14e dimanche ordinaire, année A

Auteur: Cochinaux Philippe
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : A
Année: 2004-2005

Mt 11, 25-30

Merveilleux ou éclair au chocolat ? Misérable ou javanais ? Soupe de fruits rouge ou nougatine au coulis de framboise ? Duo de mousses ou boule de glace aux amandes sur une pêche confite au sirop d'orgeat ? Régime ou assortiment de desserts ? Expresso ou Irish coffee ? Tant de questions où nous aimerions pouvoir rester sans réponse pour goûter à « un petit peu de tout ». Tant de questions qui ne peuvent se résoudre que par un choix à poser. Mais pourquoi faut-il si souvent choisir ?

Choisir, choisir, toujours choisir ! N'est-ce pas cela le signe même de notre liberté humaine ? En effet, cette dernière se caractérise d'abord et avant tout par notre capacité de poser des choix. S'il n'y a pas d'alternatives, si aucune possibilité n'est proposée, s'il n'y a donc pas de choix, il n'y a tout simplement plus liberté. Et en l'absence de liberté, nous quittons le champ de l'éthique, c'est-à-dire le champ des nos actions enracinées dans l'amour puisque la loi est de l'ordre de la morale, tandis que l'éthique inscrit nos actes dans l'amour, souligne un philosophe contemporain. Que nous le voulions ou non, choisir est essentiel dans toute vie humaine. Et c'est tellement important que si nous décidons de ne pas choisir et bien, d'une certaine manière, nous choisissons quand même et ce choix nous intègre à nouveau dans le champ de l'éthique.

Nos choix sont donc essentiels et vont guider nos existences même si certains prétendent que dans la vie de tout être humain, nous ne faisons que cinq ou six choix qui vont nous marquer de façon indélébile. Cette dernière affirmation est sans doute vraie : choix du partenaire amoureux ou d'un autre type de vie, choix d'un type d'études ou de métier, choix d'un lieu d'habitation. Je vous laisse la liberté de choisir pour compléter cette liste de manière plus personnelle. Puis, il y a aussi cette multiplicité de choix qui ont également toute leur pertinence : choix des valeurs à transmettre aux générations futures, choix des mots à dire ou ne pas dire, choix des relations, etc. Nous sommes donc conviés, par la vie, à toujours poser des choix. Et heureux sommes-nous car ils nous rappellent chaque fois ô combien nous sommes des êtres libres.

Mais comment être certain de ne pas se tromper ? Quelle est la voie à suivre ? Le frère Gareth Moore, dans un article traitant de cette question, affirmait, il y a quelques années déjà, que l'être humain devait toujours, parmi les différentes possibilités qui s'offraient à lui, choisir la solution qui apportera « le plus d'amour ». Dans cette perspective, il n'y aurait donc plus qu'un seul et unique critère : celui du « plus d'amour ». Si ce dernier guide nos choix, nous ne pouvons plus nous tromper et nous découvrirons que même si aujourd'hui nous aurions fait d'autres choix que ceux que nous avions posé à l'époque, nous pouvons reconnaître que, puisqu'ils ont été posés dans l'amour, ils gardent toute leur pertinence, leur validité à l'heure actuelle. Le choix du « plus d'amour » nous conduit toujours dans la bonne direction puisque c'est ce que Dieu semble attendre de chacune et chacun de nous.

En effet, vivre selon la chair, c'est-à-dire selon la logique de la domination, de la violence, de l'écrasement, du profit direct est un choix qui nous éloigne de Dieu. Par contre, vivre selon l'Esprit, c'est-à-dire ayant comme objectif de mettre en ce monde de la douceur, de la tendresse et surtout du respect vis-à-vis de chaque être humain quelle que soit sa condition sociale, culturelle, intellectuelle est un choix qui non seulement nous rapproche de Dieu mais nous fait participer activement à la construction de son Royaume ici-bas et dès maintenant.

Il est toutefois vrai qu'il y a parfois des choix difficiles à faire et nous pouvons aussi avoir l'impression que même s'ils sont nécessaires, ils restent pénibles à vivre. Nous pourrions entrer de la sorte dans une spirale de désespérance. Il nous reste alors comme solution de poser ces choix en Dieu, de nous laisser guider par le Christ afin que l'Esprit nous guide à trouver la solution qui apportera une fois encore le « plus d'amour ». De cette manière, nos actes, nos paroles, nos attitudes s'enracinent dans le Christ et ils deviennent légers. Dieu, le Fils, dans l'Esprit, les porte avec nous. Cela nous semblait au départ impossible, insurmontable et voilà qu'à la lumière de la foi, tout s'éclaire : « oui, mon joug est facile à porter et mon fardeau, léger ». S'il en est vraiment ainsi, alors que ce soit « merveilleux ou éclair au chocolat ? », peu importe, je les aime tous les deux. Il me suffit de poser le choix du « plus d'amour », c'est-à-dire un pour vous, un pour moi. Amen.

15e dimanche ordinaire, année A

Auteur: Eggensperger Thomas
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : A
Année: 2004-2005

 

 

Mt 13, 1-9

Chers s½urs et frères,

Nous avons entendu une parabole : Jésus parle d'un paysan qui a semé des grains. Les semailles présentent toujours des résultats divers : Il y a des succès, des ratés, une chose entre les deux. Ça dépende de la qualité de la terre.

Juste avant la préparation de cette prédication j'ai parlé avec un ami qui est étudiant en philosophie et théologie. Il est croyant (même catholique...) et très intéressé par les questions spirituelles et théologiques. J'ai mentionné mon obligation de préparer cette prédication de dimanche sur une parabole. Il m'a dit toute de suite : « Je ne comprends pas ces paraboles du Nouveau Testament. J'ai mes difficultés. Il y a de mauvais exemples pour un message pas clair et diffus. Mal fait comme texte littéraire... »

Je restais un peu perplexe et j'ai réfléchi à son opinion. Je n'ai pas oublié cette opinion pendant mon étude pour préparer cette prédication. Oui, je pense qu'il a raison d'une manière :

À mon avis il y a un problème fondamental pour un lecteur d'aujourd'hui qui lit des textes de la bible : Les textes et les contenus concernent des sujets qui étaient très importants, très actuels et très vivants pour un lecteur du temps antique ou historique : On touche des traditions de l'agriculture et l'élevage des animaux. Ce n'est pas une surprise parce que même les auteurs, même les lecteurs viennent d'une culture agraire. C'était un langage compréhensible pour tous. On connaissait bien les événements des champs, les crises régulières d'une mauvaise récolte et l'avantage d'une bonne moisson.

Mais il y a un imparfait dans mon explication : « C'était un langage compréhensible... »

Où est le problème ? Le problème est la situation actuelle : Nous - comme citoyens d'une ville comme Bruxelles - nous ne connaissons plus la situation agraire. Nous ne sommes pas des paysans. Je suppose qu'il y a ici dans notre église extrêmement peu de connaisseurs de la vie paysanne d'aujourd'hui. Même les spécialistes du parlement ou de la commission pour des questions d'agriculture à peu d'exception près ne sont pas nés dans le milieu agraire. Pour un pays européen la récolte n'est pas un problème réel : Dans le cas où une récolte est faible ou mauvaise dans le propre pays on achète les produits hors du pays. Le consommateur doit payer peut-être un Euro de plus pour le kilo. C'est tout. Personne ne dort mal aujourd'hui à cause d'une mauvaise récolte, sauf le paysan.

