3e dimanche de Pâques, année B

Auteur: Cochinaux Philippe
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : B
Année: 2011-2012

Il y a quelques jours, j'ai pu expérimenter le dicton populaire « Il n'y a pas d'âge pour apprendre ». En effet, j'ai découvert que, dans un jeu d'échec, la pièce que nous appelons en français le « fou » s'appelle « the bishop » en anglais, c'est-à-dire l'évêque. Cela m'a fait sourire intérieurement. Pour les anglais notre fou est l'évêque. Certains d'entre vous me diront peut-être : ça nous le savions déjà, notre évêque est fou puisqu'il a invité les frères dominicains à revenir sur Liège. Oui, mais de quelle folie s'agit-il ? Ne serait-ce pas plutôt de cette folie divine à laquelle toutes et tous nous sommes conviés à participer. A l'instar de l'évêque du jeu d'échecs, devenons « fous » à notre tour parce que Dieu l'est un petit peu à sa manière. Il a créé notre monde et puis, il a fait la folie de nous le confier par amour pour ses créatures. Lorsque le moment fut venu, Il a envoyé son Fils parmi et a accepté qu'il meurt sur la folie du bois de la Croix. Il l'a ensuite ressuscité et heureux sommes-nous alors de pouvoir vivre ce merveilleux temps pascal qui nous illumine de la lumière de sa résurrection. Il y a donc une forme de folie en Dieu mais cette folie-là, elle est fondamentale, voire existentielle. La folie en Dieu nous permet de ne pas nous enfermer en nous-mêmes, de veiller à toujours chercher les signes de l'Esprit Saint à l'½uvre dans notre monde. Elle est cette force vectrice qui nous pousse à vivre de l'Evangile. Les Ecritures ne sont pas des peaux mortes, elles sont le c½ur même de la Vie lorsque nous prenons le temps de les méditer. Elles nous parlent et c'est la raison pour laquelle, tout comme avec ses disciples, le Christ nous ouvre à l'intelligence de celles-ci. La Bible n'est donc pas un livre posé dans une bibliothèque. Elle nous met debout pour que nous puissions nous mettre en marche sur la route de nos vies. C'est pourquoi, il est fondamental que nous croyions à la folie en Dieu. Soyons contagieux de cette dernière. Comment ? En commençant tout simplement par recevoir cette paix que le Christ nous offre : « La paix soit avec vous ». La paix du Christ est bien plus qu'un geste mondain. Elle est une invitation à nous apaiser, c'est-à-dire à être en paix avec nous-mêmes. Dieu nous offre l'apaisement. Il sait de quoi nous sommes façonnés. Nous sommes toujours un peu comme un iceberg par rapport à nous. Il y a la partie émergée que nous connaissons bien. Avec le temps de l'introspection, il y a ce que nous voyons sous le niveau de notre eau intérieure et puis, il y a toute cette partie immergée en nous que nous ne connaissons pas, notre inconscient. Ce dernier nous rappelle que nous sommes faits d'ombres et de lumière. Mieux encore que nous ne sommes jamais totalement transparent car il y a en chacune et chacun de nous une grande part de mystère. Aucun être humain n'est une équation qui peut se résoudre, nous sommes des êtres dotés de mystères. Et le Christ vient nous donner sa paix, c'est-à-dire de vivre en paix par rapport à nous-mêmes, de devenir des êtres tellement apaisés qu'ils en sont devenus apaisants. En d'autres termes, la paix du Christ que nous nous offrons est un merveilleux cadeau où nous disons à la personne à qui nous nous adressons : « sois apaisée, pars à la rencontre du meilleur de toi-même. Il y a en toi, comme en chacune et chacun de nous, quelque chose d'unique et de merveilleux. Même si tout n'est pas toujours rose et que tu as pu peut-être une fois ou l'autre trébucher, en te souhaitant la paix du Christ, je te dis : relève-toi, apaise-toi et ajuste-toi à la volonté divine ». La paix de Dieu nous ouvre ainsi vers un chemin de liberté profonde car nous vivons avec cette conviction que Dieu est en nous. Comme les disciples d'Emmaüs, il marche à nos côtés et nous le retrouvons lors de la fraction du pain à la table eucharistique mais aussi lors de la fraction fraternelle. La fraction fraternelle est cet instant où je reconnais en l'être humain devant qui je me trouve que nous sommes façonnés de la même manière. Lui et moi, nous sommes images de Dieu ou encore, comme le dirait Maggy Barankitsé, cette femme burundaise exceptionnelle, nous appartenons à la même ethnie, celle des enfants de Dieu. C'est pourquoi, il est plus nécessaire que jamais, en ce temps vers la Pentecôte, de nous laisser contaminer par cette folie en Dieu car celle-ci nous apportera la paix du Christ pour l'éternité. Amen.

3e dimanche de Pâques, année B

Auteur: Devillers Raphaël
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : B
Année: 2011-2012

D'après des enquêtes, un certain nombre de catholiques pratiquants avouent ne pas croire à la Résurrection de Jésus. Faut-il s'en étonner ? Les évangélistes reconnaissent que les premiers disciples eux-mêmes ont eu beaucoup de mal à entrer dans cette foi, à accueillir vivant celui dont ils étaient persuadés qu'il était bien mort en croix et enseveli au Golgotha. Ainsi nous dit aujourd'hui saint Luc. Les disciples qui rentraient d'Emmaüs racontaient aux 11 Apôtres et à leur compagnons ce qui s'était passé sur la route et comment ils avaient reconnu le Seigneur quand il avait rompu le pain. Comme ils en parlaient encore, lui-même était là au milieu d'eux et il leur dit : « La Paix avec vous ». Frappés de stupeur et de crainte, ils croyaient voir un esprit. Jésus leur dit : « Pourquoi êtes-vous bouleversés ? Et pourquoi ces pensées qui surgissent en vous ? Voyez mes mains et mes pieds : c'est bien moi ! Touchez-moi, regardez : un esprit n'a pas de chair ni d'os et vous constatez que j'en ai ». Après cette parole, il leur montra ses mains et ses pieds. Dans leur joie, ils n'osaient pas encore y croire et ils restaient saisis d'étonnement. Jésus leur dit : « Avez-vous ici quelque chose à manger ? ». Ils lui offrirent un morceau de poisson grillé. Il le prit et le mangea devant eux... » On est en pleine nuit à Jérusalem, dans la semaine pascale. Quelque part dans une maison, Cléophas et son ami, de retour d'Emmaüs, viennent de débouler dans la communauté où on leur a appris que Jésus est apparu à Pierre et eux-mêmes de raconter ce qu'ils viennent de vivre. L'effervescence est à son comble dans le groupe : vrai ou pas vrai ? hallucination ? fantôme ?... On est loin de l'image tracée par des auteurs incroyants où l'Eglise aurait pertinemment inventé « le truc » de la résurrection du Christ afin de prolonger son action et étendre son pouvoir. Au contraire, à l'origine, il y a eu débat, choc des affirmations et des négations. C'est dans une communauté déchirée que subitement JESUS EST LA AU MILIEU D'EUX...et même alors certains restent incrédules. Beaucoup voudraient une Eglise unanime où règne l'accord parfait, et ils taxent de péché le moindre doute, la moindre altercation. Or les débats manifestent que personne ne possède la vérité, qu'elle doit se chercher ensemble, à travers nos différences, que l'Esprit vient lorsque nos esprits s'entrechoquent sans anathèmes. Alors la communauté croyante expérimente que nul n'est centre - ni le prêtre ni le Vatican, ni le théologien ni le catéchisme, ni un saint ni une dévotion !

