5e dimanche ordinaire, année A

Auteur: Cochinaux Philippe
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : A
Année: 2004-2005

Absence totale de culture ou bêtise humaine profonde ? Peut-être même les deux. Nous pouvons en tout cas nous le demander quand nous constatons qu'ils dénomment le fleuron de la gastronomie belge : des french fries. Comment les américains osent-ils nous retirer ce qui devraient s'appeler des Belgian fries et ils n'ont pas d'excuse puisqu'ils parlent bien des Belgian chocolates ou encore des Belgian wafels. Mon sang ne fait qu'un tour lorsque je les entends prononcer, avec leur voix nasillarde, ces mots de 'french fries'. Toutefois, je ne devrais m'énerver car il semblerait que french fries ne signifient nullement des frites françaises. L'expression viendrait d'un vieux verbe anglais « to french » qui signifierait couper en bâtonnets. Ce ne sont donc plus des frites françaises mais des bâtonnets fris en traduction correcte. Notre honneur et notre « belgitude » sont donc sauvés grâce à cette précision. Quoiqu'il en soit qu'elles soient nommées de la sorte ou non, on dira ce qu'on veut, sans sel, c'est vraiment pas bon. Et dans les aliments, c'est comme dans la vie, quand il en manque, cela se sent, cela se goûte. Du sel sur ses frites, il n'en faut pas beaucoup. Juste assez pour l'assaisonnement. A raison alors, Jésus nous dit : « vous êtes le sel de la terre ». Il n'a pas dit : « vous êtes les frites de la terre » car il sait que là c'est plutôt la quantité et non la qualité qui importe. Or l'important n'est pas le nombre mais la manière dont nous nous investissons.

Nous sommes donc, d'après le Fils de Dieu, le sel de la terre. Etonnante analogie. C'est peut-être l'indication d'une direction à suivre, d'une tâche à accomplir, voire d'une responsabilité à vivre. En étant le sel de la terre, nous prenons conscience qu'avec nos moyens, aussi fragiles soient-ils, nous pouvons faire de grandes choses. Le sel ne se suffit pas à lui-même, il peut remplir différentes fonctions. En fait, il accompagne toujours. Il en est également pour tout être humain, pour tout croyant. Si notre foi en Dieu est vraie, si elle donne sens à nos existences, si elle donne du goût à notre vie alors nous ne pouvons plus la garder pour nous. Une foi cachée, par définition, se meurt.

Aujourd'hui, le Christ insiste : vous êtes le sel de la terre ou en d'autres mots : vous êtes le Ciel de la terre c'est-à-dire que Dieu fait de chacune et chacun de nous des messagers de sa Parole. Nous sommes ses représentants sur cette terre, c'est pourquoi nous pouvons nous reconnaître comme étant ce Ciel de la terre. Sans nous, Dieu ne peut plus se transmettre, se faire connaître. Il a besoin de nous. Baptisés dans l'Esprit Saint, nous avons ce bonheur et cette joie d'offrir à celles et ceux que nous croisons ce qui nous fait vivre au plus profond. Cela ne peut pas se faire de n'importe quelle manière. Nous ne sommes pas là pour transmettre un savoir, une connaissance livresque. Notre mission divine est de partager cette saveur de la foi. Nous l'apprécions tellement, que nous souhaitons que d'autres puissent également la découvrir et surtout en vivre. Croire en Dieu, n'est pas de l'ordre de l'obligation. Non, croire en Dieu est la conséquence d'un choix heureux. Il nous comble de sa présence mystérieuse. Par l'expérience propre de notre foi, nous avons pris conscience que Dieu appelait chacune et chacun de nous à la vie, à l'abondance de la vie. Il nous convoque à vivre pleinement chaque instant offert. Et cela se fait dans la contagion.

Mais sommes-nous vraiment des contagieux de Dieu ? Sommes-nous réellement cette lumière du monde ? Eclairons-nous dans la douceur de nos vies celles et ceux de qui nous nous faisons proches ? Nos actes, nos paroles et nos gestes illuminent-ils nos existences d'une telle beauté que cette lumière arrive à se propager de manière naturelle autour de nous ? Peut-être pas tous les jours lorsque nous sommes pris dans le tourment du temps, mais telle est pourtant notre vocation. Aujourd'hui encore, le Christ nous fait une déclaration d'amour en nous rappelant ces mots : « vous êtes le sel de la terre, vous êtes la lumière du monde ». Telle est notre tâche, telle est notre mission. Donner du goût à la vie, rayonner de cette joie intérieure qui nous façonne. Et lorsque nous y parvenons, nous pouvons alors nous redire : oui vraiment, nous sommes le ciel de la terre. Amen.

5e dimanche ordinaire, année A

Auteur: Devillers Raphaël
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : A
Année: 2004-2005

Sur l'étagère, à côté de la série des petits récipients d'aromates, un gros pot étiqueté : SEL. Banal parce partout.. . . Mais plus qu'utile : indispensable.

Dans ce pot, des petits cristaux durs, tranquilles à l'abri du verre, à l'aise les uns avec les autres puisque tous semblables.

Soudain la tempête : maman a saisi la salière, elle la retourne, la secoue avec vigueur. A l'intérieur, c'est la panique, tout est sens dessus-dessous ; inexorablement emportés, les grains filent à travers les petits orifices du couvercle et chutent dans la pâte que maman pétrit et au sein de laquelle ils disparaissent.

Mystère du sel : il est ce par quoi les produits deviennent comestibles, ce qui fera de la pâte un pain délectable. Du sel dépend la vie.

J'imagine le petit garçon Jésus regardant sa maman en train de préparer la galette de pain dans la petite maison de Nazareth. Et lorsqu'il croquait le coin du pain tout chaud qu'elle lui tendait, ses yeux pétillaient de joie : " Que c'est bon, maman". Bien plus tard, il se souviendra de cette scène. Et il déclarera au petit peuple de Galilée :

" Vous êtes le sel de la terre ..."

Voyez : avec moi, le Règne de Dieu s'est approché. Oui, vous pouvez laisser Dieu régner sur vos vies...si vous vous convertissez. Comme la salière, laissez-vous retourner complètement et acceptez les secousses car mon Evangile est bouleversant.

Vous êtes...

Qui sont ces "vous" ? Non les apôtres, les prêtres, les spécialistes. Mais ceux que Jésus vient d'énumérer, juste avant, dans la liste des huit béatitudes : les pauvres de c½ur et les doux, les affamés de Dieu et les purs, les artisans de paix et les persécutés. Le Royaume leur est ouvert. " Vous êtes" : au présent, donc ici, tout de suite. Et pas au premier chef par vos ½uvres, vos théologies, vos constructions. Mais par vos personnes béatifiées par ma Parole.

...le sel ...

C'est le monde à l'envers puisque d'autres tentent de vous convaincre que le bonheur réside dans l'accumulation des biens, le confort, les voyages, la force, l'affirmation de soi. Et vous vous laissez prendre à la publicité mensongère de ces malins qui veulent donner "du piment à la vie", comme ils disent ! S'ils disaient vrai, le suicide ne serait pas la première cause de mortalité des jeunes Occidentaux de 20 ans ! Ils ont tout, mais ils ne savent guère qui ils sont ni où ils vont.... Personne ne leur a révélé le sens de leur vie

C'est pourquoi, mes disciples, ne demeurez pas au chaud dans votre bocal étiqueté "catholique" où vous vous sentez bien parce que les autres partagent vos croyances et vos opinions.. Pourquoi n'avez-vous de cesse de créer des institutions pour vous tenir à l'abri ? Vous prétendez protéger vos jeunes plants : les fleurs de serre s'étiolent, emportées par le grand vent de l'histoire. C'est en s'exposant que l'Evangile prend racine. Après tout Jésus a eu beaucoup de "mauvaises fréquentations" ! C'est bien pour rencontrer ces personnes qu'il est venu ! Votre foi est-elle à ce point vulnérable, fragile que vous cherchez à tout prix à la mettre à l'abri des orages ? Ne savez-vous pas que "celui qui veut gagner sa vie la perdra...Et que celui qui perdra sa vie à cause du Christ la sauvera " ?..