Voilà - comment comprendre aujourd'hui une parabole avec des métaphores comme « grains », comme « semeur », comme « pousser » et « se dessécher » ?

Ma proposition est l'abstraction : Jésus ne voulait pas réfléchir sur les problèmes de l'agriculture, de l'aridité ou de la récolte. Il n'était pas spécialiste de ce sujet, peut-être qu'il n'a jamais été au champs. On n'en sait rien.

Jésus ne parlait pas des récoltes. Il parlait d'un sujet plus dramatique. Ce sont des questions fondamentales d'un homme, c'est l'évangile.

Il faut l'abstraction d'un vocabulaire, une terminologie assez inconnue aujourd'hui.

Qu'est-ce que le contenu de notre parabole ?

Je vois dans notre texte le principe de « Try and error », « d'essai et d'erreur ». Si on veut essayer quelque chose, si on veut faire une expérimentation, on ne sait pas d'avance le résultat. C'est le cas dans la chimie, la physique et dans la médecine aussi. Avant de présenter un nouveau médicament il faut une série d'expérimentations du côté de la recherche pharmaceutique. Avant de formuler une nouvelle thèse le spécialiste fait beaucoup d'études préliminaires sans trouver la thèse assurée. Pour un chercheur il est frustrant de voir combien des essais il doit faire avant de recevoir un résultat assez intéressant et important.

C'est un peu comme notre semeur : Il distribue une centaine des grains mais il y aura seulement une petite pourcentage des grains qui pousseront bien.

Il touche un peu le contenu de la parabole présentée dans l'évangile de Matthieu : Jésus n'est pas seulement intéressé à expliquer la différence entre succès et échec de l'agriculture. C'est évident qu 'il faut beaucoup d'essais pour trouver un résultat agréable. Plus il y en a, mieux ça vaut !

L'évangile est plus subtil : Avant un essai on a besoin d'autre chose : C'est le courage pour commencer un essai. Il faut le chercheur qui est prêt pour des expérimentations décourageantes. On parle sur le principe de « Try and Error », « d'essai et d'erreur ». La transformation de ce principe est forte, souvent dramatique. L'auteur de l'évangile ne voulait pas encourager les paysans à semer. Il voulait surtout encourager le peuple et ses disciples à la réflexion sur la foi, sur le message de Jésus. Il ne suffit pas de dire ou supposer qu'on est croyant, qu'on est proche du message de l'évangile. Pas du tout ! Avec cette base commence le projet de la recherche : ça veut dire quoi, « Dieu », « résurrection », « salut » ?

Il n y a pas de réponses simples pour ces questions. La conviction seule reste très abstraite. La parabole demande à ses lecteurs le courage de réfléchir, de demander, de rechercher. Comme fidèle on va trouver assez de résultats insatisfaisants, réponses faibles et des solutions vagues.

Mais comment trouver des résultats, des réponses et des solutions sans commencer un essai pour chercher, demander et problématiser ? Même si beaucoup des tels essais seront une erreur, cette série des essais est la condition essentielle pour trouver le noyau de ce que nous appelons la « vérité ».

La parabole de l'évangile veut nous encourager à ne pas abandonner pas la disposition pour réfléchir sur notre foi.

Amen !

15e dimanche ordinaire, année A

Auteur: Cochinaux Philippe
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : A
Année: 2004-2005

En méditant cet évangile, je me suis imaginé la situation burlesque suivante. Avant d'avoir goûté au fruit défendu, celui de l'arbre de la connaissance, Adam et Eve sont au paradis, en harmonie complète l'un vis-à-vis de l'autre. Un soir, pour passer le temps, ils décident de jouer aux cartes et voilà qu'Adam a une idée tout à fait saugrenue et propose à sa charmante épouse, Eve, non plus de jouer à la manie mais de faire plutôt un strip-poker. Vous savez, ce jeu, inventé, il y a des siècles où le perdant enlève un vêtement. Je comprendrais l'étonnement d'Eve qui se dit que ce jeu est impossible et tout à fait stupide puisqu'ils sont nus tous les deux. Comment enlever quelque chose à quelqu'un qui n'a plus rien ? Vous voyez l'absurdité de la situation.

D'où mon étonnement de retrouver ce type de phrase dans la bouche du Christ : « celui qui n'a rien se fera enlever même ce qu'il a ». Mais s'il n'a rien, il est impossible de lui enlever encore quelque chose. Dieu le Fils ou l'évangéliste se serait-il tromper ? Je n'en sais rien mais il y a une erreur de logique me semble-t-il. Ou alors, Jésus savait très bien en disant cela que ce type de personne n'existe pas. Aucun être humain n'a rien aux yeux de Dieu. Aucun être humain n'est rien aux yeux de Dieu. A l'instant même de notre conception, nous avons reçu, chacune et chacun, un ensemble de dons, de compétences. Elles sont là, en nous. Elles sommeillent et n'attendent qu'à être réveillées une fois pour toute afin de pouvoir se développer. Tout être humain quel qu'il soit a reçu des dons.

De par notre nature humaine, enracinée en Dieu, nous sommes toutes et tous des êtres doués. Ayant été créés à l'image de Dieu, avec comme mission l'acquisition de la ressemblance, Dieu a fait de nous une « bonne terre » à ensemencer. Il est vrai qu'avec les aléas de la vie, avec certains événements douloureux tels que la maladie, la perte d'un être cher, des blessures morales, des failles dans l'âme, notre terre personnelle a peut-être un peu perdu de sa richesse première. A certains endroits de notre c½ur, des ronces ont poussé, à d'autres, le terrain est devenu plus sec, plus rocailleux mais il y a toujours un lieu où la terre a gardé sa fraîcheur originelle. Il s'agit du lieu de Dieu. Par définition, depuis l'instant de la Création, Dieu le Père a marqué le monde de l'abondance de ses semailles. Il sème à tous vents et en tous lieux. En lui, il n'y a ni pertes ni profits. Tout ne peut être que bon puisque c'est lui qui nous ensemence à partir de sa propre divinité.

Parfois, certains d'entre nous peuvent être traversés par le sentiment que leur terre intérieure est devenue au fil des années un désert stérile où plus rien de bon ne peut pousser. Puissent-ils se détromper de cette image et se détourner d'une telle désespérance car en nous, il y a toujours un coin de bonne terre où Dieu peut venir déposer ses semailles. A nous de le trouver, de le retrouver si nécessaire. Il suffit de rechercher le chemin tracé en nous par le Fils dans l'Esprit. En le suivant, nous retrouverons ainsi non pas l'ombre divine mais la présence du Père au plus profond de notre être. Une présence qui ne se contente pas seulement d'une rencontre intime mais qui attend de nous que nous comprenions la mission qui nous a été dévolue dans l'accomplissement du Royaume de Dieu. Et cette mission ne peut se vivre qu'à partir de l'ensemble des dons que nous avons reçus. Aucun être humain ne peut prétendre avoir été dépossédé de ceux-ci. Ces derniers sont là et ne cherchent qu'à pouvoir s'épanouir. Il suffit pour ce faire de prendre une fois encore ce chemin intérieur et si nous pensons que nous n'avons pas la capacité de le faire, puissions-nous alors invoquer l'Esprit Saint pour qu'il mette sur notre route humaine des personnes qui nous feront découvrir toutes ces richesses qui sommeillent en nous et qui n'attendent qu'une seule chose : que nous les réveillions.