Seul LE CHRIST VIVANT EST « AU MILIEU ». Luc insiste: le Ressuscité n'est ni une hallucination, ni une projection, ni un esprit et il va même jusqu'à montrer Jésus en train de manger devant les siens (ce qu'il est le seul à oser dire !). Composition de Luc, dit l'exégète D. Marguerat. Dans le milieu grec où il travaille avec s. Paul, il eût été tellement plus facile d'affirmer que l'âme de Jésus, enfin débarrassée de son corps, était au ciel (cf. Paul accablé de sarcasmes lorsqu'il parle de résurrection aux philosophes d'Athènes : Ac 17, 32). Mais la résurrection concerne l'être humain tout entier car la matérialité corporelle n'est pas une tare, un obstacle. La puissance divine est capable de la transfigurer. A-t-on jamais exalté à ce point l'honneur de notre corps ?

RELIRE LES ECRITURES

Puis Jésus déclara : « Rappelez-vous les paroles que je vous ai dites quand j'étais encore avec vous : il fallait que s'accomplisse tout ce qui a été écrit de moi dans la Loi de Moïse, les Prophètes et les Psaumes ». Alors il leur ouvrit l'esprit à l'intelligence des Ecritures. Jésus n'éclate pas en colère pas plus qu'il ne les invite à aller constater que le tombeau était vide. Pour accepter la Résurrection, il n'y a qu'un chemin : reparcourir le chemin des Ecritures. Tous les récits évangéliques ont montré l'ambiguïté des succès de Jésus : on l'acclamait pour ses guérisons miraculeuses, on le voyait comme Messie puissant qui allait enfin libérer Israël de l'occupant romain puisque bien des pages bibliques portaient l'espoir d'un Messie victorieux, d'un Israël puissant. Tant de fois, dit Jésus, j'ai essayé d'attirer votre attention sur d'autres pages des Ecritures (cf. 9,22 ; 9,44 ; 12,50 ; 13,33 ; 17,25 ; 18,31 ; 20,13 ; 22,32...) mais vous ne compreniez jamais, vous ne vouliez pas comprendre. Le temps pascal est donc la période où nous avons à lire et relire le Premier Testament. Parce qu'on le disait « ancien », on a jugé qu'il était dépassé, ringard : grossière erreur ! Le pasteur martyr D. Bonhoeffer disait que nul n'a le droit de lire l'Evangile s'il ne connaît pas au préalable la Bible. Il faut demander au Christ et à son Esprit de nous « ouvrir à l'intelligence des Ecritures ». Et notamment lire les « Actes des Apôtres » où l'on voit le travail des premiers chrétiens s'acharnant à découvrir qu'effectivement les Ecritures lues à la synagogue annonçaient un Messie glorieux par la souffrance : PSAUME 16 : « Ma chair reposera dans la confiance car tu n'abandonneras pas ma vie au séjour des morts ; Seigneur, tu ne laisseras pas ton Saint connaître la décomposition » (= Ac 2, 26) DEUTERONOME 18, 15 : « Le Seigneur suscitera pour vous, d'entre vos frères, un prophète tel que moi, Moïse ; vous l'écouterez ;.. » (= Ac 3, 22) ISAÏE 53 : Le Christ a souffert pour vous, vous laissant un exemple... Lui qui n'a pas commis de péché et dans sa bouche, il ne s'est pas trouvé de tromperie ; insulté, il ne rendait pas l'insulte...Dans son corps, il a porté nos péchés sur le bois afin que morts à nos péchés, nous vivions pour la justice, lui dont les meurtrissures vous ont guéris » (célèbre page du Serviteur souffrant = 1 Pierre 2, 21-25). Jésus conclut : « C'est bien ce qui était annoncé par l'Ecriture : les souffrances du Messie, sa résurrection d'entre les morts le 3ème jour, et la conversion proclamée en son nom pour le pardon des péchés, à toutes les nations, en commençant par Jérusalem. C'est vous qui en êtes les témoins. (Ajouter la phrase suivante, omise curieusement dans le lectionnaire :) Je vais envoyer sur vous ce que mon Père a promis... » La Pâque est radicalement accomplie par Jésus : tout est achevé en principe. Mais il n'y a pas là un fait à savoir ni un dogme à connaître. Son annonce et son accueil visent à changer l'humanité, à l'accomplir dans la paix de Dieu. S'ils croient en Jésus « le Crucifié-Ressuscité », les hommes sont libérés de la prison du péché et deviennent citoyens du Royaume : cette grâce ultime est à proclamer sans cesse et partout. Pour cela une chose est absolument nécessaire : recevoir une force divine car la mission est bien davantage que bonne volonté, gentillesse, dynamisme humain, esprit d'entreprise. C'est pourquoi Jésus termine par la promesse du don de l'Esprit-Saint qui, pour Luc, sera offert à la Pentecôte et ouvrira le récit admirable des « Actes des Apôtres » : on y voit comment des hommes et des femmes, faibles et sans moyens, ont pu en quelques années seulement rayonner dans toutes les directions, joyeux et capables désormais d'affronter les dangers et la mort. Il fallait « témoigner » : le dire et le montrer.

CONCLUSION

La Tradition a souligné toujours davantage la valeur du carême ; des 1 ou 2 jours primitifs, la période de pénitence et de jeûne s'est allongée jusqu'à la quarantaine. Mais s'il est bon de se préparer à Pâques, il est bien plus essentiel d'accueillir en nous le don de la Vie. La durée liturgique parle : si le carême dure 40 jours, le temps pascal s'étend sur 7 semaines, 50 jours ! Plus que de faire (des sacrifices), il vaut mieux recevoir (le don de l'Esprit). Que signifie vraiment pour moi, la foi en Jésus ressuscité ? - Le Ressuscité occupe-t-il réellement le centre, « le milieu » de notre communauté ? - Notre paroisse est-elle heureuse de se réunir pour débattre des idées de chacun, pour affiner sa foi ? - Prions-nous vraiment afin de recevoir l'Esprit...ou plutôt pour que l'Esprit-Saint donné à Pâques transforme nos c½urs et nous engage à remplir notre mission ? - Travaillons-nous à connaître les livres de la Première Alliance ? Sommes-nous frappés par la cohérence des étapes successives du projet de Dieu ?

3e dimanche de Pâques, année B

Auteur: Sélis Claude
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : B
Année: 2011-2012

 

Les disciples revenant d'Emmaüs « racontent aux autres ce qui s'était passé sur la route et comment ils avaient reconnu le Seigneur à la fraction du pain ». Ces disciples inauguraient ainsi une longue tradition de foi. Le chrétien de nos jours est lui aussi invité « à raconter les événements », les événements fondateurs de la foi chrétienne, ainsi que sa propre expérience de foi. Le récit semble aussi le moyen le plus approprié pour « dire la foi », bien plus que le traité philosophico-théologique. Car un récit ne prétend jamais tout dire. Le récit ne prétend pas démontrer. Il invite le lecteur ou l'auditeur à s'investir, à s'identifier à un rôle, à plusieurs rôles. Il lui fait revivre une situation. Il donne à penser. Il attend d'être retransmis. Là où un tel type de transmission a lieu, le Christ peut, plus facilement, prendre lui-même une place.

La foi a aussi quelque affinité avec l'étonnement et la joie. La stupeur et la crainte (la première réaction des disciples) sont surtout des signes de manque de foi. Le scepticisme a sa place dans la vie du disciple (comme nous le rappelait l'évangile de dimanche dernier avec le personnage de Thomas) mais le scepticisme est toujours triste et souvent stérile. Il est la négation de l'esprit de l'enfant. Celui-ci naît de l'étonnement et est, il est vrai, crédule en son premier élan. Ce premier élan, sans lequel rien n'est possible, doit pouvoir se transformer en solide confiance. Voilà pourquoi il est aussi tellement important de ne pas tromper ce premier mouvement, sous peine de former beaucoup de sceptiques. Sans renier le moment critique (auquel beaucoup s'arrête car cela a son confort aussi), puissions-nous retrouver le sens de l'étonnement et de la joie d'apprendre la Bonne Nouvelle.

