle à Dieu, durcie dans la haine, et derrière laquelle se profile l'inquiétante figure du MAUVAIS. Tout au long de l'histoire, les disciples de Jésus ont été la cible des sarcasmes, l'objet des critiques et même de la haine meurtrière. Jamais comme au XXème siècle, l'Eglise n'a connu autant de martyrs.

Et pourtant les disciples n'ont pas à fuir le monde mais au contraire à s'y enfouir en priant pour demeurer fidèles :

" NOTRE PERE ...mais délivre-nous du Mauvais".

Malheur à qui chercherait à se protéger par ses seuls moyens !

SAINTETÉ ET MISSION

Consacre-les par la Vérité : ta Parole est Vérité.

De même que tu m'as envoyé dans le monde,

moi aussi, je les ai envoyés dans le monde.

Et pour eux je me consacre moi-même afin qu'ils soient eux aussi consacrés par la Vérité.

Que le Père SAINT daigne SANCTIFIER les disciples : c'est sa Parole, qui est VERITE, qui accomplira cette ½uvre. Elle le pourra parce que Jésus se sanctifie, se consacre lui-même, s'offre par amour de son Père et des siens.

Cette sainteté, effet du choix de Dieu, n'est nullement un privilège qui met à part : au contraire elle confère une responsabilité suprême : l'élection est pour la mission.

Et cet envoi dans le monde ne sera jamais une entreprise de l'Eglise, une décision prise par quelques spécialistes. Il y a comme une "coulée continue" : du Père au Fils dans ses disciples vers le monde à sauver.

éternelle. A nous d'écouter cette prière et de lui obéir.

Et que ceux qui ont une certaine responsabilité sur d'autres (parents, chefs, dirigeants, prêtres, supérieures...) Prions-nous ? Le Seigneur, lui, prie pour nous. Notre vie est suspendue à son amour, à sa sollicitude assument cette supplication de Jésus à l'endroit de ceux et celles "que Dieu leur a donnés".

7e dimanche ordinaire, année B

Auteur: Pirson Pierre
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : B
Année: 2005-2006

L'histoire est connue. On pourrait la résumer ainsi. Jésus guérit un paralysé en disant : « tes péchés sont pardonnés ».

Si on prend la peine d'y prêter un peu attention, des questions surgissent :
-   Y aurait-il un lien entre péché et paralysie, maladie, handicap ?
-   Jésus semble ignorer le sens de la démarche du paralysé et de ses compagnons ; ils ne sont pas venus à confesse !
-   Plus fondamentalement : en quoi ce petit fait divers vieux de 2000 ans nous concerne-t-il ?

Y a-t-il un lien entre maladie, ou tout autre malheur et péché : Dieu nous punit ! Cette idée nous scandalise. A juste titre. Même s'il nous arrive de dire ou de penser : « Il ne l'a pas volé ; c'est bien fait pour lui ! » Ou encore « Qu'est-ce que j'ai fait au Bon Dieu ? ». Le « malheur-punition » est comme ancré dans la conscience collective des hommes ; on retrouve cette idée dans l'Ancien testament et dans d'autres cultures et religions. Mais Jésus la refuse catégoriquement. Un jour on lui a demandé : « Cet aveugle : qui a péché pour qu'il soit né aveugle ? Lui ou ses parents ? - Ni l'un ni l'autre répond Jésus ; mais pour que les ½uvres de Dieu se manifestent en lui. »

Jésus réalise ce qu'Isaïe avait annoncé, ce qu'une folle espérance des hommes avait imaginé : « Ne te souviens plus du passé ; je fais un monde nouveau ; par tes fautes, tu m'avais fatigué. Mais moi, oui, moi je pardonne tes péchés, à cause de moi-même ; et je ne veux plus me souvenir de tes péchés. »

Le péché ! parlons-en donc, même si certains évitent le mot ou la notion, « politiquement incorrect » ! Permettez-moi de parler crû en reprenant un mot entendu il y a quelques jours. « Avant, faire l'amour, c'était un péché ; maintenant plus. » C'est en partie vrai ; mais il faudrait beaucoup nuancer. Et il est évident qu'aujourd'hui encore, dans ce domaine, certains éprouvent parfois remords et amertume.