En Dieu, il y a toujours de l'espoir, rien n'est jamais complètement asséché. Il suffit d'un petit bout de bonne terre intérieure pour que tout puisse recommencer. Si nous prenons pleinement conscience de cette réalité alors nous ferons partie de celles et ceux qui se réjouissent des dons reçus et qui osent les exploiter pour participer à leur manière à la réalisation de l'être humain et de la création toute entière. Heureux serons-nous alors car « celui qui a recevra encore, et il sera dans l'abondance ». Jésus n'a-t-il pas dit : « je suis venu pour que les êtres humaines aient la vie et qu'ils l'aient en abondance ». En Dieu, quelle belle destinée avons-nous à accomplir. Il ne nous reste qu'à faire fructifier l'ensemble de ces dons reçus. Nous sommes la bonne terre de Dieu. Amen

18e dimanche ordinaire, année A

Auteur: Cochinaux Philippe
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : A
Année: 2004-2005

Ah, les bons conseils. Il semble que la majorité des êtres humains ont toujours été très friands des bons conseils. Il est vrai qu'un bon conseil ne coûte rien, juste un peu de notre réflexion, juste un peu de notre temps. Hélas, les bons conseils ne sont pas toujours aussi bons, aussi judicieux que cela. En effet, certains bons conseils peuvent facilement devenir soit des projections de nos histoires personnelles, soit des reproches détournés. En agissant de la sorte, nous sommes alors un peu comme les disciples de Jésus dans cet épisode de l'évangile : « l'endroit est désert, et il se fait tard. Renvoie la foule : qu'ils aillent dans les villages s'acheter à manger ! ». Comme nous pouvons le constater, ils jouent le rôle de « bons » conseillers, mais pensent-ils vraiment à ces gens ou bien sont-ils plutôt pétris de leur propre personne, de leur inquiétude à devoir partager le peu qu'ils possèdent. En fait, ils semblent d'abord chercher simplement leur tranquillité. Ils ne conseillent pas, ils reprochent. N'en va-t-il pas souvent ainsi dans nos vies personnelles ? Conseillons-nous véritablement celles et ceux qui viennent à nous en demandant un service, une aide, un conseil ou sommes-nous plutôt entrain de pointer leurs failles, leurs erreurs, leurs manquements. A l'image des disciples qui, d'une certaine manière, soulignent que tous ces gens auraient pu prendre de quoi se nourrir avec eux sans pour autant prendre conscience que lorsqu'on a la chance de pouvoir se nourrir de la Parole de Dieu, l'être humain se préoccupe alors peu des contingences matérielles telles que la nourriture, voire un lieu pour se loger. C'est sans doute une des raisons pour lesquelles le Christ ne conseille jamais celles et ceux à qui ils s'adressent. Il propose un chemin de liberté qui conduit à la vie éternelle. A chacune et chacun de décider de le suivre ou non. Il ne conseille pas, il ne force pas. Le Christ nous interroge et nous convie à répondre à ses questions de manière personnelle car il sait pertinemment bien que toutes les réponses sont en nous. Laissons-nous alors inspirer par l'Esprit Saint pour qu'il nous guide sur la route de la vie. Le Fils de Dieu ne conseille donc pas. Peut-être parce qu'il a compris que le conseil s'enracine souvent dans la vie de celui qui le donne plutôt que dans celle de celui qui le demande. Or il n'est pas possible d'universaliser une situation singulière. Ce qui est ou a été bon pour nous, ne l'est peut-être pas pour un autre. Puissions-nous aussi quitter le chapelet des conseils pour entrer dans la dynamique des questions. Il n'y a jamais de réponse certaine, sauf évidemment pour les questions sans intérêt. A chaque conseil demandé, apprenons à répondre par une question pour que la personne qui se trouve face à nous trouve en elle la réponse à sa propre demande. Et cette réponse, dans le mesure du possible, sera plurielle pour qu'elle puisse choisir, ce qui dans sa situation sera la meilleure solution, c'est-à-dire celle qui apportera le plus d'amour. Tel est le sens de notre liberté d'enfants de Dieu. D'une certaine manière, c'est ce que fit Jésus dans l'évangile en refusant de suivre les conseils de ses disciples. C'est en lui, et uniquement en lui qu'il trouve en lui la solution. Avec ce qu'ils ont amené, Jésus prit les cinq pains et les deux poissons, et, levant les yeux aux ciel, il prononça la bénédiction. Il rompit les pains, il les donna aux disciples, et les disciples les donnèrent à la foule. Il ne s'agit pas d'abord d'un miracle, d'une multiplication incompréhensible a nos yeux. Il s'agit d'un don, d'un partage à partir de ce que le Christ donne de lui-même. Et ce qui frappe, une fois encore dans le récit entendu, c'est l'abondance du don offert. Nourrissons-nous de cette Parole de Dieu, Parole de vie par excellence. Grâce a elle, nous n'aurons plus jamais faim car nous aurons été a jamais rassasié. Rassasiés de Dieu, telle est notre espérance. Et nous vivons de celle-ci au cours de chacune de nos eucharisties, lorsque nous sommes à notre tour, rassasiés du corps et du sang du Christ. Amen

1er dimanche de Carême, année A

Auteur: Cochinaux Philippe
Temps liturgique: Temps du Carême
Année liturgique : A
Année: 2004-2005

Une véritable bombe. Quand vous passez à côté d'elle, le monde s'arrête et les gens la regardent. Vu sa forme éblouissante, elle peut, je crois, facilement susciter une certaine jalousie. Il est vrai que, même à mes yeux, elle est juste comme il faut et surtout comme je les aime. Et puis avec cette rondeur légèrement câline, elle doit en rendre des gens heureux. Vous comprenez alors mieux pourquoi je vous parle d'une véritable bombe. Elle est là dans sa vitrine, entièrement recouverte de cacao amer qui tapisse une croûte de pur chocolat enfermant une délicieuse mousse au chocolat le tout sur une base chocolatée. Quelle tentation. Quelle joie pour les yeux. Quel plaisir pour le palais. Merci mon Dieu pour une telle création. Mais vais-je y succomber ou bien être capable de résister par l'exercice de ma simple volonté ?

Au fait, est-il vraiment nécessaire de se priver, de ne pas entrer en tentation ? Pour être tout à fait honnête, j'adore les tentations et ce qui me rend le plus heureux, c'est lorsque « je craque » et que je me laisse aller à vivre intensément ce plaisir auquel je viens de succomber volontairement. « Ce n'est pas bien, quelle manque de volonté, ô triste faiblesse humaine qui n'arrive pas à résister », se diront peut-être quelques uns. Et dans certaines situations, ils ont sans doute raison car les textes de ce jour nous ramènent au c½ur de toutes ces tentations auxquelles nous sommes confrontés constamment. Les envisager comme un bloc monolithique à rejeter à tout prix nous conduira immanquablement à une certaine désespérance. En effet, sur notre petite terre, il y a des tentations, de très bonnes tentations offertes à notre liberté. Ces tentations sont positives. Elles nous font grandir ou grossir comme ma bombe au chocolat de tout à l'heure. Se laisser tenter n'est alors pas négatif en soi. Se laisser tenter, c'est parfois partir à la découverte de l'inconnu, de nouvelles choses. C'est également se donner du plaisir à soi-même et ne sommes-nous pas sur terre pour d'abord être heureux ? La tentation d'un livre qui me nourrira l'esprit, la tentation d'une rencontre d'amitié où se vivra le partage de nos vulnérabilités, la tentation d'un bon repas, la tentation d'un certain type d'études, la tentation de vivre sa foi en assemblée, et je pourrais continuer d'allonger la liste, sont de belles tentations. Certaines d'entre elles nous obligent parfois même à nous dépasser pour qu'elles se réalisent. Ces tentations-là ont dès lors toutes leurs raisons d'être. A leur manière, elles participent à la construction de l'être humain, elles réjouissent le c½ur de tout un chacun. Laissons-nous alors tenter par elles et succombons joyeusement car elles nous font avancer sur notre propre chemin d'humanité. Et cela se vit en toute liberté.

