3e dimanche de Pâques, année B

Auteur: Materne Pierre-Yves
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : B
Année: 2008-2009

 

Est-il possible de croire sans comprendre ? Pas vraiment. Nous disons avoir la foi, ou « un peu de foi », et nous sommes devant un mystère sans fin, une réalité qui nous dépasse. Jésus mort et ressuscité dans le monde. Si nous sommes chrétiens, c'est justement parce que nous avons décidé de croire sans tout comprendre. Cela ne veut pas dire que nous soyons naïfs ! Au contraire, cela demande du courage de croire. Sans des témoins comme Pierre, nous ne serions pas très enclins à croire. Si nous croyons, c'est justement parce que d'autres nous ont précédés dans la foi, à commencer par les apôtres. Nous sommes dans une chaîne de croyants qui durent depuis deux mille ans. Etait-ce plus facile pour les premiers disciples ? Car nous, nous ne voyons pas Jésus. Il est invisible à nos yeux d'humains. Les disciples qui rentrent d'Emmaüs, eux, il ont vu Jésus en chemin, mais, curieusement, ils ne l'ont reconnu qu'à la fraction du pain. Avant tout partage du pain, on a l'impression que les disciples de Jésus, même s'ils voient Jésus vivant, sont perturbés, étonnés. Ils ne comprennent pas ce qui se passe. Ils ne comprennent rien. En voyant, Jésus, ils n'osent pas croire. C'est comme s'ils disaient : Nous n'en croyons pas nos yeux. Est-ce bien lui ?

La reconnaissance du Christ Ressuscité dépend à mon avis de deux actions qui ont toute leur importance. En effet, que fait Jésus face aux disciples bouleversés qui ne savent plus que penser ni que croire ? Il demande à prendre un repas. Jésus a faim. Il veut manger un morceau de poisson grillé. Deuxièmement, il leur parle des Ecritures et de la réalisation de ce que Moïse et les autres prophètes annonçaient. Le texte nous donne une très belle formule. On nous dit « Alors, il leur ouvrit l'intelligence des Ecritures ». En fait, ils connaissent déjà bien les Ecritures. Ils connaissent Moïse et les prophètes. Mais ils ont du mal à faire le lien entre les textes saints et ce qui arrive à Jésus. En effet, les Ecritures juives ne parlent pas du Christ comme d'un homme, fils de Dieu, qui va mourir et ressuscité d'entre les morts. On n'a pas écrit à l'avance tout ce que Jésus allait faire. Ce sont les disciples, en particulier les évangélistes, qui vont vouloir expliquer que Jésus vient pour accomplir ces Ecritures. Une fois que les disciples ont compris en profondeur le mystère de Jésus, ils peuvent devenir des témoins et porter un message d'espérance autour d'eux.

Il est difficile de croire. Toutefois, nous sommes aidés par ces deux pratiques initiées par Jésus. Nous vivons notre foi en participant à un repas. C'est l'eucharistie que nous célébrons et qui nous donne la force de continuer à croire. C'est en même temps le repas partagé qui nous invite au partage dans la vie quotidienne. Jésus partageait le pain pour se faire reconnaître. Il voulait manger un poisson offert par ses amis. Cela veut dire qu'il avait besoin des autres pour vivre. Tout simplement, en aimant ses frères, il se donnait lui-même en nourriture. Cela reste actuel pour nous. Nous sommes invités à faire comme Jésus, à donner quelque chose de nous-même aux autres.

Le deuxième aspect, c'est l'intelligence des Ecritures. Vous aurez remarqué que c'est Jésus lui-même qui ouvre cette intelligence aux autres. L'intelligence est déjà donnée mais elle doit être activée, éveillée. L'initiative doit venir d'un autre. C'est vrai qu'en face des textes bibliques, on a souvent envie d'appeler à l'aide pour comprendre ce que le texte veut dire. Mais, plus profondément, Jésus nous aide à comprendre le texte biblique parce que il est l'interprète du texte. La vie de Jésus, ses actions et ses paroles, tout cela forme un commentaire vivant. Pour lire la Bible, pour comprendre la Bible, je peux regarder Jésus. Et le Christ nous a aussi envoyé l'Esprit Saint pour nous conduire vers la vérité. L'intelligence peut donc venir aussi de notre prière, de notre c½ur et de notre réflexion.

Nous ne comprendrons jamais tout le mystère de la foi chrétienne. Si nous attendons de tout comprendre pour croire, nous risquons d'attendre longtemps. Mais il serait faut de dire qu'il faut simplement croire sans essayer de comprendre. Dieu nous a créé avec une raison, une intelligence et nous devons en user. Nous demanderons à présent tous ensemble que l'Esprit Saint nous ouvre à la connaissance de Jésus, nous serons ainsi des témoins qui croient et essayent de comprendre au mieux le sens de la foi.