Jésus se prête au même procédé de vérification que pour Thomas dans l'évangile de Jean et, comme pour lever un doute encore subsistant, il propose de prendre de la nourriture, un poisson. Cet aliment n'est pas, ici, anodin. En effet, « poisson » se dit en grec « ichtus » et, dans ce mot, chaque lettre est l'initiale d'un autre mot. La signification de l'ensemble donne : « Jésus, Christ, Fils de Dieu, Sauveur »...une authentique confession de foi, la première et la plus courte, la plus utilisée dans les communautés chrétiennes primitives. Le pain et le vin, c'était le Christ de la Passion. Le poisson, c'est le Christ de la Résurrection. Et c'est bien sûr le même !

La communauté chrétienne, cette belle communauté qui avait pourtant compris que le Christ était venu et avait souffert « pour enlever le péché du monde », voilà que Jean dans son épître doit leur rappeler « d'éviter le péché » ! Ces chrétiens croyaient peut-être que le sacrifice du Christ avait ôté le péché du monde comme on enlève un paquet tout ficelé, en un coup, par un acte magique. Jean corrige : c'est en gardant ses commandements au jour le jour que nous connaîtrons Dieu, que nous rentrerons intimement et de plus en plus dans l'amour de Dieu, jusqu'à la perfection.

Quel est notre péché, le dernier en date, le plus grave ? De l'avoir rejeté, Lui, le Saint, le Juste, répond Pierre dans les Actes. En la circonstance, il s'adressait à « quelques hommes d'Israël » mais c'est bien sûr à nous tous que cela s'adresse. Combien de fois, dans les 1001 actes de la vie courante ou, plus gravement, dans certains actes plus importants de notre vie, nous n'optons pas, de facto, pour ce qui sème la mort plutôt que pour Celui qui est la Vie ?

Chaque fois qu'Il se rend présent au milieu de nous, au lieu d'être frappé de stupeur, d'incrédulité ou enclin au rejet, puissions-nous L'accueillir avec joie et avec cet étonnement qui nous fera progresser dans la foi.

 

2e dimanche de Pâques, année B

Auteur: Henne Philippe
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : B
Année: 2011-2012

Nous sommes tous un peu comme saint Thomas.  Nous avons tous besoin de preuves d'amour et d'amitié.  Combien de fois n'entendons-nous pas une femme se plaindre parce que, depuis des années, son mari ne lui a plus dit : « je t'aime » ? Et nous, les hommes, si forts et si durs, combien de fois ne regrettons-nous pas qu'il n'y ait pas eu un geste d'amitié ou de gentillesse pendant cette journée ? Tus nous avons besoin de signes, de preuve.  On a beau se dire : Dieu nous aime.  On a besoin de signes concrets.

Parfois même nous provoquons notre partenaire.  Saint Thomas veut mettre son doigt dans les plaies du Christ, là où cela fait le plus mal.  Parfois, avec une cruauté tout enfantine, nous provoquons l'autre pour voir jusqu'où ira sa patience, jusqu'où ira son amour pour nous.  Comme des enfants difficiles ou des vieillards séniles, nous faisons parfois des choses de travers.  Oh ! Rien de bien grave, mais de petites maladresses pour attirer l'attention de l'autre sur nous, pour lui rappeler que l'on existe.  Ou bien, au contraire, on se lance dans de vifs reproches parce que l'autre ne fait pas assez attention à nous, parce que l'autre n'en fait pas assez pour nous.  Combien de fois ne sommes-nous pas révoltés contre Dieu à cause de tous les malheurs sur la terre, à cause d'une grave maladie ou d'un triste divorce ? Combien de fois ne sommes-nous pas prêts à traîner Dieu devant un tribunal pour qu'il s'explique, pour qu'il explique pourquoi il y a tant de malheurs sur la terre ?

Et Dieu nous a donné la vie.  Et Dieu est mort par amour pour nous.  Nous sommes souvent comme des enfants gâtés et jamais satisfaits.  Dieu nous a donné la vie.  Dieu nous a donné la chance de pouvoir le connaître.  Et Dieu prend patience avec chacun d'entre nous.  il aurait pu rayer Thomas de la liste des apôtres et le chasser pour manque de foi et de confiance.  Mais Dieu fait les caprices de Thomas : il lui montre ses plaies.  Et Dieu subit nos caprices, nos demandes toujours plus exigeantes alors qu'il est mort sur la croix par amour pour nous, alors qu'il meurt aujourd'hui dans la solitude de personnes âgées ou de grands malades isolés, alors qu'il meurt de tristesse dans notre propre famille, dans notre propre communauté paroissiale parce que plus personne ne lui parle, plus personne ne l'écoute.  Après avoir célébré la Pâque et après avoir à nouveau découvert l'immensité de l'amour de Dieu pour nous, quittons un instant le rôle d'enfant gâté et difficile comme Thomas qui exige encore et toujours des signes et des preuves supplémentaires et tâchons un instant de donner aux autres un tout petit peu de ce que Dieu nous a donné en abondance, son amour, son amitié.

2e dimanche de Pâques, année B

Auteur: Devillers Raphaël
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : B
Année: 2011-2012

LA RESURRECTION, C'EST DIMANCHE

Pendant les siècles bibliques, apparurent régulièrement des envoyés de Dieu, prophètes et sages, qui rappelaient la grandeur de la Loi divine, dénonçaient les déviances, appelaient le peuple à la conversion. Et lorsque ces grandes figures disparaissaient, leurs disciples éperdus de chagrin entretenaient leur mémoire en vénérant leur tombe et en copiant leurs enseignements afin de les transmettre à Israël. Ainsi en alla-t-il pour Elie, Isaïe, Jérémie, Esdras, Jean-Baptiste et tant d'autres. Mais lorsque Jésus de Nazareth disparut, ses disciples ne montrèrent nulle détresse, n'organisèrent pas de pèlerinage sur sa tombe, ne mirent pas par écrit ses enseignements (les évangiles furent rédigés par les générations suivantes). Remplis d'allégresse et gazouillant des alléluias, ils ne voulaient qu'une seule chose : d'urgence proclamer que Jésus était vivant, Seigneur ressuscité. Cette mission, il fallait l'accomplir quoi qu'il en coûte (ils firent rapidement l'expérience des sarcasmes, des rires, des critiques, des rages, des coups, des prisons) et cela non seulement près de leurs compatriotes juifs mais dans le monde entier. L'Evangile n'est pas d'abord une morale ni un texte, assuraient-il, il est une Personne vivante et ils appelaient leurs auditoires à leur faire confiance et à CROIRE. Saint Jean nous raconte aujourd'hui comment ces hommes ont été transfigurés : « Après la mort de Jésus, le soir du 1er jour de la semaine, les disciples avaient verrouillé les portes du lieu où ils étaient car ils avaient peur des Juifs. JESUS VINT, il était là au milieu d'eux. « La paix avec vous » dit-il et il leur montra ses mains et son côté. Les disciples furent remplis de joie. Il leur dit à nouveau : « La paix avec vous ! De même que le Père m'a envoyé, moi aussi je vous envoie ». Il souffla sur eux et dit : « Recevez l'Esprit-Saint. Tout homme à qui vous remettrez ses péchés, ils lui seront remis ; à qui vous maintiendrez ses péchés, ils lui seront maintenus ». Ces hommes étaient enfermés, non tant par les verrous des portes que par leur peur (les Autorités ne vont-elles pas pourchasser les disciples du condamné ?) et par leur remords (en dépit de nos promesses, nous avons lâchement abandonné notre maître !). Cependant Jésus les rejoint dans leur enfermement car plus rien ne peut arrêter le Vivant : sans reproche ni condamnation il leur donne sa paix en en montrant la source : ses plaies. La croix est pardon et réconciliation. Dans son langage imagé, la Genèse racontait que le Créateur avait soufflé sur l'effigie de l'homme fait de poussière pour le dresser en être vivant et debout (Genèse 2, 7) : à présent le Ressuscité souffle l'Esprit pour le recréer Saint Jean joint ainsi de la façon la plus étroite la mort de Jésus (les plaies), sa résurrection, la paix de la communauté croyante, le don de l'Esprit et la mission universelle. Croix et Gloire de Jésus, Pâques et Pentecôte, résurrection corporelle de Jésus et résurrection spirituelle des croyants, sont les facettes du mystère de Pâques. Et cette re-création se poursuivra jusqu'aux extrémités du monde par l'action des disciples. « Comme le Père m'a envoyé, je vous envoie ». La mission n'est donc pas un commandement auquel il faut bien obéir, le prosélytisme agressif d'une Eglise en quête de membres, la charge de certains qui s'expatrient : elle est l'unique élan de Vie qui se transmet du Père au Fils et du Fils aux hommes. Dès qu'une flamme est allumée, elle rayonne : dès que naît l'Eglise, elle est porteuse de lumière du Christ pour les hommes.