... de la terre ...

A travers tous les continents, dans tous les peuples, et jusqu'à la fin des temps, vous donnerez sens au monde. Vous êtes l'univers-sel. ( sens du mot "catholique") Alors pourquoi craindre d'être minoritaire ? Pourquoi ce désir d'une "Belgique catholique", d'une "France fille aînée de l'Eglise", d'une Europe chrétienne" ? Jésus a-t-il jamais visé à convertir une ville, une région, un pays ??? Quelques grains de sel suffisent bien - trop provoque de l'hypertension

Si le sel se dénature, comment redeviendra-t-il du sel ? il n'est plus bon à rien : on le jette dehors et les gens le piétinent.

On s'attendrait à ce que Jésus nous mette en garde contre ceux qui s'opposent à l'Evangile et veulent contrecarrer son action. Au contraire il prévient ses disciples que le danger est en eux. Pour le chrétien, le pire n'est pas la menace extérieure, même mortelle, mais l'affadissement. On veut redevenir "comme les autres".On croit mieux faire en devenant du sucre, de la guimauve, du miel. Ec½urant....

A la communauté de Laodicée, le Christ Seigneur ose dire :" Je sais tes ½uvres : tu n'es ni froid ni bouillant. Que n'es-tu froid ou bouillant ! Mais parce tu es tiède, je vais te vomir de ma bouche" ( Apoc. 3, 15)

Dans les années 30, devant la terrible menace de la Bête qui grandissait à l'horizon de l'Europe, les Eglises n'ont pas fauté par pénurie d'effectifs, de maisons, de cérémonies, de piété... mais par manque de courage, par oubli de ce qu'elles étaient.

Le jeune François d'Assise renonçant à la richesse paternelle, le petit Damien débarquant seul parmi les lépreux de Molokaï, Mme la professeur Emmanuel rejoignant les chiffonniers du Caire. Mais aussi tant et tant, jeunes et vieux, luttant, seuls, au jour le jour dans le milieu des affaires, des sciences ou de l'enseignement. Chacun(e) est un grain de sel perdu dans l'immensité. Ils ne brandissent pas des programmes mirobolants, ne claironnent pas une future révolution. Mais près d'eux, la vie prend goût.

Comme un bon pain dans lequel on mord à pleines dents.

6e dimanche de Pâques, année A

Auteur: Cochinaux Philippe
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : A
Année: 2004-2005

Jn 14, 15-21

Depuis quelques semaines déjà, elle avait tellement besoin de lui dire la vérité. Ne pouvant plus la lui cacher, une après-midi, de désespoir, elle lui avoua ce qui s'était passé. Dans les larmes. Tout simplement. Ses mots avaient complètement anéanti celui qui l'écoutait. Il ne s'attendait pas à cela. Il n'avait jamais cru que l'être qu'il aimait depuis si longtemps avait pu lui faire une chose pareille. Les yeux emplis de larmes également, il lui écrivit ces quelques mots : « Grâce à toi, j'avais découvert que moi aussi je pouvais aimer et être aimé pour qui j'étais, sans être jugé. Je pleure aujourd'hui de tout ce que j'ai perdu. Je pleure d'avoir été trahi de la sorte par l'être que j'ai le plus aimé dans ma vie. Jamais un instant j'aurais pu imaginer que ce serait toi l'auteur de ma destruction. Mon amour, ma vie, tu m'as assassiné en me trahissant de la sorte. Il y a en moi une ouverture béante, un gouffre de souffrances. Je suis actuellement assis sur les ruines de ma vie. J'ai tout perdu : la confiance, la foi en l'amour. Je suis par terre, écrasé par la douleur. Je n'ai rien vu venir alors que je te faisais une confiance totale. Et je me dis, redis : « pas toi, mon amour, ma vie, pas toi ». Pourquoi m'as-tu brisé de la sorte ? Je t'avais tout donné. Et toi, tu m'as menti, tu m'as trahi. Tu m'as assassiné. Etait-il nécessaire de voler mon âme pour la détruire ? Si tu savais combien je souffre. Dieu sait comme je t'ai aimé et je t'aime. Je ne comprends pas. Je ne crois pas que tu aurais pu me faire plus mal que ce qui vient de se passer. Il est venu pour moi le temps de fermer le livre de la Vie. Je te demande pardon. Pardon de t'avoir rencontré. Pardon de t'avoir aimé. Pardon d'avoir existé. »

En entendant l'extrait de cette lettre, je me suis demandé si toute vérité est toujours bonne à dire. L'expression de la vérité peut parfois conduire à vivre l'expérience d'une telle souffrance morale, qu'il est bon de se poser cette question. Toutefois, souligne Marie de Hennezel, dans son dernier livre « Mourir les yeux ouverts », il ne s'agit pas tant de « dire la vérité » que d'« être vrai ». On voit alors combien la question de la vérité est une question qui doit se résoudre au sein d'une relation de confiance lorsque l'amour ou l'amitié sont le ciment de la rencontre entre deux êtres. Une confiance à retrouver lorsque celle-ci a été bafouée par l'être aimé et cela peut prendre du temps. Le temps qu'il faudra pour se reconstruire et faire à nouveau le pari d'une confiance retrouvée. Au fil des années, par les petites trahisons, l'être humain n'a plus confiance, il apprend à faire confiance car cette dernière se donne à vivre. Malgré la douleur vécue, conscient qu'une relation ne peut exister sans la confiance, nous pouvons la retrouver en l'autre en reconnaissant qu'il a cherché à être vrai et qu'il s'engage à toujours l'être. En ce sens, « être vrai » permet à quelqu'un de dire ce qu'il vit afin de partager avec lui ce qu'il sait, même si c'est douloureux.

De cette manière, nous découvrons que la vérité ne consiste pas toujours à « dire la vérité » mais à laisser l'autre venir à sa vérité, à permettre à l'autre de retrouver sa seule et unique manière d'être vrai. Heureusement, dans la foi, sur ce chemin de vie, nous ne sommes pas seuls. L'Esprit de Dieu, l'Esprit de Vérité nous accompagne. Et comme le dit saint Jean ailleurs dans son évangile : « si vous demeurez dans ma parole, vous serez vraiment mes disciples, vous connaîtrez alors la vérité et la vérité fera de vous des êtres libres ». L'Esprit de Vérité inspire chacune et chacun d'entre nous pour que nous puissions « être vrais ». Etant vrais, nous pouvons alors faire l'expérience de cette liberté divine à laquelle nous sommes conviés. Cette inspiration divine dans l'Esprit vaut pour nous mais aussi pour les autres. L'Esprit de Dieu, l'Esprit de Vérité passe par nous également pour permettre à celles et ceux qui croisent notre chemin de devenir des êtres vrais.

D'une certaine manière, dans l'Esprit, nous pouvons être des « dévoileurs » de vérité pour les autres. Nos actes, nos paroles, nos gestes, notre vie toute entière peuvent être porteurs de vérité pour les autres et ce, sans que nous nous en rendions compte. « Dévoileurs » de vérité, telle est notre vocation humaine et divine. Un peu comme si Dieu attend de chacune et chacun de nous, là où nous sommes, que nous fassions éclore la vérité, cette vérité qui nous rend libre car nous savons que c'est par elle que nous pourrons vivre des commandement du Fils qui ne se réalisent que dans l'amour du Père. Chercheurs de vérité, semeurs de vérité, « dévoileurs » de vérité, « accomplisseurs » de vérité : différentes voies pour permettre à tout être humain d'être vrai, de le laisser venir à sa vérité. S'il en est vraiment ainsi que l'Esprit de Dieu inspire chacune et chacun de nous à chaque instant de nos vies pour que nous soyons toujours des « êtres vrais ». Amen.