Amen.

4e dimanche de Carême, année B

Auteur: Croonenberghs Didier
Temps liturgique: Temps du Carême
Année liturgique : B
Année: 2008-2009

 

A la lecture de l'évangile de ce dimanche, j'ai un peu l'impression que notre Dieu fait de l'homéopathie : cette médecine non conventionnelle qui consiste à administrer au malade des doses infinitésimales d'un médicament selon le principe de similitude. Le malade est soigné au moyen d'une substance qui produit des effets semblables à la maladie. Vous connaissez probablement le principe de cette médecine : une substance capable de provoquer certains symptômes chez des personnes saines peut guérir des sujets malades qui présentent des symptômes identiques. C'est un peu le principe du vaccin. Bref, on soigne par 'le même', par 'l'identique'...

Si je vous dis cela, ce n'est pas pour débattre du bien fondé de l'homéopathie, ou pour justifier ma technique un peu étrange qui veut que lorsque j'ai une forte fièvre -comme pas plus tard qu'hier-, je m'emmitoufle dans de chaudes couvertures pour avoir encore plus chaud ! Si je vous dis cela, c'est parce qu'une ambiguïté similaire semble traverser le début l'évangile d'aujourd'hui. « De même que le serpent de bronze fut élevé par Moïse dans le désert, ainsi faut-il que le Fils de l'homme soit élevé, afin que tout homme qui croit obtienne par lui la vie éternelle. »

L'histoire du livre des Nombres vous est sans doute connue : dans la marche au désert, alors que le peuple d'Israël était attaqué par des serpents, Dieu donna ce remède à Moïse : celui de mettre un serpent de bronze sur un mât, pour que quiconque le regarde soit guéri. Un serpent enroulé autour d'un mât : voilà un symbole qui jusqu'à ce jour a toujours signifié la guérison. Et c'est d'ailleurs le symbole de nombreuses organisations médicales ! Nous voilà donc face à notre paradoxe ! Pourquoi le serpent -source du mal- deviendrait-il symbole de guérison ? Le problème est-il la solution ? Comme si le venin était salutaire... Cela signifie-t-il qu'à certaines doses, tout peut être guéri, par homéopathie ?

Tout se complique, lorsque notre évangéliste met en parallèle le serpent et la croix... Certes, vous pourriez me dire que dans certaines cultures, le serpent est vu comme une force positive. Mais dans le monde juif, il en va tout autrement. Le serpent est véritablement le symbole d'une force négative, qu'elle soit dans le monde ou bien en nous. Alors en quoi l'élévation du serpent peut-elle sauver ?

Il me semble qu'un indice de réponse nous est donné dans la lecture de Saint Paul aux Ephésiens, que nous avons entendue. « Avec lui, il nous a ressuscités... Cela ne vient pas de vos actes. C'est Dieu qui nous a faits, il nous a créés en Jésus Christ ». Avec lui, il nous a élevés, pourrions-nous dire.

Si Jésus nous sauve par sa croix, en assumant pleinement notre humanité blessée, il s'agit donc de l'homme plein et en entier qui est en nous. Pas la bonne part en nous. Pas le côté moralement bon. Il ne sert à rien de guérir les bien portants. Le serpent élevé sur la croix, c'est un peu le symbole de nos faiblesses, que le Christ vient relever par son amour. Par le signe de la croix, nous pouvons entretenir l'espoir que nos fragilités, nos serpents peuvent toujours être élevés, guéris, transformés. Cela ne peut venir de nous, mais seulement de celui qui vient nous rencontrer où nous sommes.

En effet, pour la première fois dans l'évangile de Jean, dans le récit de la rencontre avec Nicodème, Jésus se présente comme fils de l'homme, une expression presque toujours mise sur les lèvres de Jésus. Jésus se présente ici comme une figure humble, un fils d'Adam, partageant avant tout la fragilité de l'humanité.

Voilà ce que j'appellerais l'homéopathie de Dieu. Dieu nous prend où nous sommes et il fait de nos faiblesses des forces pour guérir. Ou plus exactement, nous pourrions dire -symboliquement toujours- que la technique de Dieu est une homopathie. Dieu ne soigne pas la fragilité, il soigne par la fragilité. Et il ne nous sauve pas de nous-mêmes, mais il s'est fait l'un de nous, pour que nous soyons toujours plus nous-mêmes, plus humains.

Par l'incarnation, donc, Dieu a décidé de faire du problème, la solution ! Par l'incarnation, Dieu tire l'humanité fragile vers la tendresse Dieu. Par l'incarnation, la souffrance des hommes peut rejoindre le coeur de Dieu. Dieu se fait donc vrai homme pour rencontrer réellement nos faiblesses et les relever. Oui, d'une certaine manière, par l'incarnation du Fils, le problème devient la solution. L'humanité vécue jusqu'au bout, dans la lumière, nous ouvre un nouveau chemin de destinée et de divinité.