En effet, notre liberté se caractérise par notre capacité de choisir. S'il n'y a pas de choix, il n'y a pas de liberté et nous quittons le champ de l'éthique. C'est donc en toute liberté que nous pouvons exercer notre capacité de choix afin de vivre de toutes ces tentations qui nous permettrons de devenir plus nous-mêmes. En succombant de la sorte, nous participons pleinement à la réalisation de cette destinée, qui, contrairement au destin, ne s'impose pas à moi de manière arbitraire. Sur terre, si nous mettons nos pas dans les traces de Jésus Christ, Dieu attend de chacune et de chacun de nous d'accomplir notre destinée. Cette dernière n'est pas déjà inscrite au Ciel dans un grand livre dont saint Pierre tournerait jour après jour les pages. Non, notre destinée, c'est à nous, non seulement, de la trouver mais également d'en vivre.

Il est vrai que dans ce superbe projet divin de vie, il y a un ensemble d'obstacles qui pourront nous empêcher de devenir pleinement nous-mêmes. Il y a ces tentations qui vont à l'encontre même de notre liberté, voire de notre destinée. Nous avons alors à les combattre car elles nous empêchent de nous réaliser humainement, de nous réaliser divinement. Elles sont des entraves à ce chemin de bonheur tel qu'il m'est dicté en toute liberté par cette vérité personnelle vivant au plus profond de mon être. Ces tentations-là sont donc à rejeter à tout prix car elles nous font passer à côté de notre propre vie et à moyen ou long terme, nous risquons de souffrir et peut-être même d'entrer dans une certaine paralysie de vie, un peu à l'instar d'Adam et Eve qui ont refusé de devenir eux-mêmes dans l'espoir d'atteindre de manière simpliste le statut de Dieu. Se détourner de sa destinée, trébucher de la sorte sur notre chemin, nous conduit immanquablement à entrer dans une dynamique du désajustement. Je serai désajusté vis-à-vis de moi-même, désajusté vis-à-vis des autres et pire encore, désajusté vis-à-vis de Dieu.

En conséquence, en ce temps de Carême, ajustons nos vies en acceptant ces tentations qui participent à l'accomplissement de nos destinées en Dieu et rejetons avec force celles qui feraient de nous des désajustés car la foi, la vie pour soi, pour les autres et pour Dieu passe par l'ajustement de nos actes à cette destinée vécue en vérité au nom de la liberté inscrite à jamais par le Christ en chacune et chacun de nous. Amen.

1er dimanche de l'Avent, année A

Auteur: Materne Pierre-Yves
Temps liturgique: Avent
Année liturgique : A
Année: 2004-2005

Mt 24, 37-44

Il y a quelques années déjà, j'aimais regarder un film dont le titre était « Retour vers le futur ». C'était l'histoire d'un jeune homme qui voyageait dans le temps, ce qui lui donnait bien des surprises.

J'ai l'impression que les textes d'aujourd'hui nous propose un film semblable : « Retour vers l'avenir ». L'Evangile de ce jour nous invite en effet à nous tourner vers le futur. « Tenez-vous prêts pour quand le Fils de l'homme viendra ». Le Fils de l'homme est pour nous le Christ, cet être qui est d'origine divine et qui partage pleinement notre humanité. Pour l'auteur de l'Evangile, il doit arriver prochainement. Au début du christianisme, les chrétiens s'attendaient à un retour imminent du Christ. Or, c'est tout de même curieux de lire ces textes sur le futur en guise de préparation à Noël. La fête de la nativité porte en effet sur un événement déjà produit, à savoir la naissance du Christ parmi nous. C'est là un fait du passé.

Alors pourquoi l'Eglise nous propose-t-elle de nous préparer pour le futur ? C'est peut-être que la venue de Jésus n'est pas un fait isolé dans le passé. Cette venue est aussi liée à notre avenir.

Le mystère de l'Incarnation s'enracine dans une histoire très précise mais il rayonne à travers les siècles. Il signifie que Jésus est déjà né dans le monde, que Jésus est encore présent aujourd'hui et qu'il nous attend au plan de l'avenir. Au fond, si Jésus est un personnage du passé comme Jules César, il ne concerne que le passionné d'histoire. Si Jésus était un homme sorti du futur, cela passionnerait les amateurs de science fiction. Mais la Bonne Nouvelle reçue des apôtres, c'est que Jésus est vivant hier, aujourd'hui et demain.

Sa présence n'est pas un simple souvenir ou l'horizon d'un désir. Sa présence est actuelle parce que incarnée dans l'humanité que nous partageons. Ce que nous vivons n'est donc pas étranger à la Présence divine. En cette fin de mois de novembre, chacun peut ressentir le poids de la vie. Il est bien possible de se sentir plus fatigué, plus déprimé ou plus incertain quant aux priorités de sa vie. Voilà pourquoi le temps de l'Avent est un temps de la vigilance. « Sois attentif à ton futur » nous dit le Christ. Aujourd'hui, il est utile de revenir aux choses essentielles que nous voulons créer et développer. Une vie ouverte plutôt que recroquevillée. Un travail qui laisse de la place au repos et à l'amitié. Une vie familiale où se partage des valeurs durables. Une vie de foi qui se ressource au puit de Dieu. Chacun devrait être vigilant quant à ses besoins essentiels. Est-ce que je prends le temps de me poser, de prier, de parler de mes sentiments ? Des choses simples mais parfois négligées.

Cependant, il n'est guère possible de se préparer aux choses du futur que nous ignorons. « C'est à l'heure où vous n'y penserez pas que le Fils de l'homme viendra ». Il a tant de choses que nous ignorons sur notre avenir et sur l'avenir du monde. Ceci nous invite à la prudence, à la vigilance sans tomber toutefois dans l'immobilisme.

Notre Dieu est un Dieu du présent et de l'avenir qui a fait alliance avec l'humanité déjà dans le passé. C'est pourquoi, s'il est du passé, il n'est pas dépassé. Il est actuel et nous ouvre l'avenir. Le Royaume de Dieu est au milieu de nous mais il sera visible grâce à nous. La fête de Noël, plus que l'anniversaire de la venue du Christ, nous rappelle que Dieu est avec nous. Jésus est l'Emmanuel. C'est pour être avec nous que Jésus est né il y a deux milles ans. C'est pour être avec lui que nous vivrons ensemble ce temps de l'Avent. Ce n'est pas un retour vers le passé que nous pouvons vivre mais un retour vers le présent et l'avenir.

1er dimanche de l'Avent, année A

Auteur: Devillers Raphaël
Temps liturgique: Avent
Année liturgique : A
Année: 2004-2005

Vous tous, les fidèles, redécouvrez le don de l'Eucharistie

comme lumière et force

pour votre vie quotidienne dans le monde

Jean-Paul II ( Lettre pour l'Année de l'Eucharistie § 30 )

Non il n'y a pas erreur : c'est bien aujourd'hui que - en tant que chrétiens - nous commençons une Nouvelle Année.