6e dimanche de Pâques, année A

Auteur: Braun Stéphane
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : A
Année: 2004-2005

L'évangile de ce jour est dans la suite de celui de dimanche dernier. Il se situe pendant ce temps d'intimité de Jésus avec ses disciples au cours du dernier repas qu'il prend avec eux, après la démarche de service et d'humilité du lavement des pieds.

L'évangile commence par cette forte affirmation conditionnelle : "Si vous m'aimez, alors...". Pour Jésus qui a déjà vécu plusieurs années avec ses disciples, se savoir aimé ne sera jamais une certitude. Cela ne dépend pas de lui.

Imaginons la même affirmation dans un couple, entre amis, avec des enfants, dans une communauté ou toute autre structure de relation ! "Si tu m'aimes, alors...". Alors quoi ?...Jésus répond à chacun de ses disciples et à nous-même : Si tu m'aimes, c'est-à-dire si tu aimes, tout simplement, alors tout devient possible car tu es fidèle à mon commandement. Tu rentres alors comme partenaire dans la dynamique, dans la folie du plan de Dieu pour le monde. Jésus annonce son départ, la fin de sa mission, l'aboutissement de la Révélation commencée par les prophètes de l'ancien testament et achevée par sa mort et sa résurrection : "Le monde ne me verra plus mais vous, vous me verrez vivant et vous vivrez aussi. Vous reconnaîtrez que je suis en mon père, que vous êtes en moi et moi en vous. Je prierai le père et il vous donnera le Paraclet". C'est-à-dire l'esprit, le souffle, la force, un défenseur, on pourrait dire aujourd'hui un coach, quelqu'un d'autre pour nous aider à prendre le relais de son fils Jésus dans ce monde toujours en création.

Jésus nous annonce aujourd'hui la venue de l'Esprit saint et nous entraîne avec lui dans ce mystère de la trinité, de cette relation entre père, fils et esprit et avec nous-mêmes qui y sommes associés.

Jésus nous met maintenant sur le chemin. Il nous introduit dans le mouvement, dans la dynamique en nous laissant son esprit qui, intimement lié à notre personne, nous accompagne et sera pour toujours notre force et notre lumière à travers le temps et l'histoire du monde. Jésus, au cours de ce repas, nous partage son immense confiance en nous cédant ce relais pour continuer à aimer, à construire le monde en lui donnant sens et vie. En nous donnant son esprit, Dieu ne nous laisse pas seul sur la route. Il s'associe à nous tout en nous associant à lui. Il nous donne la possibilité de vivre de ce souffle, de l'activer, tout en prenant le risque de le voir s'étouffer.

N'est-ce pas cela la folie de l'amour et alors aussi la folie de Dieu : Accepter de se fragiliser pour prendre ce risque insensé de la confiance. De cette confiance en l'autre qui le fait vivre.

C'est cela, la folie d'être "être vivant", quand Jésus nous dit : "Vous me verrez vivant et, vous aussi, vous vivrez". Le sens de notre vie c'est, avec l'aide de l'esprit, d'aimer, de rendre Jésus vivant autour de nous. Alors, n'essayons pas de comprendre la trinité. Les premiers siècles de l'Eglise ont vu un foisonnement de discussions passionnées, de controverses et de prises de positions sur la structure et la nature de la relation entre père, fils et esprit. La trinité n'est pas un concept, objet de réflexions et discussions. Elle est énergie et mouvement. On n'y entre pas par la raison, mais par la confiance.

Heureusement la trinité, comme l'amour, est et restera un mystère. Quand on aime, on se fait vivre l'un et l'autre avec ce sentiment mystérieux d'être dans quelque chose qui nous dépasse. N'essayons pas de comprendre. Laissons nous emporter dans un tourbillon, ce tourbillon de la relation, de l'amour, de la trinité de Dieu qui nous entraîne bien au delà de nous-même, dans l'infini de Dieu. Aujourd'hui, premier mai, c'est la fête du travail. Du travail qui doit anoblir l'homme et non l'asservir. C'est la fête du travail mais surtout celle des travailleurs, de ceux qui par leur travail, quel qu'il soit, s'inscrivent dans cette histoire de relation humaine et divine qu'est le plan de Dieu pour notre monde. C'est la fête de ceux qui ont l'audace et l'humilité de travailler, comme le dit saint François : "Au nom du père, par le fils et avec l'esprit".

Amen

6e dimanche de Pâques, année A

Auteur: Devillers Raphaël
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : A
Année: 2004-2005

Encore deux semaines et, après la célébration de l'Ascension du Seigneur, nous arriverons au terme du temps pascal, ces 7 semaines qui nous acheminent au 50ème jour après Pâques : la PENTECÔTE.

50 jours après le repas de l'agneau à la fête de Pessah et après la sortie d'Egypte, les esclaves hébreux avaient jadis atteint le Sinaï et reçu la Loi de Dieu.

De même, 50 jours après la Pâque de Jésus - l'Agneau de Dieu -, ses disciples reçurent le don de l'Esprit de Dieu qui les libérait de toute servitude, y compris celle de la Loi.

L'histoire du monde est tout orientée vers ce terme : que Dieu et les hommes communient dans la même Vie, que la Nouvelle et définitive Alliance soit scellée. Jésus n'a vécu, n'a prêché, n'a accepté la croix et n'est ressuscité que dans cet unique but.

LE DON DU PARACLET

Il est peut-être dommage que le mot hébreu RUAH (en grec : PNEUMA) ait été traduit par le français ESPRIT qui évoque surtout quelque chose d'immatériel, d'évanescent, d'abstrait, d'intellectuel...

Or la RUAH de Dieu, c'est essentiellement son SOUFFLE, son énergie, son dynamisme personnel. On ne le reçoit pas comme un titre de possession, un héritage, une richesse intérieure : il faut se prêter à son action, se laisser emporter par lui. Ce qui oblige de lâcher prise, d'abandonner des habitudes, de renoncer à la maîtrise totale de son existence.

Un bateau peut avoir été conçu par un ingénieur de génie, disposer d'un équipage de grands marins ...encore faut-il que le vent souffle...et que l'on ait levé les voiles. N'avons-nous pas trop souvent peur de risquer notre vie au Souffle de Dieu, de nous laisser emporter dans la grande aventure de la liberté divine ?

S'il est vrai, comme le disait saint Syméon le théologien, que "tout le christianisme consiste à recevoir le SAINT-ESPRIT ", nous ne pouvons cantonner le don de l'Esprit à un événement passé, le figer dans une cérémonie datée, le considérer comme un héritage à préserver.

Dans le grand discours d'adieu (évangile de Jean, chapitres 14 à 17), Jésus promet à ses disciples de leur envoyer l'Esprit dont il détaille les fonctions en 5 passages. Le premier constitue la lecture de ce jour :

"Si vous m'aimez,

vous resterez fidèles à mes commandements.

Je prierai le Père : il vous donnera un autre DEFENSEUR

qui sera AVEC VOUS pour toujours.

Il est l'Esprit de Vérité.

Le monde est incapable de le recevoir parce qu'il ne le connaît pas. Vous, vous le connaissez parce qu'il demeure PRÈS DE VOUS

et il est EN VOUS"

Qui donc est celui que nous appelons l'Esprit-Saint ?

Essentiellement il est DON DE DIEU. Jamais ni par l'intelligence, ni par l'ascèse, on ne peut le gagner, le saisir, le capter, le mériter.