Sans entrer dans de grandes définitions, on pourrait dire qu'il y a péché lorsque, pas seulement dans le domaine de la sexualité, mais aussi du travail, de la famille, de notre vie spirituelle, de nos relations, etc., il y a péché lorsque, au fond de moi-même, à la suite d'actes, de pensées, d'engagements non tenus, de négligences... j'éprouve une certaine honte de ce qui s'est passé, j'espère que personne ne le saura. Alors, face à moi-même, je reconnais : oui, je ne suis pas fier ; je suis un salaud ! Alors, je me sens mal dans ma peau. Le péché qui m'habite est comme une paralysie, un blocage qui me limite, me ronge. La paralysie n'est pas conséquence, punition du péché ; elle en est un symbole, une image très réelle, comme la lèpre, la surdité, la cécité. Alors aussi, face à Dieu, je peux dire « Oui, j'ai péché ; ce qui est mal à tes yeux, je l'ai fait. »

Il est vrai que cela peut entraîner parfois mauvaise conscience, sentiment de culpabilité. Mais ces dérives possibles ne devraient pas occulter la réalité profonde : le mal (mystère !) habite le c½ur de l'homme. Seul Dieu peut nous en délivrer, guérir cette paralysie. C'est pour cela que Jésus est venu ; nous remettre debout, nous libérer, nous rendre la joie de vivre.

Le pardon n'est pas automatique ; il suppose une prise de conscience, une reconnaissance de ma situation. « Oui, j'ai péché ; ce qui est mal à tes yeux, je l'ai fait ; prends pitié de moi, pécheur. » Demander pardon est souvent difficile ; en vérité nous sommes paralysés ! Voyez la résistance des enfants, crispés, butés (« tu veux demander pardon ? ») avant de murmurer, dans un flot de larmes, « pardon » ; alors jaillissent la joie, le sourire, la libération.

« Ne te souviens plus du passé ; je fais un monde nouveau ; par tes fautes, tu m'avais fatigué. Mais moi, oui, moi je te pardonne, à cause de moi-même, et je ne veux plus me souvenir de tes péchés. » Paroles de Dieu dans Isaïe ; paroles que papas et mamans connaissent bien si on remplace péché par bêtise ; d'ailleurs, c'est souvent la même chose ; ne dit-on pas : « j'ai fait une grosse bêtise » ? Notre vie est jalonnée d'une multitude de pardons, demandés et donnés. Les petits 'pardon, excuse-moi' de politesse ; ils ne sont jamais inutiles. D'autres, déjà plus difficiles, désamorcent une tension naissante : « Excuse-moi ; je me suis trompé ; j'ai parlé trop vite » ; ils demandent humilité et courage, mais arrondissent les angles et rendent la vie aimable. D'autres encore, qu'on ne demande qu'après une lutte intérieure ; et sans garantie d'être tout de suite entendu ; mais qu'il faut alors avoir la force d'âme et l'intelligence de redemander. Si nous n'avons pas l'habitude des petits pardons de politesse, demandés et donnés, les gros pardons en seront plus difficiles.

Ainsi du pardon de Dieu. Il y a une multitude de démarches ou de chemins de pardon et de réconciliation. Chaque fois que je dis 'Seigneur, prends pitié ; pardonne-nous nos offenses ; Mère de Dieu, prie pour nous, pécheurs', je reçois le pardon de Dieu. La demande de pardon au cours de la messe est déjà plus réfléchie ; et le pardon, la guérison, la libération nous touchent davantage ; elle nous prépare à recevoir « le sang répandu pour le pardon des péchés ». Enfin, il y a la demande plus personnelle, dans le dialogue de la confession. Ces différentes démarches s'appellent l'une l'autre ; aucune n'est exclusive et ne rend les autres inutiles.

La foule s'était rassemblée dans la maison. Et Jésus annonçait la Parole. « Moi je te pardonne, à cause de moi-même ; et je ne veux plus me souvenir de tes péchés ; mon fils, ma fille, tes péchés sont pardonnés » Le fait divers d'il y a deux mille ans, la bonne nouvelle nous est offerte aujourd'hui. Amen.

8e dimanche ordinaire, année B

Auteur: Devillers Raphaël
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : B
Année: 2005-2006

Mc 2, 18-22

Avez-vous lu Osée ? Appelé par Dieu pour être son porte-parole, ce jeune prophète a vécu une aventure qui, si elle est dramatique, est à l'origine d'une révélation capitale.