Il est si fréquent d'entendre, même de la part des baptisés, critiquer l'Église jugée vieillotte, ringarde, dépassée....et voilà qu'elle prend les devants et dès ce dimanche elle nous entraîne dans un nouveau cycle liturgique ( Après S.Luc, notre guide sera S. Matthieu)

Pourquoi ce décalage ? Parce que le calendrier de la société ne mène nulle part. Commençant le 1er janvier et se clôturant le 31 décembre, l'année civile pourrait tout aussi bien débuter le 1er septembre, après les vacances d'été, et finir le 31 août. Si nous ne disposons que de ces repères arbitraires, l'histoire n'est jamais qu'une succession indéfinie des saisons, un perpétuel recommencement, une course à l'abîme.

Or autant il nous faut connaître le but de nos déplacements dans l'espace, autant -et même davantage- il est capital que l'on nous apprenne où le temps nous conduit afin que notre existence ait une signification. Le malaise de beaucoup de nos contemporains ne vient-il pas d'être dans un monde qui court de plus en plus vite, nous offre de meilleurs moyens de vivre confortablement ...mais sans qu'on nous donne des raisons de vivre ?

L'histoire à la rencontre du Christ

Aujourd'hui, 1er jour de l'année chrétienne, l'Église nous annonce Noël qui vient mais à travers ce souvenir de la première venue du Christ, elle nous révèle ce que nulle science ne peut dire : l'histoire a un sens, elle se dirige, à coup sûr, à la rencontre du Christ Seigneur qui reviendra comme il l'a promis.

Voilà pourquoi l'Évangile de ce dimanche nous fait écouter l'ultime enseignement de Jésus. A la veille de sa Passion, il prévient ses amis :

Jésus parlait à ses disciples de sa venue :.

L'Avènement du Fils de l'homme ressemblera à ce qui s'est passé à l'époque de Noé. Avant le déluge, on mangeait, on buvait, on se mariait, jusqu'au jour où Noé entra dans l'arche. Les gens ne se sont doutés de rien, jusqu'au déluge qui les a tous engloutis. Tel sera aussi l'avènement du Fils de l'homme. Deux hommes seront aux champs : l'un est pris , l'autre laissé. Deux femmes seront au moulin : l'une est prise, l'autre laissée.

Veillez donc car vous ne connaissez pas le jour où votre Seigneur viendra !

Cet enseignement ne vise pas à nous plonger dans l'anxiété ou la panique mais au contraire il nous éveille, nous met en garde contre les périls de l'aveuglement et du découragement. Oui l'univers finira sa course, le temps s'arrêtera (ce que les scientifiques affirment également) et ce sera soudain, imprévisible. Il ne surviendra pas seulement un cataclysme matériel, un anéantissement, mais un événement spirituel, humano-divin : le Christ glorieux opérera le jugement - ce qui signifie que l'essentiel est bien notre manière de vivre et que nous ne pouvons nous juger : laissons-en le soin au Seigneur, seul capable de discerner en vérité et en toute impartialité

L'HEURE DE L'ÉVEIL Si le temps n'est qu'un éternel retour, alors, dit le monde, "Achète, consomme, profite autant que tu peux, jouis du moment, cueille dès aujourd'hui...". Cette idéologie régnante exacerbe notre cupidité et notre envie, elle nous jette dans un espace de compétitivité où l'individu se retrouve tragiquement seul

Au seuil d'une année nouvelle, l'Église éclaire le chemin du bonheur et de la joie véritable en nous donnant l'espérance. C'est pourquoi Saint Paul nous exhorte à distinguer la clarté de l'aurore dans un sursaut dynamique :

C'est le moment : l'heure est venue de sortir de votre sommeil. Le salut est plus près de nous qu'à l'époque où nous sommes devenus croyants. Le jour est proche.

Rejetons les activités des ténèbres, revêtons-nous pour le combat de la lumière. Conduisons-nous honnêtement, sans beuveries ni débauches, sans dispute ni jalousie.

Revêtez le Seigneur Jésus Christ...

Paul nous parle bien d'"un combat", d'une lutte pénible, toujours à reprendre. Comment voudrions-nous guérir de nos lâchetés, surmonter nos découragements, résister à la contagion du mal si nous ne revenons pas régulièrement à la Source de notre Vie ?

UNE ANNÉE DE L'EUCHARISTIE

C'est pourquoi l'Église nous invite à nous réunir chaque dimanche pour recevoir la Lumière des Paroles du Seigneur et la Vie de son Pain partagé.

Ah ! quelle importance revêt cette Messe dont tant de baptisés se sont détachés - comme si l'on pouvait, par soi-même, fixer ses repères, construire sa fidélité !

Nous sommes appelés à célébrer une année de l'Eucharistie, de la messe dont le concile Vatican II disait qu'elle constitue "le sommet et la source" de la vie chrétienne. En effet tout le quotidien, avec nos efforts, nos joies et même nos chutes, s'y retrouve pour y être pardonné et assumé par le Christ. Et à partir d'elle, nous pouvons repartir vers nos humbles tâches et vers les hommes, éclairés par une nouvelle lumière et forts de l'énergie de l'Esprit.

Sommes-nous heureux d'être rassemblés dans l'Esprit pour devenir le peuple de Fils à la Gloire du Père ? Sommes-nous d'accord de participer à l'effort commun afin de revivifier cette fête de la foi ? Comprenons-nous le caractère indispensable de cette halte hebdomadaire, même si la célébration n'est pas toujours à la hauteur de sa grandeur ?

BONS V¼UX POUR CETTE NOUVELLE ANNÉE à toutes et à tous. Entrons dans cette nouvelle étape avec le désir de mieux vivre le Repas du Seigneur.

 

20e dimanche ordinaire, année A

Auteur: Collin Dominique
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : A
Année: 2004-2005

Ce passage de l'évangile m'a toujours embêté ! Il ne colle pas suffisamment à l'image de Jésus que nous gardons spontanément dans notre esprit : une personne tellement habitée par l'Esprit de Dieu qu'elle se laisse toucher par toutes les misères et les détresses humaines, venant au secours de tous les malades dont les évangiles sont peuplés.

Mais dans le récit que nous venons d'entendre, Jésus est dur, cassant, comme indifférent aux cris de détresse de la Cananéenne. « Aie pitié de moi, Seigneur, fils de David ! Ma fille est tourmentée par un démon. » Mais Jésus ne répond rien. Même aux disciples qui commencent à se dire que cette femme en fait un peu trop et que Jésus devrait au moins la contenter pour en être débarrassée, Jésus ne répond que par une sentence qui semble sans arrêt : « Je n'ai été envoyé qu'aux brebis perdues d'Israël ». Jésus met un terme aux interpellations de la femme et de ses disciples. Il ne veut rien faire pour cette femme. Pourquoi cette attitude chez Jésus ? Fait-il semblant d'être dur et indifférent pour mieux susciter la foi chez la Cananéenne ? Je ne le pense pas. A cause de la loi de l'Incarnation. Dieu n'a pas fait semblant d'être un homme, il l'est devenu totalement, comme chacun d'entre nous. Et Jésus, ce Dieu fait homme, a connu, lui aussi, et tout aussi réellement que nous, le poids des préjugés, des exclusions culturelles, nationales ou religieuses. Le sentiment que Jésus a de sa mission l'enferme jusqu'ici dans les limites du monde juif. C'est pour les brebis d'Israël qu'il est venu et il n'entend pas y déroger.