Telle est une part de la folie incompréhensible du message Chrétien. Mais cette incompréhensibilité de Dieu, aujourd'hui, peut devenir paradoxalement une clé de compréhension de l'homme, et de sa destinée. Car de même que c'est en regardant le mât avec le serpent que le peuple d'Israël a trouvé la guérison dans le désert ; de même, en ce temps de Carême, nous grandirons si nous nous montrons capable de regarder en face nos faiblesses et nos fragilités.

4e dimanche de l'Avent, année B

Auteur: Cochinaux Philippe
Temps liturgique: Avent
Année liturgique : B
Année: 2008-2009

Un homme se promenant le long de la mer à Ostende, trébuche sur une vieille lampe. Il la ramasse, la frotte et un génie en sort et lui dit : « puisque tu m'as libéré, je t'accorde un voeu ! ». Au bout d'un moment, le promeneur se décide et demande : « J'ai toujours rêvé d'un voyage à New York, malheureusement j'ai peur de l'avion et j'ai le mal de mer. Pouvez-vous me construire un pont jusqu'à New York, pour que je puisse m'y rendre en voiture ? » Le génie ne dit rien pendant quelques secondes, puis éclate de rire : « Mais ce que tu me demandes est impossible à réaliser. Pense au béton qu'il faudra faire couler, aux tonnes d'acier nécessaire pour soutenir un tel pont. Je suis un génie, mais je ne peux pas faire de miracle. Il faut tout de même rester dans le domaine du raisonnable ! Demande-moi autre chose, un pont, c'est trop compliqué ! » L'homme se remet à nouveau à réfléchir. Au bout de quelques minutes il trouve autre chose : « Je suis marié et j'ai quatre charmantes filles. Elles trouvent que je ne m'intéresse pas assez à elle, que je ne les écoute pas jusqu'au bout. Puisque je ne peux pas avoir le pont, alors, ce que je voudrais, c'est de pouvoir comprendre les femmes, c'est-à-dire savoir ce qu'elles ressentent, et ce qu'elles pensent lorsqu'elles sont silencieuses. Savoir pourquoi elles pleurent, ce qu'elles veulent vraiment dire lorsqu'elles disent non. Pouvoir les rendre heureuses. Bref, comprendre leur psychologie. » Le génie le regarde perplexe, puis lui demande : « Au fait, le pont, tu le veux avec 2 ou 4 voies ? » Le génie n'a donc pas été capable de résoudre le mystère de la psychologie féminine, tout comme il en aurait été vraisemblablement incapable de le faire pour la psychologie masculine. Et c'est tant mieux ! En effet, le mystère que nous sommes vis-à-vis de nous-même et des autres nous rappelle que la vie n'est pas une équation qui se déchiffre mais plutôt qu'elle se décline au rythme de nos saisons. Ne pourrions-nous pas aller jusqu'à prétendre que la notion même de mystère donne un goût différent à la vie. Tout n'est pas su. Tout n'est pas connu. Tout ne peut être maîtrisé. Il y a du mystère dans chaque vie et même dans celle du Fils de Dieu. En Christ, il y a le mystère de sa conception ainsi que celui de sa résurrection. Le début et la fin de sa vie sont marqués par le mystère. Nous ne pouvons les expliquer, nous ne pouvons les comprendre seulement les méditer pour nous laisser prendre à notre tour sous l'ombre divine qui continue à se dévoiler à nous par tous ceux et celles qui marchent avec nous sur notre route humaine. De la sorte, nous devenons un peu des anges les uns pour les autres. Accepter d'entrer dans le mystère de la vie, accepter d'entrer dans le mystère de la foi, nous permet alors de continuer, à l'instar de Marie, de nous laisser bouleverser par des événements imprévus, par ces personnes qui nous conduisent au plus près de nous-même. Se laisser bouleverser, c'est aussi accepter de ne pas avoir la main mise sur tout, de vivre une certaine forme de dé-maîtrise, un lâcher prise. Dans cette aventure, nous ne sommes pas seuls. Dieu est venu en notre monde pour nous accompagner. Il est à nos côtés. Mieux encore, il vient nous rejoindre chacune et chacun dans notre part sacrée. Quelle que soit notre condition physique, quel que soit notre état d'âme, Dieu vient résider dans notre crèche intérieure. Pour en prendre conscience, il nous suffit d'oser le pari de la confiance. Ayons, comme Marie, cette disponibilité intérieure du c½ur pour nous permettre de partir, repartir au plus profond de notre être et de retrouver tout ce qui fait notre dignité même si nous sommes touchés par l'épreuve de la maladie, de la vieillesse. L'histoire d'Elisabeth nous le rappelle avec force. Il n'y pas d'âge pour la fécondité. Toutes et tous, nous y sommes appelés. Face au mystère de la vie, le bouleversement de la foi opère en nous un déplacement et un engendrement. En effet, nous quittons notre vision humaine pour entrer dans le champ de celle du Père. Dans la tendresse, par des paroles et des gestes d'amour et d'amitié, nous permettons lors de la rencontre vécue en vérité à ce que d'autres s'engendrent à eux-mêmes en retrouvant leur part sacrée où Dieu a choisi de venir inhabiter. Toutes et tous, nous sommes capables de vivre notre fécondité lorsque nous acceptons de nous poser au plus près de nos bouleversements intérieurs. Marie nous ouvre la voie, une voie offerte à l'amour de Dieu dans le don à l'amour de l'autre. Le nom de Marie devient ainsi l'anagramme vivant du verbe aimer. Bouleversés par Dieu, vivons nos différentes fécondités d'engendrement car l'Esprit est avec nous dans cette traversée de la vie. En Dieu, notre vie se passe, se dépasse et surtout se vit. Amen