Au milieu du 8ème siècle avant notre ère, le petit royaume d'Israël connaît une longue période de paix et de prospérité. Mais une double forfaiture se répand. D'abord si l'on célèbre encore de fastueuses liturgies en l'honneur de YHWH, le peuple court implorer des grâces près des baals, ces dieux de la nature censés accorder fécondité, fertilité, donc enrichissement. D'autre part (ceci lié à cela), le fossé s'élargit entre grands propriétaires qui accumulent des richesses et le petit peuple réduit à la misère. Prenant le relais d'Amos (qui a échoué dans sa tentative de conversion), Osée prêche et dénonce avec virulence cette infidélité envers Dieu, cette injustice sociale.

LE PROPHETE AMOUREUX D'UNE PROSTITUEE

Or arrive l'inattendu : Osée tombe amoureux de Gomer, une de ces filles attachées aux temples des idoles pour conduire les pèlerins à l'extase. Ils se marient et ont trois enfants. Gomer, reprise par ses anciens démons, retourne à ses pratiques de prostitution mais Osée, le mari meurtri, reste toujours amoureux, incapable de répudier son épouse. C'est alors qu'il reçoit une extraordinaire révélation de son Dieu :

" Tu vois, Osée, ton drame est le mien. Moi aussi, je me suis mis à aimer la communauté d'Israël, je l'ai libérée de l'esclavage, j'ai conclu une alliance avec elle, je lui ai offert une terre magnifique, je l'ai comblée de cadeaux... mais elle est devenue infidèle, elle m'a trompé en courant derrière des idoles, elle s'est "prostituée " avec des faux dieux. Néanmoins je suis incapable de la rejeter et de la condamner de façon définitive - car je l'aime toujours comme un Epoux : c'est pourquoi je vais la châtier durement : alors elle reviendra à moi et je lui rendrai un amour éternel. Agis de même avec ton épouse".

Pour la première fois de son histoire, grâce à Osée, Israël apprend que l'alliance avec YHWH n'est pas une convention juridique, un accord compatible avec d'autres accords, un pacte qui se satisfait de quelques cérémonies - mais qu'elle est véritablement un mariage.

La foi est un don irrévocable d'amour.

L'infidélité à YHWH est pire qu'une désobéissance : c'est un adultère, une prostitution !

Adorer des idoles, profiter de l'injustice, c'est bafouer l'amour !

N'est-ce pas ce qui se vit aujourd'hui chez nous ?

JESUS EST L'EPOUX AMOUREUX ET TRAHI

Venons-en à présent à l'évangile de ce jour. A Capharnaüm, Jésus vient d'appeler Lévi, un jeune percepteur d'impôts, à quitter son métier et à le suivre. Tout heureux, le jeune converti invite ses collègues à un repas d'adieux si bien que Jésus et ses premiers apôtres se retrouvent à table en compagnie de ces hommes tenus pour des pécheurs méprisables puisque non seulement ils collaborent avec l'occupant païen mais pratiquent la corruption et volent leurs frères.

Or, justement, ce jour-là était jour de jeûne, moment de pénitence, en mémoire sans doute d'un événement national douloureux

On vient demander à Jésus :

Pourquoi tes disciples ne jeûnent-ils pas comme les disciples de Jean-Baptiste et des Pharisiens ?

Jésus répond :

Les invités de la noce pourraient-ils donc jeûner pendant que l'Epoux est avec eux ? Tant qu'ils ont l'Epoux, ils ne peuvent pas jeûner.

Il faut mesurer l'exorbitante, l'incroyable prétention de cette déclaration : Jésus s'attribue le titre d'Epoux que Osée puis Jérémie avaient donné à YHWH !

Ce banquet où il fraternise joyeusement avec d'anciens pécheurs qui "se prostituaient" avec l'argent et le vol mais qui reviennent à lui est le repas de Noces de la fidélité retrouvée.

Au lieu de jeûner, il faut donc célébrer la fête, faire éclater l'allégresse. En Jésus, Dieu pardonne et reconstitue sa communauté.