Mais Dieu qui avait déjà dit par la bouche du prophète Isaïe : « Les étrangers qui se sont attachés au service du Seigneur, je les conduirai à ma montagne sainte, je les rendrai heureux dans ma maison de prière ». Jésus l'avait lu comme il connaissait parfaitement les Ecritures. Mais il n'avait pas encore compris que cette Parole lui était aussi adressée afin qu'il se tourne également vers les païens. Dieu a donc été obligé de le lui rappeler par la bouche, non plus d'un prophète, mais d'une étrangère, d'une païenne, d'une femme. Une femme a converti Jésus !!! En utilisant la comparaison de Jésus entre les païens et les petits chiens, la Cananéenne force Jésus à reconnaître l'étendue de sa foi : « Femme, lui dit-il, ta foi est grande, que tout se fasse pour toi comme tu le veux ! »

Jésus reconnaît - enfin - que la foi dépasse les frontières nationales ou même religieuses. Car on ne dit pas que cette femme est devenue juive, mais que simplement elle a cru que cet homme Jésus était capable de sauver ce qu'elle a de plus cher en cette vie, sa propre fille. Si nous voulons prendre cette page d'évangile au sérieux dans notre réflexion et dans notre vie, nous sommes invités à reconnaître que Jésus lui-même a dû se convertir, changer de mentalité, de préjugé. Il a dû se laisser interpeller, déstabiliser par une femme. Pour lui, comme pour nous, Dieu ne parle jamais aussi bien qu'au travers d'un cri ou d'une interpellation que nous adresse un autre humain, qu'il soit proche ou non, comme cette étrangère. Dieu nous parle sans cesse dans les Ecritures, mais comme Jésus, parfois, nous ne pouvons entendre que la parole d'une autre personne, surtout quand elle appelle à l'aide. Dans ce cri, c'est la parole même de Dieu qui nous invite à sortir de notre dureté de c½ur, de notre indifférence, mais aussi des préjugés du « qu'en dira-t-on ». Si Jésus a été converti de force par une femme, c'est d'autant plus pour chacun de nous. Chaque jour, quelqu'un nous invite, de gré ou de force, à nous convertir. Chaque jour, quelqu'un de connu ou d'inconnu nous presse de sortir de la prison de notre c½ur ou de notre esprit. Car il y a une attitude, qui est probablement le pire péché, qui consiste, au nom de la Parole de Dieu, à s'enfermer dans l'orgueil et dans l'égoïsme. Combien de nous n'utilisons-nous pas Dieu pour enfermer les autres dans des catégories, pour les exclure, voire même pour les détruire.

Aujourd'hui, Dieu nous donne l'exemple de son propre Fils. Voyez Jésus. J'ai dû lui envoyer une pauvre femme païenne pour lui ouvrir le c½ur, pour le dilater aux dimensions de mon amour, où il n'y a ni limite ni exclusion. Ouvrons donc les yeux et les oreilles, Dieu se tient encore parmi nous sous les traits d'un Cananéen ou d'une Cananéenne !

22e dimanche ordinaire, année A

Auteur: Eggensperger Thomas
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : A
Année: 2004-2005

Chers s½urs et frères,

Je crains que dans ma vie j'aie plus souvent reproché ma situation à Dieu que je l'en aie remercié ! C'est dans mon caractère spirituel que j'accepte très vite les événements positifs dans ma vie et son ambiance comme fait accompli sans réfléchir à une relation avec la grâce de Dieu en moi. Mais je dénonce très vite le Dieu absent quand il y a des incidents dans ma biographie. Je sais qu'une manière différente doit être préférée mais j'ai plus tendance à la critique de Dieu sur une chose problématique qu'au remerciement pour une chose agréable...

Nous avons entendu les lignes de la lettre aux Romains : C'est l'apôtre qui nous demande de ne pas nous conformer aux habitudes de ce monde. La raison de cette demande n'est pas les réserves contre la société mais surtout une alternative dans la manière de réagir. L'auteur de la lettre recommande un changement de l'attitude fondamentale vis-à-vis du monde :

Il dit : « ...laissez Dieu vous transformer et vous donner une intelligence nouvelle. Vous pourrez alors discerner ce que Dieu veut : ce qui est bien, ce qui lui est agréable et ce qui est parfait. »

On voit que la lettre à la communauté chrétienne n'accepte pas une passivité spirituelle mais invite à une réaction active comme réponse à la réalité de la vie commune et de la vie religieuse. Le christianisme de Saint Paul n'est pas un mouvement discret mais un groupe qui observe bien les réalités et qui réagit.

L'option de saint Paul vient de la tradition de Jésus. Nous avons bien entendu la réaction de Jésus : Un de ces disciples, Pierre, est choqué de la décision de Jésus d'aller à Jérusalem. Tous savent bien que le chemin à Jérusalem sera une catastrophe pour Jésus, il sera le chemin de la mort sûre.

« Non, cela ne t'arrivera pas », dit Pierre. Pierre lui fait des reproches. Jésus est furieux. Il n'accepte pas les craintes de Pierre et il refuse lui-même ses reproches et sa proposition de ne pas aller à Jérusalem.

Premièrement on est surpris de la réaction tellement négative de Jésus. L'attitude de Pierre paraît très honnête pour défendre la vie de Jésus.

Une vue un peu approfondie dans le texte explique la réaction de Jésus : Sa critique de Pierre se trouve dans le texte d'évangile :

« Va t'en loin de moi ... ! Tu es un obstacle sur ma route car tu ne penses pas comme Dieu, mais comme les êtres humains. »

Cette péricope parle de Pierre comme un exemple d'un être humain. C'est la faiblesse des hommes et la méfiance des gens qui sont thématisés dans le texte : Ce qui manque c'est la souveraineté d'accepter la réalité, la confiance avec laquelle l'homme est invité à agir sans oublier le contexte de la force de Dieu.

Non seulement la lettre aux Romains mais aussi l'évangile de Matthieu renvoie à la charge de la présence dans le monde actuel et réel : C'est la suite qui est notre tache ! Jésus ne parle pas d'autre chose que de la suite avec son postulat de l'abnégation :

« Si quelqu'un veut venir avec moi, qu'il cesse de penser à lui-même, qu'il porte sa croix et me suive. » (24)

On est étonné de la radicalité de Jésus dans ce contexte : cela semble comme une sorte de destruction de soi, un refus de soi-même. C'est une interprétation très dure, très forte. Mais je ne pense pas que c'est l'intention du message de ce texte :

Il est évident que l'évangile parle de la suite des chrétiens. Dans la tradition de l'histoire de l'église il y avait des interprétations différentes et des manières distinctes comment suivre Jésus. Il y avait et il y a toujours des mouvements plus radicaux que d'autres concernant l'abnégation. À la fin on constate des vocations différentes entre les chrétiens sur la manière de vivre comme fidèles. Les uns sont très rigides, les autres restent plus libéraux et plus détendus.

Il n'est pas important de décider qu'elle sorte de vie chrétienne est la vraie vie, la manière la plus authentique. Je ne pense pas que Jésus avait l'intention de nous imposer la meilleure façon de vivre en chrétiens.