4e dimanche de l'Avent, année B

Auteur: Devillers Raphaël
Temps liturgique: Avent
Année liturgique : B
Année: 2008-2009

Aucune réunion tenue à la Maison blanche, aucun entretien au palais de l'Elysée, aucune Assemblée générale au siège de l' O.N.U., aucun conciliabule dans les couloirs du Vatican ... : non, jamais aucune rencontre n'a atteint ni n'atteindra l'exceptionnelle importance du dialogue qui eut lieu, un jour inconnu, dans une pauvre maisonnette de Nazareth lorsqu'une adolescente de 14 ans fut interpellée par Dieu. Ce jour-là, l'histoire du monde prit son tournant décisif :

LE VERBE DE DIEU ALLAIT SE FAIRE CHAIR

" L'Ange Gabriel fut envoyé par Dieu dans une ville de Galilée appelée Nazareth, à une jeune fille, vierge, accordée en mariage à un homme de la maison de David appelé Joseph, et le nom de la jeune fille était MARIE ".

Un Ange !? Luc ne le décrit pas car aucune représentation n'est possible ; il ne dit d'ailleurs pas que Marie l'a vu. L'important n'est pas son apparence mais son nom (Gabriel en hébreu = Force de Dieu) et son message. Gabriel est un Envoyé, un porteur de message, un interprète des Ecritures car il s'adresse à Marie avec des oracles bibliques. Au fond il ne lui apprend rien de neuf mais il actualise et il personnalise des textes anciens : ce que tu as lu te concerne, ce que tu attends va s'accomplir.

LES ECRITURES PERSONNALISEES ET ACTUALISEES

* Si Jérusalem a été souvent infidèle et humiliée par ses ennemis, voilà qu'un Prophète l'appelait à la joie : elle sera habitée par son Seigneur. "Réjouis-toi, fille de Sion...Le Seigneur lui-même est au milieu de toi...Dans son amour, il te renouvelle" ( Sophonie 3, 14-17) MARIE, tu es la véritable "Fille de Sion", l'Epouse intègre en qui Dieu va venir : sois comblée d'allégresse.

* Alors que les armées ennemis s'approchaient de Jérusalem, Isaïe vint dire au jeune roi de ne pas craindre. Et pour lui certifier l'aide de Dieu, il lui donna le signe que Dieu le protègerait. " Le Seigneur vous donnera un signe : voici que la jeune femme est enceinte et enfante un fils, et elle lui donnera le nom d'Emmanuel" ( Isaïe 7, 14) MARIE, pauvre paysanne, tu es le Signe que Dieu nous offre quand le mal nous assaille : tu nous offres "Dieu-avec-nous".

* Le prophète Nathan vint annoncer à David que ce n'était pas lui qui bâtirait le temple de Jérusalem mais bien sa descendance. Et Dieu lui assurerait un règne éternel. "...J'élèverai ta descendance après toi et j'établirai fermement sa royauté. Il bâtira une Maison pour mon Nom et j'établirai à jamais son trône royal. Je serai pour lui un Père et il sera pour moi un fils. Ta maison et ta royauté seront à jamais stables, ton trône à jamais affermi" ( 2 Samuel 7, 12-16) MARIE, ton fils Jésus est le descendant de David qui inaugure le Royaume éternel de Paix et bâtit le Temple de son Corps.

* Quand Salomon termina l'édification du temple de Jérusalem, le Seigneur, par le signe de la Nuée, investit le sanctuaire. Il y sera toujours présent. "Lorsque les prêtres furent sortis du Lieu saint, la Nuée remplit la Maison du Seigneur. La Gloire du Seigneur remplissait la Maison du Seigneur..." ( 1 Rois 8, 10 ) MARIE, tu es le sanctuaire de chair où vient demeurer Jésus, le Saint des Saints.