Pourquoi son peuple, son Eglise chercherait-elle sa justice par des pratiques ascétiques ?...Que s'en étonnent les fidèles d'autres religions, elle ne peut pas jeûner puisque son Dieu s'unit à elle !

L'ÉPOUX ENLEVÉ ET RENDU

Mais tout de suite Jésus ajoute une prédiction sinistre :

" Mais un temps viendra où l'Epoux leur sera enlevé :

ce jour là, ils jeûneront "

Que Jésus pardonne les péchés du paralytique, qu'il ose ici s'appeler l'EPOUX, qu'il se déclare maître du sabbat (dimanche prochain), voilà qui est proprement inacceptable, scandaleux, blasphématoire aux yeux des pharisiens. Leur stupéfaction tourne à la furie, à la haine et Jésus pressent sa mort prochaine.

Oui, un jour, l'époux sera "enlevé" : c'est ainsi qu'Isaïe avait évoqué la mort tragique du mystérieux Serviteur souffrant (Is 53, 8) qui, dans d'atroces souffrances, s'offrira pour ses bourreaux afin qu'ils soient pardonnés.

Répétant et prolongeant le drame d'Osée, Jésus - époux amoureux et trahi, serviteur fidèle de Dieu - donnera sa vie pour son peuple qui le refuse, son épouse infidèle et adultère.

Alors en ce jour où il sera "élevé/enlevé" sur la croix du Golgotha, les disciples seront tellement épouvantés qu'ils ne pourront pas manger : ils feront pénitence, ils jeûneront en pleurant la mort de leur Maître (c'est pourquoi la première Eglise ne pratiquait qu'un unique jour de jeûne : le vendredi-saint)

Mais alors, ils pourront se regrouper autour de la Table pour l'Eucharistie et en partageant le petit bout de pain, ils feront l'expérience que leur maître ne leur a pas été enlevé pour toujours, qu'il est le Seigneur, l'Epoux qui n'en finit pas d'inviter les hommes à abandonner leur idolâtrie et à communier à son allégresse divine.

Cette joie, aucun festin de la terre ne pourra la leur offrir.

Il y reste beaucoup de places : vous êtes tous invités.

Pourquoi ne répondez-vous pas à l'appel ?

Est-ce parce que nos Eucharisties ne se manifestent pas comme des banquets où nous fêtons l'amour et le pardon grâce à notre unité

Ascension

Auteur: Devillers Raphaël
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : A, B, C
Année: 2005-2006

40 jours après sa naissance, Jésus a été présenté à Dieu par ses parents : pour la première fois, il entrait dans le temple de Jérusalem.

A 12 ans, à ses parents angoissés de l'avoir perdu, il a répondu qu'il "lui fallait être chez son Père"...donc dans le temple... puisque Joseph n'était que son père adoptif.

Plus tard toute sa mission fut orientée par le même but : monter de Galilée à Jérusalem et purifier ce temple qu'il déclarait "Maison de Mon Père". Scandalisés par cette prétention, les dirigeants tramèrent un complot et firent condamner ce Jésus qui fut élevé sur une croix dressée sur la colline du Golgotha.

Mais Jésus savait que cette mort n'était pas un échec, que la porte de "sa" maison allait s'ouvrir, et ses derniers mots furent une prière d'abandon et de confiance :

"Père, entre tes mains, je remets mon esprit".

Il avait raison, il devait "être chez son Père" :sa recherche d'enfant aboutissait. Il ne périt pas dans la mort et son Père le releva.

C'est pourquoi, aujourd'hui, en la fête de l'ASCENSION, nous célébrons l'aboutissement victorieux de cet itinéraire de Jésus.

40 jours après sa re-naissance pascale, il se présente à son Père des cieux, il termine sa course tragique : sa croix fut un tremplin pour rejaillir dans la Gloire. Son Père a cassé la sentence du procès, il a exaucé sa prière et accueilli son Fils, chez Lui, pour l'éternité.

LES APOTRES APRES L' ASCENSION

Après le temps très bref des apparitions, enfin convaincus qu'ils n'étaient pas sujets d'hallucinations mais que Jésus était bien vivant, sûrs qu'ils ne le verraient plus ici-bas mais qu'il reviendrait à la fin des temps, ils se réunirent dans une maison de Jérusalem et se mirent à prier dans l'attente du Souffle de Dieu que Jésus avait promis de leur envoyer.