Alors que faire ? " Si vous m'aimez ! " dit Jésus, en précisant tout de go que cet amour consiste à écouter ses commandements et à les mettre en pratique fidèlement, c'est-à-dire dans la durée. Tâche onéreuse, amour réaliste. Mais n'est-ce pas en tentant de vivre la Parole de Dieu que l'on expérimente - très vite - que "l'on manque de Souffle" et qu'il est impératif de capituler de son orgueil pour mendier le Don de Celui-là seul qui permettra la fidélité à l'Evangile, donc un amour réel de Jésus ?

Cet Esprit s'appelle aussi DEFENSEUR (traduction du grec "paracletos" qui donne en latin "ad-vocatus"). " Un autre" note Jésus, qui naturellement fut le premier "paraclet" de ses disciples. Mais cet Autre n'aura plus une présence extérieure et temporaire, telle celle de Jésus cheminant avec les siens sur les routes de Galilée. Il sera "AVEC VOUS...PRES DE VOUS...EN VOUS" : les prépositions utilisées signalent une présence de plus en plus intériorisée.

La suite du Discours d'adieu de Jésus précisera les fonctions que ce Défenseur remplira près des disciples : Il leur rappellera les enseignements de Jésus, les actualisera, leur en montrera la valeur définitive ; il les leur fera comprendre de plus en plus profondément et ainsi les conduira vers la Vérité tout entière ; Il les rendra capables de témoigner de Jésus avec courage, de répandre son évangile parmi tous les peuples tout en leur permettant de confondre les mensonges de leurs ennemis

Il est enfin appelé l' ESPRIT DE VERITE car il vient du Dieu de Vérité, il anime la Vérité de la Révélation de Jésus, il fait vivre dans cette Lumière du vrai, et il suscite l'adoration "en esprit et vérité" (Jean 4, 23)

LA VENUE DE JESUS

Ensuite, de façon encore plus mystérieuse, Jésus ajoute une autre promesse :

"Je ne vous laisserai pas orphelins : je viens vers vous.

Le monde ne me verra plus mais vous, vous verrez que je vis

et vous vivrez, vous aussi"

La fidélité à l'Evangile de l'amour de Jésus et l'accueil du Souffle divin permettront aux disciples non de goûter des sensations exceptionnelles mais de "réaliser" que - quoi que prétende "le monde" c'est-à-dire les gens fermés à la grâce - Jésus, leur enseignant de jadis, est bien le Seigneur Vivant.

"Voyant "(avec le c½ur) qu'Il est bien vivant, ressuscité, eux-mêmes du coup, revivront, ressusciteront sans cesse de la nuit à la lumière, de la tristesse à la joie, de l'absurde à l'espérance. Et cela même lorsque leurs ennemis les feront souffrir et les menaceront de mort.

Tressaillant de joie impatiente devant l'évènement tout proche, nous prierons souvent la "Séquence" de la fête de Pentecôte :

Viens, Esprit-Saint en nos c½urs Consolateur souverain

Et envoie du haut du ciel hôte très doux de nos âmes

Un rayon de ta Lumière adoucissante fraîcheur.

Viens en nous, père des pauvres, Lave ce qui est souillé,

Viens, dispensateur des dons baigne ce qui est aride,

Viens Lumière de nos c½urs. Guéris ce qui est blessé

7e dimanche de Pâques, année A

Auteur: Cochinaux Philippe
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : A
Année: 2004-2005

Jn 17, 1b-11a

Imaginez-vous un instant, que demain matin, en allant acheter votre journal, votre regard se porte sur les étagères où sont rangés les magazines. Et quelle n'est pas votre surprise de voir ma photo en couverture de toutes les revues qui sont exposées. Je serais à la une de tous les magazines « people », et même sur celle de « foot magazine » alors que certains d'entre vous savent pertinemment bien que je déteste ce sport. Et vous vous demandez : mais qu'a-t-il encore bien pu faire pour avoir droit à une telle publicité. A cette question, je ne puis vous donner de réponse car je suis en plein rêve pour le moment. Mais si c'était vrai. Vous vous rendez compte. Quel succès ! Quelle gloire ! Et je me sens d'autant plus à l'aise que Jésus n'arrête pas de nous parler de gloire, à l'heure où il passe de ce monde à son Père. Mais peut-être n'ai-je pas bien compris le sens de la gloire, se disent sans doute les plus impertinents d'entre vous. Alors s'il en est ainsi, que signifie-t-elle ?

Il ne s'agit certainement pas d'une gloriole passagère et éphémère. Non, la gloire à laquelle le Christ fait référence, est le poids réel d'un être, c'est-à-dire sa valeur profonde, celle que tout homme, toute femme acquiert au fil des années et qu'il recevra en plénitude lorsqu'il aura accompli sa destinée. Ni plus, ni moins. Au terme de sa mission terrestre, le Fils pouvait alors être glorifié dans le Père puisqu'il avait atteint la mission qui lui avait été confiée de toute éternité. Cette gloire n'est donc pas réservée à une des personnes de la Trinité. Chacune et chacun de nous sommes appelés à entrer dans la gloire de Dieu.

De par notre naissance, nous sommes devenus citoyens de la terre. La vie nous a été donnée et elle fait de nous, des cosmopolites. Par notre baptême, nous sommes entrés dans une nouvelle citoyenneté, celle du Ciel. Ce sacrement fait de nous des ouranopolites, c'est-à-dire des citoyens du Royaume de Dieu. Cosmopolites par notre naissance, ouranopolites par notre baptême, telle est notre condition aujourd'hui. En suivant librement le Christ, inspiré par l'Esprit Saint, nous acceptons de partir à la rencontre du Père et d'établir dès à présent son Royaume là où nous sommes. Cela se fait tout simplement en vivant pleinement l'amour de celles et ceux de qui je me fais proche ici-bas tout en étant habité par l'espérance de cette vie d'en-haut. Le chemin est simple. Il suffit de croire en Dieu. Et chaque fois que nous croyons en Lui, il existera un peu plus. Et si nous persistons, il existera complètement, souligne Eric-Emmanuel Schmitt. Il y va encore de notre responsabilité personnelle. A nous, et à nous seuls, de décider de faire exister Dieu au c½ur de notre monde en lui donnant la place qui lui revient dans nos vies.

Cosmopolites, citoyens de la terre, nous le sommes en étant les biographes de nos existences. Nous écrivons nos vies par les choix que nous posons, par les paroles et gestes que nous offrons. Etre cosmopolite est une certitude qui s'impose à nous par le fait même que nous existons. Que je le veuille ou non, cela s'impose à moi. Je ne l'ai pas décidé. A moi, en lien avec les autres, de réussir ma citoyenneté terrestre pour ne pas passer à côté de ma vie. Par contre, ouranopolites, citoyens du Ciel, nous ne le sommes pas au départ, nous le devenons. Il s'agit cette fois d'une décision personnelle dans la foi. Je choisis de devenir ouranopolite. Depuis mon baptême, inspiré par l'Esprit, je vis ma vie autrement. Je suis non seulement biographe de mon existence mais également théographe. La théographie est une calligraphie divine. L'ouranopolite que je suis, choisit de devenir un théographe c'est-à-dire d'écrire sa vie avec l'encre de Dieu. Une encre indélébile qui marque tous nos faits et gestes d'une couleur particulière, celle de l'arc-en-ciel, signe de l'alliance entre Dieu et son humanité. Cette fois, nous avons quitté le champ des certitudes pour entrer dans celui de l'espérance. L'espérance que tout se que nous vivons aujourd'hui s'inscrit à jamais dans un au-delà. L'espérance de recevoir la vie éternelle.

En résumé, mon état de citoyen terrestre s'impose à moi et c'est à moi de décider d'écrire ma biographie. Mon état de citoyen du Ciel est un don auquel je réponds librement dans la foi pour écrire ma vie avec cette calligraphie divine qui rend la vie plus belle encore puisqu'elle nous ouvre les portes de la vie éternelle. Cosmopolite et biographe seulement ou plutôt cosmopolite et biographe tout en étant ouranopolite et théographe ? Nous seuls pouvons le décider. Mais le second choix donnera une couleur toute particulière à la vie, celle d'avoir la conviction de la réussir puisqu'elle s'inscrit en Dieu. Amen.