* Lorsque le Seigneur annonça au vieil Abraham et son épouse qu'ils allaient enfin avoir un enfant, Sarah se mit à rire. Le Seigneur affirma : " Rien n'est impossible à Dieu" ( Genèse 18, 14)) MARIE, toi, tu n'as pas douté en apprenant qu'Elisabeth était enceinte : tu croyais aux merveilles de Dieu.

Donc ce qui était raconté dans tel livre prophétique, à propos de Jérusalem ou d'Abraham ou de David, te concerne, TOI, MARIE. ICI ET MAINTENANT. Ce que tu connaissais comme épisodes de l'histoire passée de ton peuple, ou comme des prophéties de son avenir, EST AUJOURD'HUI TON PRESENT.

Nous n'avons pas à chercher de nouvelles révélations : tout a été dit, écrit. Nous avons à re-lire, réécouter des messages connus mais non mis en application, refusés par distraction ou lâcheté. Marie va nous montrer la voie.

MARIE NOUS APPREND A ECOUTER LA PAROLE

MARIE ÉCOUTE - Avant de parler à Dieu, il s'agit de l'écouter. De faire attention à ses paroles. Un chrétien n'entre pas en silence "pour faire le vide", pour tenter une expérience d'intériorité ni apaiser son stress. Mais pour tendre l'oreille de son c½ur, pour écouter à nouveau des messages. Percevoir de tout son être un message que nous n'inventons pas. Est-ce que je lis les Ecritures ? Comment la Parole est-elle proclamée à la messe ? Comment est-elle écoutée ?...accueillie ?...

MARIE EST BOULEVERSEE - Quand on pressent l'approche de Dieu, quand on accepte d'être interpellé, comment demeurer impassible ? On a peur. On ne n'attendait pas à cette intrusion, on tremble car elle va nous remettre en question, appeler à des décisions, peut-être changer notre vie.

MARIE CHERCHE A COMPRENDRE - " Elle se demande ce que signifie cette salutation". L'attention devient recherche, interrogation : il faut s'appliquer à pénétrer la profondeur cachée de l'oracle, creuser le sens. Il serait terrible de rater l'occasion, de faire la sourde oreille. Je ne lis plus un vieux livre : j'écoute un ordre de marche. Je deviens moi-même un personnage de l'Evangile qui se joue aujourd'hui.

MARIE BUTE SUR SES LIMITES - " Comment cela se fera-t-il ?...". Il est normal que le projet de Dieu sur nous nous dépasse de partout : nous sommes radicalement incapables de le réaliser. Nos ressources sont inadaptées, trop faibles. Mais nous n'avons pas "à faire" : seulement à recevoir. C'est la Force de Dieu - l'Esprit-Saint - qui interviendra.

MARIE SE DONNE - " Que tout se passe..." Dieu ne nous force pas ; un chemin nous est ouvert sans que tout soit éclairé. Comme Marie, faisons confiance : n'implorons pas un délai de réflexion ; ne détournons pas le Message vers un autre destinataire ; ne demandons la permission à personne ; ne prétextons pas de notre indignité ; n'exigeons pas des précisions sur la suite des événements. Et attention ! Il ne s'agit pas seulement de murmurer un OUI à un enseignement. Marie répond : "FIAT" : que cette Parole écoutée s'accomplisse en moi ; je donne mon corps pour être habitée par une VIE nouvelle. L'écoute doit se conclure en obéissance, en élan joyeux et confiant, en don total de soi. La vocation personnelle deviendra pro-vocation pour les autres.

* Cette scène de l'Annonciation est un chef-d'½uvre de composition et de profondeur. Aucun autre texte ne peut mieux nous préparer à Noël. Méditons-le. Contemplons Marie : pauvre paysanne, sans titre ni culture. Elle a pris la décision la plus capitale de l'histoire : laisser Dieu venir l'habiter.

Qu'est-ce que Dieu va me dire en ces jours ? Marie donne-moi la force de dire : " Seigneur que ta volonté soit faite...soit Fête...soit Paix pour le monde."