Car Jésus monté au ciel était bien devenu le Seigneur du monde, il avait accompli définitivement l'½uvre du salut des hommes : il fallait = annoncer son message et sa Pâque à toutes les nations...alors même que l'on venait de faire l'humiliante expérience de la faiblesse et du péché (car on avait abandonné le maître tant aimé et même on l'avait renié devant les puissants).

Comment donc remplir la mission reçue sans un changement total ? Comment oser secouer l'indifférence des foules et affronter l'hostilité des adversaires sans recevoir l'Esprit de Dieu, la seule énergie capable de transformer de pauvres hommes en témoins intrépides ?

Pendant 9 jours, en compagnie de Marie et de quelques femmes, ils attendirent ensemble dans la prière : Jésus n'avait pas précisé l'échéance.

...Et le 50ème jour après la Pâque, au moment où Israël célébrait la Fête des Semaines, la Pentecôte, qui rappelait le jour où Israël avait accepté l'Alliance et reçu la Loi donnée par Dieu au mont Sinaï, le groupe des apôtres fut emporté dehors par le souffle impétueux de l'Esprit.

La Nouvelle alliance était conclue, la Bonne Nouvelle commençait à être proclamée dans toutes les langues.

Nous en vivons encore aujourd'hui :

Oui, Jésus a donné sa vie pour enlever nos péchés ;

Son Père l'a sorti de la mort et l'a ressuscité ;

Il l'a accueilli près de lui dans sa Maison.

Là est notre demeure définitive.

NOS TROIS MAISONS

Comme Jésus, nous sommes nés et avons grandi dans une maison.

Puis nous avons découvert une maison d'Eglise dans laquelle nous sommes re-nés à la Vie nouvelle grâce au baptême : elle nous aidait à grandir mais restait grevée de beaucoup de faiblesses.

Enfin nous aussi, au terme de notre chemin terrestre, nous croyons que nous serons "élevés" dans la Gloire et que nous pourrons entrer dans la Maison du Père où il n'y a plus de préjugés, de rivalités, d'indifférence, "là où il n'y a plus de cris et de larmes mais où Dieu est tout en tous".

Cela à une unique condition : marcher dans les pas de Jésus, chercher la vérité quoi qu'il en coûte, vivre l'amour jusqu'à donner sa vie.

UNE NEUVAINE DE PRIÈRE À L'ESPRIT - SAINT

Les savants peuvent bien réaliser et nous promettre de futurs voyages dans l'espace : nous savons que nulle planète ne pourra être notre Maison. Où que nous allions, nous n'habiterons jamais que "des résidences secondaires" et, voyageurs dans le temps, nous n'y ferons que des séjours temporaires.

Nos lieux, si chéris soient-ils, ne sont que des escales.

Seule la Maison du Père peut accueillir et rassembler dans l'unité des hommes et des femmes de toutes provenances.

Seule elle peut leur assurer une joie éternelle.

En cette fête de l'Ascension, nous ne guettons pas le ciel dans l'attente d'une hypothétique apparition. A l'exemple des apôtres, nous commençons une NEUVAINE DE PRIERE, nous implorons la venue du Souffle de Dieu.

Car à nous aussi, la consigne est donnée : il faut évangéliser, présenter la Bonne Nouvelle de Jésus aux foules qui l'ignorent.

Qui ne perçoit l'urgence de cette mission ? Qui n'expérimente sa propre faiblesse et sa lâcheté ? Qui n'est sûr que seule la Puissance de Dieu peut changer nos c½urs de pierre en c½urs de chair, exorciser nos peurs, ouvrir notre bouche, nous aider à étendre les bras pour embrasser nos frères...et aller sur la croix ?