7e dimanche de Pâques, année A

Auteur: Materne Pierre-Yves
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : A
Année: 2004-2005

 

Jn 17, 1-11

« Père, glorifie ton Fils afin que le Fils te glorifie »

Dans l'Evangile de ce dimanche, il est beaucoup question de gloire, de glorifier, de glorification. Le terme de gloire est assez bien présent dans la Bible. Mais qu'est-ce que cela veut dire ? Pour la plupart d'entre nous, la gloire désigne le fait d'avoir une grande réputation, d'où l'expression « avoir son heure de gloire ». Il s'agit donc de succès, d'éclat ou encore de célébrité.

Or, il semble bien que Jésus ne demande pas à son Père de faire de lui une star, bien que son histoire soit restée célèbre. Dans la Bible, la gloire n'est pas une affaire de renommée ou de réputation mais une affaire de présence. En effet, parler de la gloire de Dieu, c'est parler de la présence agissante de Dieu dans notre monde. Lorsque nous chantons, le Gloria, « le Gloire à Dieu au plus haut des cieux », nous exprimons notre joie devant cette présence active de Dieu dans notre vie et notre monde. Dieu n'est pas absent de notre vie, même s'il est souvent discret et silencieux. Dieu agit à sa façon dans les profondeurs de notre être et de l'humanité.

Jésus, sans éclat ni tambour, a concrétisé cette présence aimante de Dieu auprès des hommes et des femmes, en cheminant avec eux, en étant à leur niveau. C'est pour cela qu'il est dans la gloire de Dieu, qu'il est la gloire de Dieu. Jésus a fait que le Dieu Tout Autre devienne proche et présent dans la vie quotidienne. C'est peut-être cela son succès. Jésus ne brille pas par les apparences et les beaux discours mais il rayonne par le don de lui-même. En donnant sa vie sur la Croix, Jésus a accepté d'aller jusqu'au bout de sa mission. Il a refusé la violence et est resté fidèle à son message d'amour au sujet du Dieu proche. Il est l'Emmanuel, ce qui veut dire « Dieu avec nous ». C'est en accomplissant sa mission que Jésus a glorifié son Père. Ensuite, c'est par la résurrection que le Père a glorifié son Fils. De façon inouïe, le Père s'est rendu proche de son Fils en lui donnant la vie, en le relevant du séjour des morts.

Lorsque Jésus parle des croyants, il parle de ceux qui lui ont été donnés et en qui il trouve sa gloire. « Je trouve ma gloire en eux ». Autrement dit, ce sont les disciples qui offrent au Christ une présence, une proximité. Maintenant que Jésus est remonté auprès du Père, c'est à nous à rendre Dieu présent dans le monde. Nous sommes à une époque où on parle beaucoup des religions et du religieux mais on ne parle plus tellement de Dieu tel que Jésus nous l'a révélé par sa vie, sa mort et sa résurrection.

Or, Jésus nous demande de faire connaître Dieu, de transmettre la vie éternelle à ceux qui nous entourent. Comment pouvons-nous y arriver ? Nous sommes capables de donner un témoignage en étant à l'image du Dieu présent. Tout en demeurant discret et respectueux de l'autre, nous pouvons nous faire proches. Nous devons être des présences agissantes du Dieu d'amour et de tendresse. Nous sommes appelés à transmettre la gloire, en toute simplicité. Individuellement, nous sommes des signes de la proximité de Dieu. Mais il est très important de témoigner comme communauté.

Nous sommes réunis ici pour chanter la gloire de Dieu, pour rendre gloire à Dieu et pour devenir une image de cette gloire divine. Laissons la gloire toucher nos oreilles et nos c½urs pour qu'elle nourrisse notre prière et notre amour pour ceux que nous rencontrerons demain et après-demain. Soyons de simples porteurs de gloire, devenons des être glorieux !

7e dimanche de Pâques, année A

Auteur: Devillers Raphaël
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : A
Année: 2004-2005

Jn 17, 1-11

Dans son récit de l'ultime soirée de Jésus avec ses disciples, saint Jean met sur ses lèvres un long et très admirable discours d'adieu qui est comme son testament. Alors même - et il le sait - qu'il est sur le point d'être arrêté et exécuté de façon infâme, Jésus réconforte les siens dont il sait les faiblesses. Il veut les prémunir contre le désespoir et leur dévoiler les richesses de ce qu'ils vont vivre en Eglise.

Ce discours commence ainsi :

"Que vos c½urs ne soient pas bouleversés : ( Jn 14, 1)

vous croyez en Dieu, croyez aussi en moi"

et se termine par :

"Je vous ai dit tout cela afin qu'en moi vous ayez la paix. ( Jn 16, 33 )

Dans le monde, vous aurez la persécution.

Mais ayez confiance : Moi, j'ai vaincu le monde"

Encouragements, promesses du don de l'Esprit, allégorie de la Vigne, avertissements devant les futures épreuves, assurance de la victoire finale : tout est dit pour que l'Eglise sache ce qu'elle a à vivre jusqu'à la fin des temps.

JESUS PRIE POUR LES SIENS

Là-dessus Jésus commence une longue prière qui remplit tout le chapitre 17 et dont nous lisons aujourd'hui la première partie (il est conseillé de la méditer intégralement). La tradition l'appelle "La prière sacerdotale de Jésus" parce qu'il y intercède, comme prêtre situé entre Dieu et les hommes. On dit aussi "Prière ½cuménique" puisqu'elle insiste fortement sur le but même de la mission de Jésus : l' UNITE

( "Que tous soient UN...")

En ce dernier jour, voilà plus de deux ans que Jésus s'est donné à fond : il a guéri des malades, a pardonné aux pécheurs, a exorcisé des malheureux ; avec une infinie patience, il a enseigné le projet de Dieu, expliqué ce qu'était ce Royaume que son Père l'avait chargé d'inaugurer ; il a multiplié les entretiens avec ses disciples. Au terme de cet engagement total, pour le couronner, il se met à PRIER.

Oui il est nécessaire et urgent de beaucoup travailler, de prêcher, de créer des ¼uvres, de soigner les souffrants...Mais cette activité ne sera féconde que si elle est portée par la prière. A bout de forces, le chrétien doit toujours revenir aux pieds de son Seigneur pour lui présenter ceux dont il a la charge. Il est toujours dangereux de s'attribuer l'honneur de nos pauvres entreprises.

" Jésus lève les yeux au ciel et dit : "PERE,..."

Les juifs avaient coutume de prier en se tournant dans la direction de Jérusalem, la ville du Temple de Dieu. Avec Jésus, il n'y a plus de lieu sacré, d'édifice centre du monde, de religion enfermée dans un espace, limitée à une nation. Dieu Unique est Père, Père dans les cieux, et son temple n'est rien d'autre que le Corps du Christ, communion des disciples partout éparpillés et "qui adorent en Esprit et en Vérité" ( Jn 4)

"Père, l'heure est venue : glorifie ton Fils afin que le Fils te glorifie...

Ainsi il donnera la Vie éternelle à tous ceux que tu lui as donnés.

Or la Vie éternelle c'est :

- de te connaître, toi, le seul Dieu, le vrai Dieu,

- et connaître celui que tu as envoyé, Jésus Christ "

Le Père n'exige nullement la mort de son Fils ; le Fils ne cherche nullement à mourir (cette perspective l'effraie - Jn 12, 27). Ce sont les hommes qui ne veulent plus voir cet homme, qui ne supportent plus de l'entendre se dire "Le Fils de Dieu", et qui sont donc décidés à le supprimer. Ce sera par la croix. Ce sera à la fête de la Pâque.