4e dimanche de Pâques, année B

Auteur: Cochinaux Philippe
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : B
Année: 2008-2009

Quatrième dimanche de Pâques : le 3 mai 2009

Il y aurait, paraît-il, parmi nous ce matin, principalement des wallons et des bruxellois ainsi que quelques flamands. Certains prétendent même qu'il y aurait encore l'une ou l'autre nationalité autre que belge représentée dans notre assemblée. Les différences culturelles sont bien marquées. Il y a aussi parmi nous des hommes et des femmes. Les différences sexuelles sont bien marquées. Il y a également des plus jeunes et des plus âgés. Les différences générationnelles sont bien marquées. Je pourrais ainsi continuer à écrire une longue liste de ce qui nous différencie les uns des autres. Mais ce serait aller tellement à l'encontre de l'évangile que nous venons d'entendre. Permettez-moi d'illustrer ce constat par l'exemple suivant. Egerton Young était le premier missionnaire envoyé auprès des indiens de la tribu des Peaux-Rouges. Dans le village de Saskatchewan, il leur parla de l'amour de Dieu. Pour ces indiens, les propos de ce religieux étaient comme une nouvelle révélation. Le vieux chef s'adressa à lui : « quand vous avez parlé du grand Esprit là, juste maintenant, est-ce que je vous ai bien entendu dire « notre Père » ? Oui, répondit Egerton Young. Ca, c'est très nouveau, reprit le vieux chef indien. « Nous ne pensons jamais au grand Esprit comme étant un Père. Nous l'entendons dans le tonnerre ; nous le voyons dans l'éclair, la tempête et le blizzard et nous en avons peur. Alors, lorsque vous nous avez expliqué que le grand Esprit est notre Père, c'est vraiment très nouveau et surtout très beau pour nous ». Le vieux chef fit une petite pause et poursuivit ensuite sa réflexion alors qu'une petite onde de lumière rayonnait sur son visage. « Vous avez également dit que le grand Esprit était votre Père ? » Oui, reprit le missionnaire. « Et, vous avez bien dit qu'il était aussi le Père des Indiens ? » C'est bien ce que j'ai dit, souligna l'homme de foi. Alors, conclut le vieux chef indien dont le ton de la voix trahissait une joie profonde, vous et moi, nous sommes frères ! ». Le vieux chef peau-rouge avait fait sienne la parole de l'évangile que nous venons d'entendre : « J'ai encore d'autres brebis, qui ne sont pas de cette bergerie : celles-là aussi, il faut que je les conduise. Elles écouteront ma voix : il y aura un seul troupeau et un seul pasteur ». Entre lui et ce missionnaire venu d'une terre étrangère, une nouvelle relation s'est établie, celle de la fraternité. Toutes et tous, par notre foi, nous sommes liés les uns aux autres car nous partageons au plus profond de notre intimité quelque chose de l'ordre de l'indicible, du merveilleux de Dieu. Sans pour autant nous connaître, il y a entre nous un lien exceptionnel qui prend sa source et se réalise en Dieu. La fraternité devient l'essence des relations entre nous. Mais qu'est-ce à dire ? Comment y arriver ? Cela ne se réalise par en un coup de baguette magique. Refaisons ensemble cette fois le chemin des Peaux-Rouges. Puisque la fraternité prend sa source en Dieu, il est bon de s'arrêter quelques instants sur notre propre relation à la divinité. Sommes-nous comme ces indiens qui avaient une vision terrifiante de l'Esprit ? Croyons-nous en un Dieu grondeur, le front plissé ayant la foudre entre le mains et dont la relation est marquée par la peur ou bien avons-nous découvert par la vie de son Fils que Dieu était un Père plein de douceur et de tendresse qui s'agenouille aux côtés de ses créatures et les accompagne lors de leur pèlerinage terrestre quoiqu'ils leur arrivent ? Notre perception de Dieu aura bien évidemment une incidence dans la manière dont nous vivrons les relations entre nous. Si le Dieu auquel nous croyons est un Père plein d'amour, c'est cet amour qui doit être le moteur de nos manières de nous rencontrer pour vivre de cette fraternité à laquelle nous sommes appelés. Toutefois, cette fraternité est à dissocier de ce que le psychiatre Robert Neuburger appelle la fratitude. La fratitude quant à elle dit quelque chose des relations au c½ur d'une même famille. Il est vrai que les relations familiales ne sont pas toujours aisées. En effet, elles peuvent parfois être marquées de sentiments négatifs comme la colère, la convoitise, la jalousie etc. Il en va tout autrement dans la fraternité. Puisque celle-ci trouve sa source en Dieu, la fraternité est une occasion divine de vivre nos relations au son de la musique de l'Esprit Saint. La fraternité se décline au-delà du respect. Elle dit quelque chose de la joie divine. Elle se réalise dans l'empathie et la tendresse. Elle se dévoile dans toutes ces mains offertes pour nous permettre de traverser ce à quoi nous sommes confrontés. Que cette fraternité ne soit pas un vain mot entre nous mais bien l'essence de vie qui nous permettra de transformer notre regard pour devenir un seul troupeau à l'écoute d'un seul pasteur : le Christ ressuscité.