VOIR POUR CROIRE OU CROIRE POUR VOIR ?

Tout cela est très beau, dira-t-on, et les premiers apôtres ont eu bien de la chance de voir Jésus ressuscité. Mais nous qui n'avons rien vu ? Jean connaît l'objection et il y répond par l'histoire de Thomas. L'un des Douze, Thomas (ce nom signifie « jumeau ») n'était pas avec eux quand Jésus était venu. Les autres lui disaient : « Nous avons vu le Seigneur ». Il déclare : « Si je ne vois pas dans ses mains la marque des clous, si je ne mets pas mon doigt à l'endroit des clous, si je ne mets la main dans son côté, non, je ne croirai pas ». « Huit jours plus tard, les disciples se trouvaient à nouveau dans la maison et Thomas était avec eux. JESUS VIENT, alors que les portes étaient verrouillées, il était là au milieu d'eux. « La paix avec vous ». Et il dit à Thomas : « Avance ton doigt et vois mes mains ; avance ta main et mets-la dans mon côté ; cesse d'être incrédule, sois croyant ». Thomas lui dit alors : » MON SEIGNEUR ET MON DIEU ». Jésus lui dit : « Parce que tu as vu, tu crois. HEUREUX ceux qui croient sans avoir vu » Thomas est bien notre semblable, le prototype du sceptique : que Jésus soit ressuscité, c'est tellement formidable, tellement invraisemblable, qu'il ne peut y croire. Et ses amis, les plus grands des apôtres, ont beau asséner leur certitude, multiplier les affirmations, concorder dans leurs témoignages, les jours passent et Thomas ne se rend pas. Comment parvenir à croire ? Non en exigeant une apparition, un miracle, une preuve immédiate, mais en acceptant de rejoindre la communauté croyante « 8 jours après ». Nous apprenons donc une chose essentielle : très vite les disciples de Jésus ont pris l'habitude de se réunir « le 1er jour de la semaine ». Dans une lettre qui date de l'an 56, saint Paul nous dit que les premiers chrétiens se réunissaient « le 1er jour de chaque semaine » (1 Cor 16, 2) ; saint Luc témoigne que « le 1er jour de la semaine, nous étions réunis pour rompre le Pain » (Ac 20, 7) : Jean notera qu'il a reçu ses visions de l'Apocalypse parce qu'il avait « été saisi par l'Esprit au jour du Seigneur » (Apo 1, 10). La « vision du Christ ressuscité », le mystère de Pâques n'est pas une faveur extorquée, un privilège individuel : le moyen normal d'y accéder, c'est de rejoindre humblement la communauté croyante, celle qui subsiste encore aujourd'hui parce qu'elle accepte le témoignage digne de foi des premiers disciples et réitère leur pratique hebdomadaire. La foi chrétienne n'est donc pas une croyance privée et secrète ni une existence parfaitement conforme aux enseignements de Jésus ni une vague spiritualité éthérée ni une adhésion à des valeurs philanthropiques. Elle est création par l'Esprit d'une communauté dont la vie bat au rythme du dimanche. Nos calendriers se trompent qui renvoient le dimanche en fin de semaine. Il faut lui rendre sa place de premier jour où les chrétiens sortent de leur vie privée (privée des autres) pour se réunir ensemble dans un même lieu. Ils expérimentent que leur centre n'est ni un espace sacré, ni un pontife solennel, ni une idéologie mais JESUS VIVANT qui vient « au milieu d'eux ». Ils l'accueillent dans sa Passion offerte pour eux : « Ceci est mon corps... ceci est mon sang... ». De ce fait, ils sont comblés de sa Paix et envahis par la JOIE (« En voyant Jésus ils furent remplis de joie »). Le Vent de Dieu, son Elan dynamique, son Amour, son Esprit souffle sur eux pour chasser leurs peurs et leurs remords et il les envoie communiquer cette Bonne Nouvelle. Forts de cette rencontre - qui est en même temps celle du Christ et celle des frères et s½urs dans la foi -, les disciples peuvent se disperser, retrouver leur environnement de semaine. Le dimanche reste pour eux la source du courage dans leurs engagements, de l'affection dans leurs relations, de l'espérance dans leurs entreprises et leurs projets. En ces dernières années, nos assemblées dominicales ont fondu ; combien de baptisés disent : « Je crois mais ne pratique pas » ? La situation nous interpelle : sommes-nous convaincus, comme Pierre et Jean, que Barthélemy devrait revenir ? Que Jésus ressuscité est apparent dans le corps entier de l'Eglise avec tous ses membres ? Comment préparer la rencontre, comment participer, comment célébrer ensemble la gloire du Christ qui apparaît dans une assemblée pleine de joie et chargée du pardon universel ?

2e dimanche de Pâques, année B

Auteur: Sélis Claude
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : B
Année: 2011-2012

Il y a huit jours, dans une grande envolée de cloches et d'alleluia, l'Eglise a proclamé la grande nouvelle : Christ est ressuscité ! Pas plus que dans les siècles précédents, ce message n'a entraîné l'adhésion unanime des foules. Nombreux sont ceux qui, tout au long de l'histoire (occidentale spécialement), sont restés sceptiques, incrédules, exigeant des preuves.

Dans la dernière page de son évangile, Jean fait droit à cette attitude en mettant en scène Thomas l'incrédule, dont nous sommes sans doute tous plus ou moins le juneau. Accepter que Jésus est ressuscité est en effet un tel défi à la raison raisonnante, cela implique un tel retournement d'existence, que l'on ne peut s'engager que de manière personnelle, après mûre réflexion et avec de bonnes raisons. Thomas l'incrédule nous apprend à n'être pas trop vite crédule. La foi chrétienne n'est pas un acte naïf ni un acquis sociologique.

D'aucuns souhaiteraient peut-être que le Christ reproduise pour eux son geste vis-à-vis de Thomas. Au fait, n'aurait-il pas institué les signes de son nouveau type de présence de Christ Ressuscité ? L'assemblée eucharistique n'est-elle pas ce signe ? Cette page d'évangile nous donne quelques indications sur le sens de celle-ci.

Le premier message du Christ Ressuscité est « paix à vous ». Le Christ Ressuscité est un Christ qui apporte la paix, une paix profonde. Le mot « shalom » de l'hébreu biblique ne relève pas d'abord du vocabulaire politique ou militaire. Il évoque les idées d'accomplissement, d'apaisement intérieur, d'équilibre des choses. Le Christ, par son souhait, ne nous apporte pas l'absence de conflit ; il veut nous apporter cette assurance intérieure qui devrait nous débarrasser de toute peur, de toute crainte d'éléments extérieurs. Il n'est plus nécessaire de verrouiller les portes.

Au contraire, et c'est une seconde indication, le Christ invite l'assemblée à partir en mission : « de même que le Père m'a envoyé, moi aussi je vous envoie ». Bien plus que de l'exécution d'une mission particulière, il s'agit d'une responsabilité fondatrice de l'assemblée : être-Christ-pour-le-monde, apporter à notre tour cette présence de paix, profonde et intérieure, du Christ Ressuscité.