Dimanche de Pâques

Auteur: Cochinaux Philippe
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : A, B, C
Année: 2005-2006

Pour entrer dans le mystère de la Résurrection, le plus simple serait, semble-t-il, d'entrer dans la peau de certains sportifs. Il est vrai que, dans la page d'évangile que nous venons d'entendre, tout le monde court : Marie-Madeleine, Jean puis Pierre. Toutefois, ce n'est pas la course à pied qui devrait nous éclairer. Non, je crois que le sport le plus utile pour comprendre ce mystère est le ski. Dans un premier temps, ayant peur de ce que nous allons trouvé, nous pourrions utiliser la technique du chasse-neige. Nous avançons lentement. Nous ne prenons pas trop de risques. D'autre part, nous pourrions également être plus téméraires, un peu à l'instar de Pierre, c'est-à-dire mettre les skis en parallèle et foncer sans s'arrêter. Le risque d'une telle attitude est grand puisque nous risquons de ne pas être capable d'éviter l'obstacle et surtout, de ne pas voir ce qui se passe réellement. Alors, il nous reste une troisième technique, celle qui est sans doute la plus appropriée pour entrer dans un tel mystère : le retournement. Face à l'obstacle, je mets un premier ski puis l'autre perpendiculaire à la piste. Je prends un angle droit pour éviter le danger dans le sport, pour me détourner de mes certitudes afin de me laisser toucher par ce qui me dépasse.

En effet, Pâques est de l'ordre de l'indicible, d'un mystère qui va au-delà de toute compréhension. Nous ne pouvons appréhender cet événement par nos lois de la raison. La résurrection du Christ ne peut commencer à se comprendre que si nous effectuons nous aussi un retournement sur nous-mêmes. Dans un autre récit évangélique du tombeau vide, Marie-Madeleine se retournera par deux fois : une première fois, pour entendre le message des anges et une seconde fois, pour reconnaître le Christ en personne. Elle vivra un retournement physique. Jean, quant à lui, effectue également un retournement mais cette fois plus de l'ordre du spirituel. La logique aurait voulu qu'il entre directement dans ce fameux tombeau vide. Il n'en fait rien. Il s'arrête. Il prend son temps d'abord pour observer tous ces petits détails, puis il entre et alors, il vit et il crut. Le retournement spirituel était donc nécessaire pour arriver à saisir l'incroyable de l'événement de Pâques : le Fils de Dieu est ressuscité, le Christ a vaincu la mort et nous fait dorénavant participer au don de la vie éternelle. Voilà, la merveille de Pâques. Nous assistons à la mort de la mort ou en d'autres termes, la mort est morte. Cette dernière n'aura plus jamais le dernier mot. Elle n'est plus une fin en soi mais l'instant précis de l'entrée dans l'éternité. Nous ne nous arrêtons pas avec la mort. Non, la mort nous la traversons, elle est cette infime seconde, ce passage vers la lumière divine.

En entrant dans ce tombeau vide, le Christ nous retourne également. Il nous fait quitter le monde de nos certitudes pour entrer dans l'univers de la foi et de l'espérance. Par l'événement de Pâques, chacune et chacun de nous découvrons une nouvelle dimension de notre être : nous sommes devenus des êtres résurrectionnels, c'est-à-dire nous prenons conscience que nous sommes appelés à quelque chose de plus grand encore. Dieu nous veut auprès de Lui. Il nous attend car c'est en Lui que nous nous accomplirons pleinement. Il espère que toute sa création répondra positivement à l'appel de la vie éternelle, don par excellence de toute vie. Nous sommes donc conviés à vivre ce retournement intérieur, à accepter avec humilité que nous ne pouvons pas tout expliquer, tout comprendre. Nous entrons dans un mystère qui ne s'éclaire qu'en le vivant pleinement, passionnément. Notre retournement est signe d'une confiance, malgré certains doutes qui pourront nous traverser, d'une confiance donc au don de la vie éternelle. Par l'événement de sa résurrection, le Christ retourne nos vies pour ouvrir toutes nos portes intérieures vers l'horizon du projet que Dieu a pour chacune et chacun de nous : notre accomplissement en Lui. Et ce qu'il y a de merveilleux dans ce que nous célébrons aujourd'hui, c'est cette promesse que nous pouvons déjà participer dès maintenant à l'événement de notre propre résurrection. D'une manière très simple : le Christ a ouvert son tombeau pour que nous-mêmes nous nous ouvrions aux autres car l'ouverture à l'autre est la possibilité offerte de rencontrer Dieu tous les jours puisqu'il se laisse découvrir dans toute relation d'amour. Répondre à l'invitation de la résurrection, c'est alors prendre conscience que nous sommes des êtres résurrectionnels, c'est-à-dire des êtres qui participent à la réalisation de leur vocation en aimant tout tendrement.

Amen.