Le crime des uns sera le don d'amour de l'autre. Jésus le sait : l'heure est là, que personne n'a pu avancer au cadran de l'histoire du monde. L'heure des plus noires ténèbres sera, par la prière, révélation plénière et du Fils et du Père. Ceux qui verront en Jésus le Fils recevront la Vie de Dieu, ils renaîtront par la foi.

JESUS DONNE

A l'écoute de cet évangile, comment ne pas être frappé par la répétition du verbe DONNER ( il revient 17 fois dans cette prière de Jésus) :

" Père, j'ai achevé l'½uvre que tu m'as donné à faire..." etc....

"J'ai manifesté ton Nom aux hommes que tu m'as donnés..."

" Les paroles que je leur ai données sont celles que tu m'as données..."

" Père, garde-les en ton Nom que tu m'as donné ..."

Admirable spiritualité du DON. Jésus n'a rien de lui ni par lui. Ses actes, ses attitudes, son projet... : tout ce qu'il est et tout ce qu'il a et tout ce qu'il fait et tout ce qu'il dit est reçu de son Père auquel il est suspendu par tout son être.

Il ne porte aucun souci de lui-même, ne se juge ni inventeur ni propriétaire de son comportement. Même les quelques hommes qui se sont attachés à lui ne sont pas sa conquête mais ils lui ont été donnés par le Père.

Et il ne garde rien pour lui : tout ce qu'il reçoit, il le donne.

Jésus n'est ni un prophète, ni un messager, ni un sage, ni un moraliste, ni un surdoué, ni un fondateur de religion. Il ne présente jamais ses discours à la manière des Prophètes : " Oracle de YHWH...".

Il est Dieu-donné ( Nathanaël en hébreu) et Dieu-donnant.

Aussi peut-il dire sans nulle suffisance :

"Qui me voit voit le Père... Le Père et moi, nous sommes UN..."

C'est pourquoi l'Evangile n'est ni un livre ni un code de morale ni un rituel : il est une Personne, il est Jésus, le Fils, manifestation lumineuse du Père. Le reconnaître, c'est commencer à vivre de la Vie divine.

Destinée sublime - à jamais au-delà de tous nos efforts - mais DON. Pour que nous, pauvres disciples, à notre tour, nous soyons DONNES et au Père et au Fils et à nos frères.

Dans l'Esprit - que nous attendons à la Pentecôte et qui nous fera entrer dans cette éternelle prière du Fils.

Ascension

Auteur: Devillers Raphaël
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : A, B, C
Année: 2004-2005

Mt 28, 16-20

" Jésus est monté au ciel...Il est élevé dans la Gloire...Il est assis à la droite du Père..."

Nous sommes bien obligés d'employer des images pour tenter d'exprimer l'indicible. Mais il n'y a pas là que des formules poétiques et insignifiantes. Dire que cet homme, Jésus, exécuté sur une croix en tant que blasphémateur, participe à la Gloire de Dieu et est effectivement Seigneur de l'histoire, est une affirmation subversive qui bouscule toute existence qui se voudrait simplement tranquille, qui conteste toute société qui chercherait à nous enfermer dans des horizons terrestres donc dans la mort.

L' Ascension de Jésus est promesse de la nôtre, brèche ouverte dans la chape de plomb sous laquelle on essaie de nous étouffer.

Oui, le progrès multiplie des merveilles étourdissantes en vue d' aménager au mieux notre petit parcours terrestre, éliminer les maux, calmer les souffrances, nous offrir toutes les possibilités d'épanouissement. Mais nous nous laissons anesthésier par ces promesses alléchantes d'un monde parfait où, quoi que l'on fasse, le sur-développement des uns se paie au prix du sous-développement et de l'immense malheur des autres.

Seul un objectif divin permet d'humaniser la terre, seul l'Esprit nous fait respirer ensemble l'air de la Vraie Vie. Seule la certitude que Jésus le crucifié est l'homme exalté par Dieu doit permettre à l'Eglise de résister à l'opium des idoles et de mettre en oeuvre résolument une autre manière de vivre.

Cela ne va pas sans grand combat contre les tentations. Comme Jésus, au départ de sa mission, avait été tenté, pendant 40 jours au désert, ainsi les premiers apôtres, pendant 40 jours d'apparitions du Ressuscité, ont été tentés de triple manière.

1. - EST- IL VRAIMENT RESSUSCITÉ ? . . .

Il a fallu un certain temps pour que les apôtres reconnaissent que Jésus était ressuscité. Sur-le-champ, mis devant l'impossible, ils ont cru voir un fantôme, être sujets d'hallucinations. Ne nous étonnons donc pas si notre entourage demeure fermé à cette foi, se gausse de notre crédulité, proclame l'impossibilité de cet événement. Et même ne soyons pas surpris d'être nous-mêmes parfois en proie aux doutes et aux interrogations. Mais lisons la suite de l'histoire et voyons comment, de saint Pierre à l'abbé Pierre, des hommes et des femmes ont été transfigurés par l'espérance ouverte par l'Ascension et ont pu, en paroles et en actes, témoigner de la véracité du Christ Vivant.

2.- TOUT . . . TOUT DE SUITE . . .

Enfin persuadés de la résurrection, les apôtres furent séduits par une autre tentation. Ils interrogent leur Seigneur :

"Est-ce maintenant que tu vas rétablir le Royaume pour Israël ?..."

Puisque le Christ a remporté la plus extraordinaire des victoires, celle sur la mort, et qu'il dispose de la Toute Puissance divine, pourquoi ne prend-il pas sa revanche sur ses juges iniques qui l'ont condamné sans raison ? Pourquoi, d'un coup de baguette magique, n'instaure-il pas le Royaume de tous nos rêves : santé, bonheur, argent, jouissance, paradis ... ?

Jésus refuse cette rêverie d'enfants gâtés :

" Vous allez recevoir une Force : le Saint -Esprit viendra sur vous.

Alors vous serez mes témoins,

à Jérusalem...et jusqu'aux extrémités de la terre"

Dans une société qui exacerbe notre avidité - tout, pour rien, tout de suite -, les disciples doivent au contraire devenir les acteurs du Royaume de Dieu à faire advenir lentement, péniblement, parmi toutes les nations. Pour cela, pas d'autre chemin que celui du Christ, celui des béatitudes : le pardon au lieu de la vengeance, le partage au lieu de l'accumulation, la croix plutôt que les honneurs.

Seule la Puissance de l'Esprit de Dieu nous en rend capables.

3. - LA FIN DE L' HISTOIRE ? . . .

Désarçonnés par la disparition définitive de leur Seigneur, les apôtres demeurent cois.

" Ils le virent disparaître dans une nuée...

Deux hommes leur dirent : " Pourquoi restez-vous là à regarder en l'air ? Ce Jésus reviendra de la même manière que vous l'avez vu s'en aller"

Nouvelle façon de refuser la lutte de l'engagement chrétien : s'asseoir et discuter interminablement sur les délais de la parousie, les signes apocalyptiques, les dates probables. Il y a des palabres théologiques qui sont fuite dans l'inaction, des élévations spirituelles qui sont égarement dans l'idéalisme, des "visions" et apparitions qui ne sont que consolation douceâtre, fausse religion, refus des remises en jeu.

L' Ascension du Christ ne fige pas ses frères le nez en l'air : elle les renvoie au c½ur des luttes humaines. Mais avec une certitude : nous allons vers des retrouvailles avec le Seigneur.