Pour accomplir la mission qui lui est confiée, l'assemblée (l'Eglise) reçoit l'Esprit qui l'institue, pourrait-on dire, juridiquement. Dans l'allusion au pouvoir de remettre les péchés, on peut identifier un problème grave aux origines de l'Eglise : celui des convertis qui reniaient le Christ dès les premières intimidations des autorités publiques. D'avance le Christ nous donne ce pouvoir énorme de refaire le lien à l'Eglise qu'il a instituée.

En insistant, d'autre part, sur la réalité physique des plaies de Jésus, l'évangéliste répond à une autre polémique ancienne : le docétisme. Dans un monde culturel influencé soit par le dualisme grec, soit par le dualisme mésopotamien, le Christ ne pouvait être qu'un homme ou qu'un dieu. S'il était dieu, il ne pouvait avoir souffert comme un homme. Face à cela, l'enjeu de la foi chrétienne était de soutenir que le Christ-Dieu avait pleinement assumé la condition humaine, condition nécessaire pour la sauver pleinement. D'où l'insistance sur l'identité entre le Crucifié et le Ressuscité.

« Nous avons vu le Seigneur », tel était le cri d'émerveillement des disciples. Tel devrait être le cri d'émerveillement de tous ceux qui, de nos jours, regardent de l'extérieur les assemblées de chrétiens. Et certes, si nous correspondions à l'image qu'en suggère l'épître de Jean ou les Actes, tous les Thomas parmi nos contemporains verraient alors de leurs propres yeux la fécondité de la victoire du Christ sur le mal. La question est lancée à nos communautés comme un défi : que donnons-nous à voir ?

Dimanche de Pâques

Auteur: Croonenberghs Didier
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : A, B, C
Année: 2011-2012

Je n'apprendrai rien aux amateurs de mode que vous êtes qu'il y a un mot de plus en plus utilisé de nos jours, surtout dans la presse people. C'est un mot que l'on trouve dans tous ces magasines très intéressants ?que nous lisons d'un oeil distrait dans les salles d'attente... C'est le mot vintage. On parle volontiers aujourd'hui ?de tendance vintage, de mode vintage, de culture vintage !
A l'origine, ce terme anglais s'appliquait uniquement aux vieux vins et aux vieux whiskies... Peut-être avez vous pris ce midi un Porto Vintage, un Porto de 15 ans d'âge avec morceau de Stilton.

Alors, qu'est-ce que le vintage? C'est tout simplement une tendance qui veut conserver ?et mettre à la mode du vieux,
qui veut remettre des choses passées au goût du jour. Une mode qui veut donner une seconde vie à des choses passées...
à des pièces anciennes, à des pièces d'exception, qui ont une «âme»... ?Bref, c'est la culture de la seconde vie !
Il n'est pas innocent que notre culture occidentale --qui a si peur de la mort-- ait inventé cette culture vintage de conservation.

Mais si vous voulez passer à côté du sens de la résurrection que nous propose les Evangiles, appliquez-y le terme deuxième vie.
Le christianisme n'est pas un CRU classé et millésimé, qui conserverait du vieux. La resurrection n'est pas un retour, elle est aux antipodes de cette culture qui veut faire revenir de l'ancien. La résurrection n'est pas le retour du même, du vieux ou de l'identique. C'est la traversée de la mort... c'est-à-dire l'arrivée de quelque chose de NEUF !

C'est à cette destinée-là que nous appelle le souffle de Pâques !? Toutes et tous, nous sommes appelés à vivre l'avenèment du NEUF dans nos vies, c'est à dire à sortir de nos tombeaux et de nos peurs, pour faire déjà l'exprience de cette vie divine, cette vie non pas immortelle, mais éternelle à laquelle nous sommes destinés et qui nous amène toujours du NEUF.

Jamais, pour parler de la résurrection de Jésus, les Evangiles n'utilisent le terme de seconde vie (anabio, ou anabiosis).  Jamais les évangiles ne parlent d'une seconde vie de Jésus. La resurrection n'est pas un retour à ce qui a été, comme un passé heureux qui referait surface. ?La résurrection dans nos vies, c'est l'arrivée d'un horizon nouveau, ?d'une ouverture, d'un avènement, d'un inattendu.

Et c'est pourquoi, ce que nous fêtons aujourd'hui ?dépasse tout ce que nous pouvons imaginer. ?Aucun mot n'est à même d'exprimer adéquatement ce qui dépasse par définition tous les mots. Les mots sont toujours trop étroits pour dire l'indicible.
Les premiers Chrétiens, pour exprimer leur foi en la résurrection, ont d'ailleurs utilisé une multitude de mots : gloire, exaltation, réveil... ?Un théologien belge, pour parler de la résurrection, parle de «réveillance».

Ce mot a quelque chose de beau et de métaphorique, ce qui est toujours précieux quand on se risque à exprimer l'inexprimable. ?Réveillance, car il y a de la mort et du sommeil dans nos vies. ?Il y a de la lassitude, de l'endormissement, de l'insensibilité presque,
Il y a un potentiel de vie qui sommeille et n'arrive pas à bourgeonner,
Il y a quelque chose d'hivernal qui n'arrive pas éclore.
Nos pouvons parfois éprouver, au fond de nous, ce sommeil-là, cet endormissement qui nous tient coupé de la Vie et du réel et des autres.? La réveillance nous éveille à l'espérance. ?Elle nous invite à nous mettre debout, à quitter nos peurs et nos cauchemards existentiels pour quitter nos tombeaux, nous diriger vers du NEUF et pas  reproduire par nostalgie ce qui a été fait, à quitter nos peurs et nos tombeaux !

En grec, les mots tombeaux et peur sont homonymes. C'est le même mot : taphos. La résurrection nous invite donc à la victoire sur nos morts et sur nos peurs.  Mais pour cela, il faut avoir la capacité, comme Pierre dans l'Evangile, d'entrer dans nos tombeaux, d'entrer dans nos lieux de peurs, dans nos morts intérieures, dans ce qui a été blessé, dans NOS lieux d'enfermement, pour y entendre une voix.

Entendre une voix nous dire que la joie de Pâques nous précède et que, si nous suivons le ressuscité, nos peurs seront vides, nos tombes seront vides, et nous serons vidés de nos peurs.

Que cette joie de Pâques vous accompagne ! Amen.

Dimanche de Pâques

Auteur: Henne Philippe
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : A, B, C
Année: 2011-2012

Elle est là, écrasée par le chagrin.  Elle n'arrive même plus à crier.  Le chagrin est trop gros.  Il pèse, trop lourd sur son c½ur.  Et pourtant elle ne reconnaît pas Jésus qui lui parle.  Elle avait pourtant passé tant de temps avec lui.  Mais elle a trop de larmes dans les yeux.  Elle ne peut plus rien voir autour d'elle.  Nous sommes parfois dans cet état, tellement ensevelis dans le chagrin et le désespoir que nous ne voyons plus la main qui se tend pour nous aider, le regard inquiet de nos proches, le souci qui ronge le conjoint ou le confrère.  Il y a des moments, des jours, des semaines pendant lesquels nous sommes comme des adolescents révoltés, tellement remplis de notre chagrin ou de notre révolte que nous ne pouvons même plus recevoir les marques d'amour de notre entourage, de notre Dieu.

Mais il y a peut-être aussi une autre leçon à tirer de cet Evangile.  Marie ne reconnaît pas Jésus.  Et pourtant, cela fait des semaines qu'elle est avec lui sur les routes de Palestine.  Cela fait des semaines et des mois qu'elle l'écoute, qu'elle le regarde. Elle pourrait le reconnaître dans une foule épaisse et compacte.  Et pourtant elle ne le reconnaît pas alors qu'ils sont là, tous les deux, dans le jardin.  C'est que Marie, comme chacun d'entre nous, a son image de Jésus.  Elle croit le connaître, mais elle n'en connaît qu'un aspect.  Oh ! Cet aspect n'est pas faux, mais c'est un aspect, partiel, incomplet.  Combien de fois ne sommes-nous pas étonnés par la réaction de notre conjoint, de notre confrère ? Nous pensions lui faire plaisir et voilà qu'il explose de colère.  Nous croyons bien faire et nous avons été maladroits.  Chaque être humain, comme ce petit enfant qui va être baptisé, est beaucoup plus riche, beaucoup plus complexe que nous pourrions l'imaginer.  Jamais nous ne pourrons le saisir. Jamais nous ne pourrons le tenir.  « Ne me touche pas ! », dit Jésus.