C'est surtout la décision personnelle de vivre comme chrétien, vivre dans une société avec une perspective accueillante pour les marginaux et les pauvres, parler de Dieu et de son message de la résurrection avec un style qui exprime la joie et le bonheur d'être fidèle et moins l'expression d'une tristesse permanente à la recherche du renoncement absolu.

Amen !

Source :

Ulrich Luz, Das Evangelium nach Matthäus (Mt 8-17) (EKK I/2), Solothurn/Neukirchen 21996, 484-495.

22e dimanche ordinaire, année A

Auteur: Cochinaux Philippe
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : A
Année: 2004-2005
28 août 2005
  22ème dimanche ordinaire (Année A) : un trésor à dilapider
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Mt 16, 21-27

Mozart écrivit un jour à son père les mots suivants : « nous n'avons pas besoin d'épouser une femme riche pour le devenir nous-mêmes car cette richesse-là, elle est éphémère. Elle reste sur terre. Nous ne l'emportons pas avec nous. Quant à nous, père, notre richesse, elle est dans notre tête ». La richesse dont parle Mozart est éternelle et aujourd'hui encore nous pouvons nous réjouir de pouvoir entendre ses ½uvres jouées un peu partout dans le monde.

Si la richesse de cet enfant prodige de Salzbourg se situait au niveau de la tête, notre richesse, dans la foi, se situe au niveau de notre c½ur. Dieu le Père, par son Fils et dans l'Esprit, a choisi d'élire sa résidence en cet endroit précis. Le c½ur, lieu de nos sentiments, de nos émotions est devenu par excellence l'habitation de Dieu sur notre terre. Il vit en chacune et chacun de nous. Nous sommes sa propre résidence. Et lorsque Dieu a choisi d'emménager en nous, il n'est pas venu les mains vides. Il avait apporté ses propres caisses et cartons. Ils contiennent une bonne dose de tendresse, des regards d'amour, des gestes tout en douceur, des mains tendues à la fragilité, des paroles où les mots ne riment qu'avec l'amitié divine. En chacune et chacun de nous, par le biais de l'Incarnation, Dieu a déposé un énorme trésor. Non pas un trésor humain, c'est-à-dire un trésor à amasser puis à cacher, tellement nous aurions peur de nous le faire voler. La logique de Dieu va bien au-delà de la nôtre.

Le trésor divin de la foi ne s'accroît qu'en se donnant. Plus nous le dilapiderons, plus il deviendra important. Voilà ce à quoi, toutes et tous nous sommes appelés. Donner ce que nous avons reçu. La foi ne se contente pas de se laisser enfermer en nous pour devenir une manne secrète dont nous seuls aurions accès. Non, la foi est un trésor reçu. Il sommeille en chacune et chacun de nous et n'attend qu'une seule chose : que nous le réveillions. Ce trésor brille de sa lumière éclatante chaque fois qu'il s'offre aux autres et au Tout-Autre. Tel est le sens du salut dont le Christ nous parle dans l'évangile. Ce salut ne se réalisera que si nous acceptons de vivre notre vie pleinement, passionnément, intensément puisque le Christ est venu pour que nous la vivions en abondance, souligne l'évangile de Jean. Donc, une vie passionnante, une vie trépidante, une vie où chaque seconde est toujours bien dépensée puisque le temps passé est dépassé à jamais. Toutes et tous, en Dieu, nous sommes conviés à vivre ce type de vie. Tel est le sens premier du salut même si nous l'avons parfois un peu oublié.

Une vie passionnante ou trépidante, ne signifie pas une vie vécue dans la grandeur, dans l'extraordinaire. Non, la vie que le Christ nous propose de vivre, est une vie où nous profitons de chaque seconde donnée pour dilapider ce trésor intarissable qui se trouve au plus profond de nous-mêmes. Vivre la vie avec le regard de Dieu, vivre sa vie avec les yeux de Dieu. Et voilà que celle-ci devient autre. Je ne vis pas que pour moi. Je ne me réalise que dans toutes ces relations qui me façonnent et m'entourent. Je prends conscience à quel point j'ai besoin des autres et que eux, ils ont besoin de moi puisque je suis également une parcelle de divinité sur cette terre. Par mes actes, mes gestes, mes paroles, mes regards, inspirés par l'Esprit Saint, je permets à Dieu d'½uvrer en notre monde. Nous sommes non seulement images de Dieu mais mains de Dieu, yeux de Dieu sur terre. Dieu passe par chacune et chacun de nous pour être à l'½uvre en notre monde. Dieu a besoin de nous. Le Salut de sa création passe dès lors également par nous. Nous ne pouvons nous sauver qu'en dépensant, dilapidant ce que nous avons reçu. Plus nous dépenserons, plus nous recevrons à dépenser. C'est une histoire sans fin et c'est normal puisqu'il s'agit de l'éternité, notre éternité. Celle qui a commencé par l'événement de la Croix, de la mort et de la résurrection du Fils. En ce sens, perdre sa vie, c'est la gagner.

La logique divine est tellement éloignée de la nôtre. C'est en dépensant le trésor reçu que je gagnerai ma vie, que je la sauverai. C'est en dépensant le trésor reçu que je permettrai à d'autres de gagner leur vie, de la sauver. S'il en est ainsi, redescendons au plus profond de nous, partons à la recherche de cette croix intérieure plantée là où se noue en nous notre humanité et notre divinité. La croix du Christ est une croix glorieuse, une croix de résurrection, une croix de salut. Elle nous conduit à l'espérance, à la promesse d'un bonheur sans fin auprès de Dieu. Et pour ce faire, c'est tout simple. Il suffit de dépenser ce trésor de la foi en nous. Ne perdons plus de temps. Chaque seconde participe à notre salut. Offrons, partageons, vivons. Tel semble être le désir de Dieu pour son humanité. Il veut notre bonheur. Un bonheur qui s'enracine et se réalise en Lui par tous les actes et les paroles de tendresse que nous nous offrons les uns aux autres. Amen.

23e dimanche ordinaire, année A

Auteur: Cochinaux Philippe
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : A
Année: 2004-2005

Je suppose que vous aussi vous avez appris la nouvelle concernant Madame Duschmol qui habite avenue des Eburons dans la localité. Jamais je n'aurais cru qu'elle aurait pu faire une chose pareille. J'en suis encore retourné non seulement de ce qui s'est passé mais je me dis, en plus, à son âge, comment a-t-elle osé ? Et pourtant quand on la connaît, elle était tellement avenante, attentionnée. Elle avait vraiment tout pour elle et elle a choisi de la gâcher en si peu de temps. Mais comment est-ce possible d'en arriver là et si vite. Je vous le demande. Pauvre Madame Duschmol. Il paraîtrait que certains ont essayé de la raisonner. Rien n'y fait. Elle n'écoute plus. Elle se laisse guider par ses nouvelles intuitions, dit-elle. Pour ma part, je n'en crois rien. Je ne lui ai encore rien dit. Il est vrai que je ne la connais pas très bien personnellement même si on se voit tous les dimanches. Oh, je pourrais encore vous en dire des choses sur elle. Vous tomberiez par terre, j'en suis sûr. J'ai de quoi vous en parler pendant toute une homélie, voire une conférence entière. C'est vous dire que ce qu'elle a fait est vraiment sérieux. Mais agir de la sorte, irait tellement à l'encontre de l'évangile de ce jour.