Amen

4e dimanche de Pâques, année B

Auteur: Devillers Raphaël
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : B
Année: 2008-2009

Dans l'antiquité, il était habituel d'appeler "pasteurs" les souverains et les grands prêtres puisque ces dirigeants avaient le devoir de guider leur peuple sur les chemins du bonheur, de la prospérité et de la paix. En Israël, les prophètes osaient fréquemment dénoncer l'incurie des chefs qui, trop souvent, au mépris de la Loi divine, ne veillaient pas avec sollicitude sur leur troupeau, ne gouvernaient pas selon le droit et la justice. C'est ainsi que le prophète Ezéchiel lance une violente invective contre les mauvais dirigeants qui se sont enrichis et ont laissé dépérir le peuple que Dieu leur avait confié. Mais, dans son élan, le prophète enchaîne avec une extraordinaire promesse de Dieu : puisque les guides ont failli, lui-même viendra :

" Moi, le Seigneur, je viendrai chercher moi-même mon troupeau pour en prendre soin...Je le rassemblerai des différents pays...Je le ferai paître.. Et je susciterai à la tête de mon troupeau un berger unique : ce sera mon serviteur David. Moi, le Seigneur, je serai leur Dieu et mon serviteur David sera Prince au milieu d'eux...Et mon peuple sera en sécurité" ( Ez 34, 11-25).

Curieux : Dieu sera berger...mais aussi un descendant de David le sera ! Dans cette annonce, Jésus a compris son identité et sa mission : oui, il est bien ce descendant du roi David, le "re-présentant" de Dieu, envoyé maintenant comme guide définitif de son peuple. Donc (évangile de ce dimanche) il peut déclarer - et ce sera intolérable aux yeux des dirigeants de l'époque, comme pour des multitudes encore aujourd'hui- :

"Je suis le Bon Pasteur. Le vrai berger donne sa vie pour ses brebis. Le berger mercenaire, lui, n'est pas le pasteur car les brebis ne lui appartiennent pas : s'il voit venir le loup, il abandonne les brebis et s'enfuit ; le loup s'en empare et les disperse. Ce berger n'est qu'un mercenaire et les brebis ne comptent pas vraiment pour lui.

Le métier de berger, en ce temps-là, n'était pas une sinécure : il fallait aller loin pour trouver l'eau et la pâture, des prédateurs rôdaient, affamés. Le jeune qui avait été embauché par un éleveur et qui tout à coup se voyait attaqué par un loup songeait d'abord à sauver sa peau : il s'enfuyait et laissait le carnassier égorger l'une ou l'autre brebis tandis que les autres se dispersaient.

Jésus, lui, affirme qu'il n'a rien d'un mercenaire : il comprend sa relation à ses disciples comme un lien d'amour tel qu'il peut donner sa vie pour eux. C'est pourquoi il peut se dire le BON, le VRAI berger. Sa BONTE et sa VERITE résident dans le fait qu'il s'offre pour les autres. Pour lui chaque disciple compte. Il ira seul à la Croix.

Moi, je suis le Bon Pasteur : je connais mes brebis et mes brebis me connaissent comme le Père me connaît et que je connais le Père. Et je donne ma vie pour mes brebis.

Le verbe "connaître" ici a une signification prégnante : il ne s'agit pas d'un savoir extérieur ( je connais ce Mr...je connais les mathématiques...). Jésus n'est pas un envoyé de Dieu qui exerce sa mission "de l'extérieur" : il vit avec les siens les mêmes liens de tendresse et d'affection qu'il entretient lui-même avec son Père. Il nous aime de l'amour même dont son Père l'aime et dont lui aime son Père. Nous sommes aimés par lui d'un amour proprement divin.

J'ai encore d'autres brebis qui ne sont pas de cette bergerie : celles-là aussi il faut que je les conduise. Elles écouteront ma voix : il y aura un seul troupeau et un seul pasteur.

Jésus a d'abord appelé des personnes appartenant à "la bergerie Israël" mais sa mission est universelle : son Père lui a confié mission d'unir tous les peuples dans la paix. "Il faut" : cela signifie qu'il y va du projet de Dieu. La réalisation en est certaine mais au prix de la croix : car "il faut que Jésus meure pour la nation et non seulement pour elle mais pour réunir dans l'unité les enfants de Dieu qui sont dispersés" ( Jean 11,51) L'unité ne pourra évidemment pas s'accomplir par la conquête, l'imposition d'une religion par la force. La foi ne peut qu'être une réponse libre à une VOIX qui propose l'Evangile. La voix de Jésus (l'Evangile) devra donc être proclamée, expliquée, traduite et répercutée dans toutes les langues jusqu'à la fin des siècles. Elle propose la Vie. A chacun de répondre librement.