Que nous reste-t-il alors ? Il nous reste le bonheur de l'avoir rencontré, la joie de pouvoir l'annoncer, l'espoir de pouvoir l'approcher à nouveau afin de vivre auprès de lui pour l'éternité.

Dimanche de Pâques

Auteur: Van Aerde Michel
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : A, B, C
Année: 2011-2012

Le disciple que Jésus aimait entre à son tour. Il voit et il croit. Qui est-il, ce disciple-là ? Sa tête pesait sur la poitrine de Jésus quand il donna la bouchée à Judas. Il a suivi jusqu'au tribunal, il y est même entré, mais il n'a pas renié. Il était debout sous la croix. Il a pris Marie chez lui.

Le disciple que Jésus aimait, c'est le disciple parfait. Il court plus vite et saisit rapidement. Il croit sur presque rien. Quelques indices et il comprend. Il connaît son ami. Sa connivence d'amitié lui communique les plus sûres intuitions. Il connaît Jésus dans son intimité. Il a suivi cet homme mystérieux sur les chemins de Galilée. Il l'a suivi, depuis le baptême du Baptiste jusque dans la cour du prétoire, aux jours ensoleillés comme aux nuits de malheur, à la montagne de la Transfiguration comme sur le mont des Oliviers. Son c½ur est grand ouvert, comme la tombe ce matin. Il accueille la vie.
***

Le disciple que Jésus aimait, c'est nous, c'est l'Eglise assemblée qui suit dans l'Evangile, pas à pas, les victoires de Jésus sur la faim, la maladie, la haine, le désespoir, jusqu'à ce matin clair où tout est accompli. Le disciple que Jésus aimait, c'est nous tous, quand nous sommes entraînés dans la simplicité de son regard. Il n'a pas vu Jésus encore, mais il le croit déjà. Il sait, que la vie a gagné, que l'amour est vainqueur. Il sait Jésus vivant, triomphant de la mort, plus fort que l'injustice, par la fidélité du Père et la puissance de l'Esprit.

Il vit et il crut. Qu'a-t-il vu ? Rien ! Ou plutôt si, il a « vu » l'absence de Jésus et là, sur le côté, les linges qui l'avaient retenu. Il a vu ce que l'on voit quand l'invité s'en est allé : les draps pliés au bord du lit et la taie d'oreiller à part, un peu plus loin.

Il vit et il crut. Qu'a-t-il cru ? Il a cru la promesse réalisée et Jésus vivant ; Il a cru l'Ecriture accomplie et Jésus glorifié, relevé d'entre les morts, justifié par le Dieu vivant. Il a compris que Jésus n'est plus dans la tombe, enfermé, pieds et mains entravés, mais qu'il est parti, ailleurs, en liberté, vivant comme toujours, libre comme jamais. Cette intuition l'a saisi d'un seul coup et il a « vu », conçu, il a cru. A la Cène, il était si proche de Jésus qu'il sentait battre son c½ur, ce matin, il pressent son éveil comme une mère pressent celui de son enfant.

Le disciple que Jésus aimait est le seul qui ait cru sans avoir vu le Ressuscité. Comme lui, mes amis, nous croyons sans rien voir. Nous croyons sans voir mais non sans pressentir -j'en suis sûr- dans notre vie, dans notre c½ur, la présence active, vivante et victorieuse du Ressuscité.

« Si quelqu'un m'aime, parole de Jésus, mon Père l'aimera et à mon tour je l'aimerai et je me manifesterai à lui ». Cette manifestation est intérieure, personnelle, elle est affaire non pas seulement des yeux ou des oreilles mais du c½ur. Elle est une révélation dans la vulnérabilité et la réciprocité, dans la confiance et dans l'amour, comme celle de la fiancée et de son bien aimé. Perception affective, intelligence cordiale, elle dépasse la vision des yeux pour aller à l'essentiel, au plus profond.

Tous les récits d'apparitions pascales en témoignent : voir le Ressuscité ne suffit pas si on ne le reconnaît pas. Nul ne peut rencontrer le Dieu vivant comme un objet en face de soi. Nul ne peut le scruter, le fixer, le saisir. Mais je peux entrer en relation et tenter l'aventure, l'écouter comme quelqu'un, quelqu'un qui se révèle, qui se dévoile, qui se confie et qui se dit tout entier, avec pudeur.

Pour le disciple que Jésus aimait, cette reconnaissance a suffi. Il a pu croire Jésus vivant par le simple souvenir d'une parole, attestée de quelques signes discrets. Il a pu croire Jésus vivant sans le voir physiquement.

Tous les autres témoins ont vu et entendu. Tous cependant ont dû passer de l'expérience sensible à la foi, de la vision à la reconnaissance amoureuse, adoratrice, émerveillée.


***

Laissons-nous entraîner par l'ami de Jésus et plongeons dans la foi, rejoignons le Christ Ressuscité. Ne cherchons pas des preuves contraignantes, ne cherchons pas à voir ni à toucher. Croyons librement ! Approchons-nous tout simplement pour être en communion, en résonance, en sympathie, en harmonie avec le grand vivant, premier né d'entre les morts.

Ecoutons les témoins et ouvrons notre c½ur.

Le matin de Pâques, j'aime la douceur de ce récit très simple, Aucune violence, aucun triomphalisme. Tout est calme et discret. Tout est silence et paix. Une énigme, une absence, la tombe est vide, comprenne qui pourra. Rien de plus, il n'est pas là. Cela suffit.

Matin de la Résurrection, premier jour de la semaine, le soleil s'est levé chassant la nuit ancienne, un monde fermé s'est ouvert où brille maintenant une étrange clarté.

Dimanche de Pâques

Auteur: Devillers Raphaël
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : A, B, C
Année: 2011-2012

UN CORPS DISPARU (LUI) RÉAPPARAÎT (NOUS)

Ce jour-là (en avril 30 de notre calendrier ?), au Golgotha, dans une ancienne carrière en-dehors de Jérusalem, les soldats romains ont crucifié trois hommes considérés comme dangereux. Sur autorisation du préfet Ponce Pilate, le corps de l'un d'eux fut remis à l'un de ses amis qui, après l'avoir enveloppé dans un linceul, le déposa dans une tombe proche, taillée dans le roc et devant laquelle une lourde pierre fut roulée. Ensuite, en toute hâte, les rares témoins du supplice, dont quelques femmes, se hâtèrent de rentrer en ville car, dès l'apparition des premières étoiles, commençait la grande fête de la Pâque qui tombait justement un shabbat. L'ordre régnait à Jérusalem.
Si l'affaire Jésus était close à ce moment, nous ne connaîtrions même pas son existence sauf peut-être par une allusion chez un historien juif qui citerait son nom avec d'autres rêveurs qui prétendaient changer la société et avaient échoué. Or, une vingtaine d'années plus tard, en Israël et en Egypte, à Chypre et en Grèce, des dizaines de communautés proclament que Jésus est vivant et elles essaiment partout en dépit de l'hostilité du milieu. En l'an 51, dans l'opulente ville de Corinthe, un Juif appelé Paul de Tarse écrit un billet à une communauté qu'il vient de fonder à Thessalonique, en Macédoine, et où l'on s'interroge sur le sort des défunts. Dans ce document, qui est le premier écrit conservé de l'histoire de l'Eglise, bien avant les Evangiles, Paul assure :
«  Nous ne voulons pas vous laisser dans l'ignorance au sujet des morts, pour que vous ne soyez pas dans la tristesse comme les païens qui n'ont pas d'espérance. Si nous croyons que Jésus est mort et qu'il est ressuscité, de même aussi, ceux qui sont morts, Dieu les ramènera par Jésus et avec lui....
Que la grâce de notre Seigneur Jésus Christ soit avec vous »       (1 Thessaloniciens 4,13 ; 5,28)
Ce même Paul racontera pourtant dans une autre lettre qu'il était fou de rage lorsqu'il avait appris que certains de ses compatriotes croyaient que Jésus, exécuté comme blasphémateur sur l'ordre du grand prêtre, était vivant, Messie Seigneur : il fallait éradiquer au plus tôt cette croyance absurde et néfaste (Gal 1,13). Désormais Paul est persuadé : non seulement Jésus est vivant mais sa résurrection suscite la nôtre. Que s'est-il donc passé ?  Reprenons le récit de Marc.