Madame Duschmol, personnage qui ne vit que dans ma tête, ou toute autre personne que nous connaissons peuvent faire partie de cette catégorie de gens que nous sentons parfois partir à la dérive. Trop souvent hélas, nous en parlons entre nous. Est-ce l'effet de commérage, un besoin de se dire que puisque nous ne vivons pas cela, nous sommes mieux qu'eux, une nécessité de donner un peu de piment dans la vie par le malheur des autres ? Je n'en sais rien. Une fois encore l'évangile nous invite à ne pas parler des autres. C'est tellement facile et peut-être même un peu lâche mais plutôt d'aller parler aux autres. Choisir de les rencontrer, de les affronter dans leurs propres contradictions, les convier uniquement par nos questions à ce qu'ils puissent retrouver leur route, c'est-à-dire celle qui conduit à la Vérité. Cette dernière, pour nous, croyantes et croyants, s'inscrit dans les traces du Christ. Il est vrai qu'il n'est pas toujours évident de partir à la rencontre de l'autre, surtout quand ce dernier ne veut plus écouter, tellement il est enfermé dans sa logique même si elle est parfois mortifère. Nous nous sentons esseulés. Nous sommes sur la berge et nous le voyons partir à la dérive. Lui, il est aveuglé par ce qu'il vit et il ne voit pas la chute vers laquelle il se dirige. Il est dans sa barque, sur son nuage, persuadé que rien ne peut lui arriver. Et nous sommes là, le regardant, tentant de lui lancer une corde puis une autre, espérant qu'il la saisira, qu'il se laissera guider non pas pour le conduire là où nous voulons qu'il aille mais pour lui permettre de ne pas se perdre et de prendre le temps de retrouver son chemin. Une telle mission n'est pas aisée et nous nous sentons trop souvent impuissants face à une telle situation.

Dans la foi, le Christ nous invite à ne pas abandonner une telle personne au destin surtout lorsque celle-ci quitte le chemin de sa destinée. Frappons encore et toujours à la porte de son âme, espérant qu'un jour peut-être, il ou elle l'ouvrira à nouveau. Et parfois, nous en ferons l'expérience alors que d'autres fois nous serons envahis par un sentiment de solitude face à cette personne qui s'en va à la dérive, sa dérive. Nous ne pouvons plus rien, si ce n'est la poser dans le c½ur de Dieu par notre prière. Garder vis-à-vis de cette personne une attitude non de condamnation mais de compassion. Surtout ne pas juger car peut-être après le passage du tourbillon, elle poursuivra sa route autrement mais en ayant retrouvé le sentier de sa destinée. Avec Dieu, rien n'est jamais perdu. Il y a toujours une occasion de se relever et de remarcher sur le chemin de sa vie. Même si cette personne reste sourde à nos appels, l'évangile nous demande de ne pas la rejeter, de l'exclure mais de la considérer comme un païen et un publicain. Un païen, c'est-à-dire un être humain qui ne croit plus qu'en lui-même et qui peut être aveuglé par sa propre quête immédiate, un publicain, c'est-à-dire un être qui se reconnaît comme fragile et qui accepte qu'il n'est pas capable de tout vivre à la lumière des espérances de Dieu pour son humanité. Un païen et un publicain, c'est-à-dire un homme ou une femme, comme vous et moi, qui trébuche et qui un jour aura aussi besoin de nos mains pour que nous l'aidions à le relever. Ne perdons jamais espoir. Dieu est au c½ur de notre humanité. Amen.

24e dimanche ordinaire, année A

Auteur: Materne Pierre-Yves
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : A
Année: 2004-2005

"Pardonnes-nous nos offenses comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensés". Vous reconnaissez une des phrases de la prière du Notre Père. C'est bien une prière que nous faisons très souvent. Par là, nous demandons à Dieu de nos pardonner « comme nous aussi nous pardonnons ». Sans cesse, Jésus répète que nous devons pardonner sans limite. « Non pas jusqu'à sept fois mais jusqu'à septante fois sept fois » (490 !). C'est énorme. Faut-il conclure que Dieu nous pardonne si nous pardonnons près de 500 fois ? N'est-ce pas une contrepartie un peu lourde ? Faut-il comprendre que Dieu nous pardonne peu si nous pardonnons peu aux autres ? Voici des questions bien complexes.

Dans la foi, nous affirmons que Dieu est un être de miséricorde et de pardon. Par sa vie, Jésus nous a fait découvrir l'amour gratuit de Dieu. Par conséquent, Dieu aime gratuitement et pardonne aussi gratuitement. Si Dieu est pur amour et pur pardon, il me semble contradictoire de dire qu'il va doser son pardon en fonction de nos démarches personnelles de pardon. Je pense que Dieu est pardon, qu'il nous pardonne tout gratuitement, et que nous sommes invités à prolonger le pardon de Dieu par des actes de pardon. La difficulté, n'est pas d'atteindre un certain quota (490, par exemple) mais d'avoir expérimenté le pardon qui vient de Dieu. Si Jésus peut être si exigeant avec ses disciples, c'est parce que ceux-ci font l'expérience du pardon divin à travers lui. Jésus leur fait vivre une foi en un Dieu qui ne condamne pas mais qui pardonne. « Père pardonne-leur car ils ne savent pas ce qu'ils font » dira Jésus peu avant de mourir sur la croix. Celui qui a fait l'expérience que Dieu est un être atteint par la « pardon-manie », ne peut pas refuser de pardonner à son tour. Le problème, c'est que cette expérience ne va pas de soi. Le serviteur de l'évangile a bénéficié du pardon de son maître mais il est resté au niveau purement économique. La preuve, c'est qu'il n'a rien compris et qu'il n'a pas été miséricordieux avec son propre débiteur. Le serviteur a demandé le pardon comme une remise de dette. Il n'a pas compris que le pardon est autre chose qu'une remise de dette. Nous pouvons avoir une difficulté avec le texte. En effet, le maître nous est présenté comme un patron, un propriétaire. Or, il serait dommageable de transposer l'image en disant que Dieu est un patron pour nous. Les histoires de l'Evangile doivent toujours être replacées dans leur contexte et relue avec prudence. Surtout que ici on est à deux doigts de présenter Dieu comme un bourreau pour celui qui ne pardonne pas. Donc prudence !

Si Dieu pardonne sans restriction, cela ne veut pas dire que son pardon se concrétise dans notre vie. En effet, quelqu'un peut offrir son pardon, ce n'est pas pour autant que nous allons l'accepter et en être transformé. Dieu donne mais l'homme, de par sa liberté, décide d'accueillir. D'une certaine manière, Dieu propose et l'être humain dispose. Chaque dimanche, nous prions au début de la messe pour recevoir le pardon de Dieu. Cela signifie que nous reconnaissons avoir besoin de la force de son pardon pour être capable de pardonner aux autres. C'est parce que le pardon est difficile que nous demandons l'aide de Dieu. D'un autre côté, nous décidons de pardonner aux autres pour leur faire découvrir un « Dieu plein de miséricorde et de tendresse », comme disent les psaumes. En devenant des êtres de miséricorde et de tendresse, ce qui ne veut pas dire des « petits gentils », nous faisons vivre Dieu dans le monde des humains. Dieu rayonne à travers les femmes et les hommes qui offrent le pardon au lieu de choisir la violence. Jésus reste le témoin indépassable de cette vérité.

Nous-mêmes, soyons patients et demandons dans la prière que Dieu nous fasse vivre de cette pardon-mania qui le caractérise. Tout cela est difficile et demande de la patience. Amen