NEUVAINE A L'ESPRIT-SAINT

Après avoir fait l'expérience humiliante de leur lâcheté et de leurs limites, les apôtres à présent sont convaincus que Jésus est Seigneur ; ils acceptent la tâche de devenir ses témoins parmi toutes les nations. Mais Jésus les a prévenus : seul l'Esprit leur permettra d'accomplir cette mission capitale. Le Royaume ne peut être construit par l'homme. Il faut demander, prier, supplier, attendre :

" Tous se retrouvèrent dans la chambre haute à Jérusalem

et, unanimes, ils persévéraient dans la prière

avec Marie, la mère de Jésus"

A notre tour, aujourd'hui, d'entrer dans cette "Neuvaine à l'Esprit" (du 40ème au 50ème jour). De comprendre que la Puissance de Dieu nous guérit de nos fautes. D'être passionnés par le désir d'apporter aux autres cette Bonne Nouvelle qui nous remplit de joie. De demander que souffle ce Vent de Dieu qui nous enverra parmi tous les peuples.

MARIE, qui a mis au monde Jésus, prie avec nous pour donner naissance à une Eglise transfigurée par l'espérance.

Baptême du Seigneur, année A

Auteur: Materne Pierre-Yves
Temps liturgique: Temps de Noël
Année liturgique : A
Année: 2004-2005

 

Mt 3, 13-17

A certains moments dans l'histoire de l'Eglise, on a affirmé que Dieu avait adopté Jésus lors de son baptême en Galilée. Jésus ne serait qu'un homme comme tous les autres ayant été choisi par Dieu pour accomplir une mission. Pour certains croyants, il était difficile d'admettre que Jésus soit vraiment le Fils incarné de Dieu. Les tenants de cette thèse, on les nomme adoptianistes.

Si Jésus est Fils de Dieu dès le commencement, cela signifie qu'il a été adopté bien avant le jour du baptême. Dans le Jourdain, Jésus se laisse baptiser par Jean le Baptiste pour manifester le fait qu'il accepte de vivre sa mission. A cette occasion, le texte nous dit que les cieux s'ouvrirent. En effet, le baptême est l'expression publique de la communication qui existe entre le Père et son Fils. Cette communication est assurée par l'Esprit, symbolisé par la colombe. Le sens profond du baptême, qui est d'abord un acte, est éclairé par une parole : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé ; en lui j'ai mis tout mon amour ». Non seulement, Jésus est aimé, mais il est aimé d'un amour complet. Le baptême dans le Jourdain est le lieu du dévoilement du secret de Jésus. En effet, nous apprenons que Jésus est un fils aimé par Dieu. Par conséquent, le Dieu de Jésus n'est pas un être écrasant ou violent. C'est le Dieu qui est doux comme la colombe, avec ce Dieu la communication non-violente est possible.

Nous aussi, nous avons été baptisés. Pour la plupart, nous étions enfants et nos parents ont pris la responsabilité de choisir pour nous, comme ils l'on fait pour plein d'autres choses : notre nom, notre école.

A la différence de Jésus, nous sommes des fils et des filles de Dieu par adoption. Nous avons un père et une mère et aussi un Père avec un grand P. Nos parents nous ont donné la vie pour que nous vivions en enfants de Dieu. Notre Père du ciel, qui est d'abord le Père de Jésus, nous aime comme ses enfants. Il nous a adoptés dans son amour, et cela bien avant notre baptême. Celui-ci est un rite qui a dévoilé l'amour de Dieu pour nous. On a longtemps dit que le baptême servait à effacer une tache originelle. On a trop souvent été anxieux au sujet du sort des enfants non baptisés. Or, je pense que l'essentiel est ailleurs. Il s'agit d'une révélation de l'amour de Dieu qui a conduit Jésus à mourir et à ressusciter. Or, cet amour divin est universel. Chaque être humain est aimé par Dieu. Comme chrétiens, nous avons simplement voulu le dire publiquement et vivre consciemment en alliance avec Dieu.

A notre baptême, une voix a aussi dit : « Voici mon enfant, en lui j'ai mis tout mon amour ». Bien sûr, ce n'était pas une voix céleste mais une polyphonie des voix de nos parents, parrain et marraine, ainsi que du prêtre. Par leurs paroles, ils ont attesté que Dieu est un Père aimant nous. Il nous restait à la découvrir par nous-mêmes tout au long de notre existence. C'est cela qui nous est remis en mémoire aujourd'hui. Dieu est un mystère de communication et de communion dans l'amour. C'est pour cela que nous devenons ses enfants adoptifs. Si Dieu était un satellite ce complaisant en lui-même, nous ne serions pas ici comme ses fils et ses filles. Nous serions peut-être des astronautes en quête de nouvelles découvertes.

Finalement, nous sommes fils et filles de Dieu parce que Dieu a souhaité ne pas vivre en solitaire. Il a voulu se communiquer à nous pour nous rendre libres et solidaires de la famille humaine. Nous vivrons notre filiation en développant notre propre capacité d'aimer et d'exercer nos responsabilités dans un climat de justice. Cela ne peut se faire tout seul, c'est pourquoi nous avons besoin de nous rassembler pour célébrer l'eucharistie.

Baptême du Seigneur, année A

Auteur: Devillers Raphaël
Temps liturgique: Temps de Noël
Année liturgique : A
Année: 2004-2005

 

La Dignité suprême des Baptisés

La beauté et la vérité de la Bonne Nouvelle du Christ Seigneur éclatent tout autant dans l'Evangile que - a contrario - à travers les caricatures que le monde en fait lorsqu'il s'en détourne. Les fêtes récentes en donnent à nouveau la manifestation.

Au lieu d'adorer un Dieu Père qui offre son amour à tous, sans distinction, on a vénéré un père Noël, idole hilare et mensongère du faux bonheur puisqu'il ne fait des cadeaux (payants !) qu'aux riches.

Au lieu de regarder l'Arbre de la Croix où le Fils de Dieu montre qu'il n'y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu'on aime, on a dansé autour du Sapin enguirlandé, symbole païen d'une vie qui soi-disant ne mourrait pas.

Au lieu de se rassembler fraternellement dans une église où se revit Noël - puisque l'enfant couché dans la mangeoire devient le Pain vivant distribué aux bergers et aux mages, aux pauvres et aux savants -, on a préféré s'abrutir dans la gloutonnerie des banquets luxueux.

Et maintenant, au lieu de jouir des richesses insondables dont l'Esprit-Saint comble le c½ur des croyants, on s'encourt aux "Soldes" - comme si le bien-être consistait dans le beaucoup-avoir, comme si la frénésie des achats pouvait se substituer à la joie profonde du c½ur humble qui s'émerveille des dons gratuits de Dieu .

Mais comment le monde connaîtrait-il le vrai sens des fêtes et saurait-il mieux vers où il va en cette nouvelle année 2005 puisqu'il ne sait pas d'où il vient ? Qui n'a pas d'origine (dans l'Amour de Dieu) ne peut avancer vers sa fin (qui est l'amour du Père). Qui refuse la communion filiale subit le joug des modes et l'esclavage d'une liberté sans boussole.

Et nous nous étonnons que très logiquement, entraînés dans cette dérive, les enfants de ce monde se laissent marqués par les tatouages des dragons, se défigurent et s'enchaînent dans les anneaux du piercing et basculent dans les drogues ?...

GRANDEUR DU BAPTÊME

Les récentes célébrations nous ont rappelé que Dieu, en Jésus, était venu vivre parmi nous : toutefois nous ne pouvons cantonner cet événement dans un passé lointain. La foi n'est pas évocation historique, nostalgie du vieux temps mais elle est vivante lorsqu'elle est actualisée. Et ce qui rend vivant le Mystère du Christ, ce qui le rend présent et actif ce qui l'insère dans l'actualité de notre existence, c'est le BAPTÊME.

En ce dimanche qui évoque le Baptême de Jésus par Jean dans les eaux du Jourdain, nous reprenons conscience de ce que nous sommes devenus à la suite de cet acte que les premiers chrétiens appelaient "le SCEAU DE DIEU" - une marque spirituelle qui signale que nous sommes libérés de la tyrannie du mal et de la peur et que nous sommes libres. Libres pour aimer Dieu et nos frères. Re-nés.