LA FINALE DECONCERTANTE DE L'EVANGILE DE MARC

Donc à Jérusalem,  le 7ème et dernier jour de la semaine, le shabbat, marque le début des festivités pascales. Les apôtres de Jésus et les femmes sont prostrés, en état de choc.
Vers 18 h, au crépuscule, le shabbat est passé, les magasins sont ouverts. «  Marie Madeleine, Marie, mère de Jacques et Salomé achetèrent des parfums pour aller embaumer le corps de Jésus ». Ces femmes, et d'autres avec elles, suivaient et servaient déjà Jésus en Galilée, elles l'avaient accompagné pendant la montée vers la capitale. Alors que les disciples avaient lâchement abandonné leur maître, elles étaient là au Golgotha, regardant Jésus agoniser et mourir (15, 40) puis elles regardaient la mise au tombeau (15, 47). Dans la hâte, elles n'ont pu oindre le corps selon la coutume. Elles n'ont aucun doute : Jésus est bien mort. Tout est fini. Il n'y a plus que des souvenirs. La nuit passe.

Eclate le plus  beau matin du monde ! L'histoire va rebondir d'une façon incroyable. Marc poursuit en soulignant avec force la nouveauté de l'aube nouvelle : un vrai commencement
« La nuit passée, de grand matin, le premier jour de la semaine, elles se rendent au sépulcre au lever du soleil...... Au premier regard, elles s'aperçoivent que la pierre, qui était pourtant très grande, est roulée. En entrant dans le tombeau, elles virent, assis à droite, un jeune homme vêtu de blanc. Elles furent saisies de peur.
Il leur dit : «  N'ayez pas peur ! Vous cherchez Jésus de Nazareth le crucifié ? Il est ressuscité, il n'est pas ici. Voici l'endroit où on l'avait déposé. Et maintenant allez dire à ses disciples et à Pierre : « Il vous précède en Galilée. Là vous le verrez comme il vous l'a dit ».
Qui a roulé la pierre ? Y a-t-il eu effraction ? Pourquoi ? Audacieuses, les femmes osent pénétrer dans l'antre de la mort, du vide et du silence : or elles découvrent un vivant et entendent une parole. Qui est ce jeune assis à droite (comme on dira que Jésus est assis à la droite de Dieu son Père), vêtu de blanc (comme Jésus transfiguré) ? Un Ange sans doute, un messager d'en-haut, un substitut de la Présence divine. Dans cette expérience subite, les femmes sont figées d'effroi (même verbe quand Jésus entre en agonie : 14,33). Mais l'ange les rassure et leur parle. Donc il ne s'agit pas d'une hallucination (« Jésus serait un fantôme ?») ni d'une conviction que l'on se forge (« Ce n'est pas possible, il n'est pas mort  »). Il faut écouter une parole qui vient d'un autre : « Vous cherchez Jésus crucifié : il est « éveillé » (c'est un des 2 verbes - avec « il est relevé »- pour dire la résurrection). Il n'y a rien à voir....mais à présent une mission est donnée : le message reçu doit être communiqué aux apôtres car ces pauvres couards, Jésus ne les rejette pas pour choisir d'autres amis. Il savait qu'ils étaient incapables de le suivre dans la passion : d'ailleurs c'est lui seul, Jésus, qui devait donner sa vie pour le monde. Qu'ils croient donc ces femmes qui ont reçu avant eux le message de la Bonne Nouvelle, et qu'ils retournent vite en Galilée : là ils le verront.

Et Marc termine son Evangile par cette phrase stupéfiante :
Elles sortirent et s'enfuirent du tombeau parce qu'elles étaient toutes tremblantes et hors d'elles-mêmes. Elles ne dirent rien à personne car elles avaient peur.

Cette finale abrupte a dès l'origine intrigué : c'est pourquoi, dans les manuscrits, on a ajouté un petit texte de style différent de Marc et qui donne un sommaire des apparitions (voyez les éditions du Nouveau Testament). Pourquoi donc Marc a-t-il clos son récit sur ce silence effrayé des femmes ?
Parce que, dans l'abîme de leur détresse, à la frontière de la mort, elles viennent de faire l'expérience redoutable du divin. Comment exprimer ce choc ? Il n'y a pas de mot pour dire la résurrection. Si on en parle, l'incrédule conclura toujours à la légende, à l'affabulation. Et il y a grand danger de voir là seulement une « happy end » : le héros de l'histoire a survécu,  tout est bien qui finit bien. Fermons le livre.
Il faut au contraire le rouvrir, se remettre à lire Marc à partir de son début. Il nous a d'emblée prévenus qu'il n'écrivait pas la vie de Jésus mais la BONNE NOUVELLE DE JESUS, CHRIST ET FILS DE DIEU (1,1). Tous les épisodes aboutissaient à la question : Qui donc est ce Jésus ?
Nous, lecteurs, nous reprenons la place des apôtres et des femmes qui le suivaient et nous tentons de mieux comprendre. Notre vie de baptisés est une existence à la quête et à la suite de Jésus. Il nous précède toujours dans la Galilée de nos existences ordinaires, il nous instruit, nous apprend qu'il faut donner sa vie pour vivre. Et juste au moment de disparaître, « livré » à ses ennemis, « il se livre » à ses amis :   «  Prenez et mangez : ceci est mon corps........Ceci est mon sang... ».
Dès lors, à la différence des disciples de Jean-Baptiste qui pleuraient devant la tombe de leur maître mort, nous nous rassemblons non la veille du shabbat (jour de la mort de Jésus) mais le lendemain du shabbat, jour de résurrection. Nous formons CORPS en écoutant l'Evangile ; nous devenons LE CORPS DE JESUS en partageant son Eucharistie. Comme les femmes, nous sommes bouleversés, nous ne savons trop comment dire. Le mystère est indicible puisqu'il nous englobe ! Mais avant d'être exprimée, la Bonne Nouvelle est une réalité effective et vécue.  LE PREMIER JOUR DE LA SEMAINE devient pour nous LE JOUR DU SEIGNEUR - en latin : « domenica dies » ; en français  DIMANCHE. La pierre qui nous enfermait dans le désespoir est roulée : l'avenir de Dieu est ouvert.

Croix, Résurrection, Cri de la Bonne Nouvelle, Assemblée des croyants, Dimanche, Eucharistie : tout cela ne fait qu'un.
Vide/Présence de Jésus...Dispersion/Assemblée... Semaine/Dimanche... : notre existence est rythmée par la pulsion de la Vie nouvelle. Le C½ur de Dieu continue à battre pour le salut du monde.

Dimanche des Rameaux

Auteur: Devillers Raphaël
Temps liturgique: Temps du Carême
Année liturgique : A, B, C
Année: 2011-2012

DU CRI (« HOSANNAH ») A LA LOUANGE ( « ALLELUIA »)

Après une marche de plusieurs semaines, Jésus parvient enfin à Jérusalem où spontanément un cortège s'organise pour fêter son entrée. N'imaginons pas une ville en folie car en réalité, l'événement n'a pas dû mobiliser grand monde : la plupart des gens ne connaissaient pas Jésus et puis était-il le Messie que certains excités prétendaient ? D'ailleurs, avec l'arrivée incessante des milliers de pèlerins, les retrouvailles des familles et les préparatifs de la Pâque, on n'avait guère de temps.
Jésus est très conscient de ce qu'il est en train de vivre : il n'est pas, comme certains continueront de le prétendre, un utopiste qui voulait changer le monde et qui a été victime inconsciente d'un complot. S'il était tombé dans un piège, il ne pourrait être Sauveur. Au contraire, sans que les acteurs s'en rendent compte, les circonstances  correspondaient aux Ecritures, c.à.d. que Jésus accomplissait bien la Volonté de son Père. A travers les agitations des hommes, Dieu réalisait son projet et Jésus en était le guide.
Parti de Jéricho, Jésus arrive donc par l'est, en passant d'abord par les villages de Bethphagè et Béthanie situés sur la colline des Oliviers qui fait face à celle de la capitale. 
Jésus envoie 2 disciples : «  Allez au village en face : vous y trouverez un petit âne attaché, que personne n'a encore monté. Détachez-le et amenez-le. Si l'on vous interroge, répondez : « Le Seigneur en a besoin, il vous le renverra ».... On les laissa faire...
Jésus garde toute initiative. Il reprend la monture des premiers rois d'Israël, avant qu'ils s'enorgueillissent de leur pouvoir et paradent sur un cheval comme un chef d'armée. Juché sur un ânon, Jésus est bien le Messie, mais un Roi doux et humble c½ur, incapable de sonner la charge et de monter à l'assaut.  Parmi d'autres prédictions d'un avenir triomphal, un Prophète avait annoncé un roi modeste :

« Tressaille d'allégresse, fille de Sion, pousse des acclamations : voici que ton Roi s'avance vers toi.
Il est juste et victorieux, humble, monté sur un âne - sur un ânon tout jeune.
Il supprimera les chars de guerre, il brisera les arcs de guerre, et il proclamera la paix pour les nations.
Sa domination s'étendra jusqu'aux extrémités de la terre »   (Zacharie 9, 9)
Las ! même les disciples ne comprirent pas le signe (Jean 12,16). Jésus ne venait pas déclencher une insurrection armée mais appeler à une révolution beaucoup plus profonde : celle des c½urs qui renoncent à la violence, entrent dans le Royaume de Dieu et optent pour la paix de tous les peuples.

« Ils amènent le petit âne à Jésus, le couvrent de leurs manteaux et Jésus s'assoit dessus. Alors beaucoup de gens étendirent sur le chemin leurs manteaux, d'autres, des feuillages coupés dans la campagne.    Ceux qui marchaient devant et ceux qui suivaient criaient :   « Hosanna ! Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur ! Béni le Règne qui vient, celui de notre père David. Hosanna au plus haut des cieux ! »
Tout évoque le processus d'investiture royale : une monture jamais utilisée, harnachée, un tapis de branchages et de vêtements, les vivats du peuple. « Hosanna » en hébreu signifie « le Seigneur sauve » mais était devenu une acclamation, un appel : « Seigneur, sauve ! ». Jésus est accueilli comme l'élu de Dieu, celui que Dieu envoie, il est « celui qui vient » du psaume 118, le descendant de David qui avait reçu la promesse messianique (2 Samuel  7, 13-16). Le jour J est-il enfin arrivé ?...

CELEBRATION DU JOUR

Aujourd'hui, après ce récit et la bénédiction des Rameaux, nous ferons peut-être une procession en mimant cette Joyeuse Entrée. Mais nous n'ignorons pas ce qui s'est passé ensuite et que l'évangile va nous rappeler : 
« RECIT DE LA PASSION SELON SAINT MARC ».
Nous savons bien que, accueilli comme un Roi, Jésus va décevoir toutes les attentes, et d'abord celle des résistants zélotes. Au lieu de donner le signal de la révolte, il va aller purifier le temple devenu pour lui « une caverne de bandits » puis avec audace, pendant plusieurs jours, il s'installera sur l'esplanade en reprenant son enseignement, son appel («  Convertissez-vous ! ») et en évitant de tomber dans les pièges tendus par les questions insidieuses des scribes théologiens (11, 27 à 12, 34).
Dans le climat surexcité de la Pâque, ce Galiléen devient dangereux : il faut agir vite. En quelques heures, il sera trahi, livré, ligoté, jugé, fouetté, condamné, exécuté. On criait « Hosanna » : on hurlera « A mort ». On agitait des rameaux : on dressera des poings fermés.
Mais à la fin de cette tempête, le lendemain du shabbat, Jésus apparaîtra aux disciples comme le vrai Messie, le Seigneur. Le cri des hommes (Hosanna » = sauve-nous) sera exaucé, la victoire acquise, non d'un peuple sur un autre mais tous ensemble sur l'ennemi commun, la mort.
A nous donc aujourd'hui de passer de ce dimanche au suivant, de purifier notre foi souvent superficielle pour accueillir dans la joie l'authentique Messie, le vrai Roi. En avouant que nous ne l'avons pas fidèlement suivi sur le chemin de la croix nécessaire parce que, toujours, nous aimons nous retrouver dans une Eglise imposante, applaudie, vénérée. Parce que nous participons au conformisme de la foule qui attend le bonheur clefs sur porte. Aussi bien, c'est à un Christ en croix que nous accrocherons aujourd'hui nos rameaux verts : nous savons en qui nous mettons notre espérance.

SUIVRE L'EXEMPLE DES FEMMES

Ce passage de l'espoir humain à l'espérance chrétienne, cet itinéraire pascal, ce saut de la foi est extrêmement ardu, il ne connaît pas de raccourci facile : Pierre et les premiers apôtres, qui ont tous chuté, pourraient encore nous l'assurer. Pour nous guider, Marc nous présente l'exemple des femmes. Au début et à la fin du récit, elles nous montrent la bonne attitude à prendre.

1)     A l'orée du récit de la Passion, apparaît une inconnue qui, surgissant au milieu d'un repas, verse un parfum très coûteux sur la tête de Jésus. «  Quelle folle ! Gaspillage ! » dit-on tout de suite. Mais Jésus la défend : « Laissez-la : d'avance elle a parfumé mon corps pour son ensevelissement. On racontera toujours ce qu'elle a fait, en sa mémoire ! » (14, 3-9)
Comme elle, nous devons « gaspiller » cette semaine, donner du temps à la prière, participer à chaque célébration quotidienne, soigner longuement nos liturgies afin d'entrer dans le « mystère pascal », nous « dépenser » pour accueillir notre Seigneur qui a donné sa vie pour nous et nous conduit sur son chemin pascal.

2)     Et à la fin du récit, nous rencontrerons à nouveau des femmes, Marie-Madeleine, Marie, Salomé et les autres. Alors que tous les hommes disciples, en dépit de leurs serments, ont lâché leur Maître et l'ont laissé mourir seul, elles sont restées au Golgotha. En larmes, impuissantes, suffoquant de chagrin, « elles regardent » de loin Jésus qui se tord et expire sur le gibet (15, 40), puis « elles regardent » Joseph d'Arimathie  qui glisse le corps dans la tombe (15, 47).
Nous aussi, aujourd'hui, « nous regardons » notre crucifix orné de son rameau, nous jetons un regard neuf sur ce scandale épouvantable d'un Sauveur tué par les hommes. Nous n'accusons personne : nous savons trop bien que tous, nous sommes ses bourreaux en le reniant si fréquemment !
Mais s'il a accepté nos enthousiasmes superficiels et nos adhésions éphémères, nos reniements et nos oublis, c'était pour nous donner, enfin, la bénédiction, c.à.d. la vie en plénitude. 
Aujourd'hui nous acclamons déjà un Sauveur qui, Pain rompu et Sang versé, se donne à ses disciples pour qu'enfin ils comprennent et s'ouvrent à l'amour. Il n'y a pas d'autre chemin.
Jésus, c'est comme EUCHARISTIE que nous t'accueillons. Hosannah : sauve-nous !