Il faudrait que retentisse encore en ce jour le grand cri que lançait jadis à Rome le grand Pape Saint Léon :

" Ô Chrétien, reconnais ta dignité !".

Cette grandeur ne vient pas de notre statut social ni de nos diplômes ni de nos bonnes actions ni de nos habitudes rituelles : elle est cadeau gratuit, offre de la grâce.

Car le baptême n'est pas inscription dans un registre, enrégimentement dans une institution, acceptation d'un carcan dogmatique, pas plus qu'il n'est assurance magique contre les mauvais esprits ou moment de sacralisation d'une naissance.

Au baptisé, le Père proclame :

" Tu es mon fils bien-aimé : aujourd'hui je t'engendre".

Sur chaque baptisé, descend l'Esprit de Dieu qui, tel une colombe, assure que le péché est détruit et que la Paix de Dieu lui est offerte.

Chaque baptisé devient un disciple dont Jésus est le seul Maître, une brebis du troupeau dont Jésus est l'unique Berger ; un sarment dont Jésus est la Vigne ; un membre dont Jésus est le Corps ; un Temple sacré habité par l'Esprit.

VERS UNE EGLISE D ' OPTION

Nous n'ignorons pas ce qui est en train de se passer : alors que, dans nos pays occidentaux - longtemps catalogués comme "chrétiens" -, il allait presque de soi que tout nouveau-né reçoive le baptême, à présent il n'en va plus ainsi. Mais si de plus en plus d'enfants ne sont plus baptisés, on voit croître sans cesse les demandes de baptême de la part de jeunes ou d'adultes. En 2003, en France, plus de 2000 baptêmes d'adultes (dont 110 de musulmans) ont été célébrés, souvent lors de la magnifique Veillée pascale.

Les habitudes religieuses transmises par héritage ou tradition familiale font place à l'acte de foi, à la démarche consciente, à la décision personnelle. Partout des processus de formation se mettent en place : à une jeunesse qui a grandi dans l'ignorance religieuse, il s'agit d'apprendre les rudiments de la foi, les m½urs de l'Eglise, le sens du credo, la vitalité de la vie selon l'Evangile. Formidable défi qui ne peut être relevé que si les chrétiens reprennent conscience de la grandeur de leur baptême : don de la Grâce de Dieu qui appelle une réponse, qui devient une tâche, qui exige que l'on mette en pratique les dons reçus - quitte à se démarquer de l'entourage et à encaisser les critiques. Jean-Paul II écrivait récemment : " Ce serait un contresens de se contenter d'une vie médiocre. Demander à un catéchumène : " Veux-tu recevoir le baptême ?" signifie lui demander en même temps : " Veux-tu devenir saint ?" (N.M.I. § 30)

En méditant la scène du baptême de Jésus, demandons à l'Esprit - à Son Esprit - de nous investir également afin d'entreprendre sur le champ la mission reçue : construire une communauté fidèle au programme de l'Evangile et témoigner que Dieu vient régner pour le salut de l'humanité.

 

Dimanche de Pâques

Auteur: Cochinaux Philippe
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : A, B, C
Année: 2004-2005

Dites, et si le tombeau n'avait pas été vide. Vous imaginez ! Si Pierre et Jean en arrivant à cet endroit précis avaient vu Jésus en train de ranger sa chambre tombale aidé de Marie-Madeleine et des autres femmes, posant les bandelettes d'un côté, le linceul rangé à part. Si l'évangile de ce jour, nous avait dit qu'ils étaient là tous ensemble chantant, riant, exultant d'une joie que nous ne pourrions décrire. Il me semble en tout cas évident que si le tombeau avait été rempli de la présence vivante du Christ, Pierre et Jean seraient vraisemblablement fous de joie. Quant à nous, nous ne serions pas là aujourd'hui.

En effet, vous vous imaginez, si Jésus avait choisi de ressusciter et de vivre sa vie éternelle ici sur terre avec nous de manière permanente. Il serait devenu un immortel parmi les vivants. Nous aurions pu constamment le contacter pour qu'il nous aide à chaque instant à prendre les bonnes décisions. Il aurait été à nos côtés pour nous apprendre à toujours marcher dans la bonne direction. Par sa présence, plus jamais nous ne nous serions trompés. Avec lui, plus jamais nous n'aurions trébuché. Le Christ aurait été en permanence avec nous puisqu'il aurait décidé de demeurer parmi nous. Il serait alors devenu une évidence pour tout être humain. Sa réalité historique traversant les siècles n'aurait plus pu être mise en doute.

Toutefois, s'il en était vraiment ainsi, Dieu nous contraindrait de reconnaître son existence. Il serait devenu une évidence à nos yeux et à nos c½urs. Nous n'aurions plus été libres de croire ou de ne pas croire. Or, dès l'instant de la création de l'humanité, Dieu a donné mandat à l'être humain pour qu'il poursuive l'½uvre commencée, en recevant la liberté. Je ne peux donc adhérer à l'idée de Dieu qu'en toute liberté, c'est-à-dire dans la foi. Et cette liberté doit être totale. Dieu ne peut plus être une évidence. Il est essentiel que le doute puisse me traverser pour mieux partir ou repartir à sa rencontre. La liberté des enfants de Dieu est telle que nous ne pouvons Le découvrir que par la foi et non par la connaissance.

Face au mystère de la Résurrections, toutes et tous nous sommes appelés à imiter l'attitude de Jean dans le récit que nous venons d'entendre : il vit et il crut. Voir puis croire et non pas savoir puis croire. Pourquoi ? Tout simplement parce que si je sais, je ne crois plus, je sais tout simplement, j'ai quitté le champ de la croyance pour entrer dans celui de la connaissance. Il ne s'agit plus de la foi. Non, Dieu nous convie à voir, c'est-à-dire à contempler un mystère qui nous dépasse complètement. Ayant vu, je peux alors avoir le désir de croire ce qui va au-delà de toute compréhension, au-delà de tout savoir. Et ce que nous voyons et croyons en ce jour de Pâques, c'est un tombeau vide. Vide à jamais car le Fils de Dieu est ressuscité et par là, nous a fait entrer chacune et chacun dans une dimension nouvelle de notre être. Le Père nous a fait don de sa création, le Fils quant à lui nous fait entrer dans le temps de la Résurrection. D'êtres mortels que nous étions, nous sommes devenus des êtres résurrectionnels. Qu'est-ce à dire peuvent se demander certains ?

Et si c'était tout simplement l'entrée de l'humanité dans l'ère de l'éternité. Par sa mort et sa résurrection, le Christ a vaincu la mort. Dans la foi, celle-ci n'est plus qu'un simple instant que nous traversons. Il s'agit de cette infime seconde qui nous fait passer de la vie terrestre à la vie céleste. Nous sommes citoyens du monde et dans le Fils, nous devenons citoyens des Cieux. Telle est notre destinée. Dieu nous fait don de son éternité. La mort n'a plus le dernier mot. C'est tout simplement cela que nous sommes appelés à voir et à croire face à ce tombeau. Heureusement pour nous alors que ce dernier était vide, bien vide. Il annonce la promesse d'une éternité dont chacune et chacun de nous pourront faire l'expérience si nous acceptons de la recevoir en toute liberté. Il y a quelques semaines, à l'occasion de la fête de Noël, nous célébrions l'incarnation de Dieu : Dieu s'était fait homme pour que tout homme, toute femme partage un jour la vie divine. Avec l'événement de Pâques, Dieu fait de nous des êtres résurrectionnels, c'est-à-dire des êtres appelés à la plénitude de la vie. Par la résurrection du Fils, nous sommes devenus les vivants, les grands vivants de la Vie car habite en nous une espérance au-delà de toute compréhension, car vit en nous un mystère : celui de l'appel à la Vie éternelle. Amen.