Quand bien même des multitudes feront la sourde oreille et refuseront le message, partout des hommes et des femmes écouteront et diront : " Jamais homme n'a parlé comme cet homme" ( Jn 7, 46). Ils s'adjoindront aux autres et ainsi grandira sans cesse le peuple de Dieu issu de tous les peuples et pérégrinant sur les pas de Jésus, et avec lui, vers l'UNITE définitive.

Le Père m'aime parce que je donne ma vie pour la reprendre ensuite. Personne ne me l'enlève : je la donne de moi-même. J'ai pouvoir de la donner et le pouvoir de la reprendre. Voilà le commandement que j'ai reçu de mon Père".

Il est capital d'insister : la croix n'est ni le projet d'un Dieu sadique exigeant l'immolation de son Fils ni un piège qui se serait refermé par surprise sur Jésus, victime inconsciente d'un complot. La croix qui ne serait que souffrances demeurerait un fait-divers dramatique, elle ne changerait rien, pas plus que toutes les exécutions d'innocents.

Si les hommes le prennent, Jésus affirme qu'en réalité, c'est lui qui SE DONNE. La croix a valeur unique parce qu'elle est fondamentalement OFFRANDE d'AMOUR du FILS AIME DU PERE POUR LES SIENS. C'est pourquoi Jésus mourant par amour peut traverser la mort et devenir le Berger de ses disciples. les unissant, tous, enfants du même Père, pour toujours.

Les premiers chrétiens ont aimé représenter Jésus, Bon Pasteur portant une brebis sur l'épaule, sur les murs des catacombes où ils ensevelissaient leurs martyrs. Persécutés, ils proclamaient ainsi leur espérance indéfectible : leur doux Seigneur était vivant et lorsque les "loups" les tuaient, il les sauvait de la mort pour les introduire dans les pâturages éternels de la Vraie Vie.

AUJOURD'HUI DIMANCHE DES VOCATIONS

* Le Bon Pasteur appelle : écoutons-nous sa voix ? Lisons-nous l'évangile ? ....Que faisons-nous pour qu'il résonne partout et parvienne aux brebis perdues ?...Que désigne l'image du "loup" aujourd'hui ?...N'est-ce pas l'idolâtrie de l'argent ?...

* Est-ce que nous nous laissons guider par la Volonté du Seigneur ou voulons-nous tracer nous-mêmes la route de notre vie ?...

* Le Seigneur nous agrège à son peuple afin que nous vivions dans la paix et la justice et qu'il n'y ait qu'UN troupeau : luttons-nous contre les zizanies ? sommes-nous heureux d'être une paroisse multiculturelle, internationale ? arrachons-nous les tentations de racisme ? prions-nous pour l'Unité des chrétiens ?...

* Nos pasteurs ne sont pas des chefs à la manière du monde mais des hommes à qui le Christ a confié ses frères. "M'aimes-tu, Pierre ?...Pais mes brebis" a dit le Ressuscité. La guidance d'une Eglise est déléguée, elle ne peut s'effectuer qu'avec un grand amour du Christ, comme une grâce imméritée, dans la pauvreté du Maître, et avec le courage d'offrir sa vie pour les autres.

R. Devillers , dominicain Tél. et Fax : 04 / 223 51 73 - Courriel : Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.

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5e dimanche de Carême, année B

Auteur: Devillers Raphaël
Temps liturgique: Temps du Carême
Année liturgique : B
Année: 2008-2009

Comme les autres évangélistes, Jean raconte l'entrée triomphale de Jésus à Jérusalem : les gens l'acclament comme un libérateur sans comprendre le signe de l'ânon sur lequel Jésus est assis et qui annonce un Messie doux et non violent. Mais à ce récit, Jean ajoute une scène qui constitue l'évangile de ce dimanche.

LES NATIONS VEULENT "VOIR JESUS"

Par sa pureté et sa conception très élevée de Dieu, la religion d'Israël attirait des païens qui s'unissaient à la foi et au culte sans toutefois accepter toutes les observances juives (circoncision, nourriture casher, ablutions, etc.). Intrigués par l'accueil fait à Jésus, quelques Grecs approchent un apôtre :

Quelques Grecs abordèrent Philippe : " Nous voudrions voir Jésus". Philippe le dit à André et tous deux vont le dire à Jésus.

"Voir Jésus", cela signifie évidemment obtenir une entrevue afin de le connaître. Mais Jésus interprète tout de suite cette demande comme un appel capital : le monde cherche un Sauveur. Alors il annonce :

" L'HEURE est venue pour le Fils de l'Homme d'être glorifié. Amen, amen, je vous le dis : si le grain de blé tombé en terre ne meurt pas, il reste seul ; mais s'il meurt, il donne beaucoup de fruit. Celui qui aime sa vie la perd ; celui qui s'en détache la garde pour la Vie éternelle. Si quelqu'un veut me servir, qu'il me suive ; et là où je suis, là aussi sera mon serviteur. Si quelqu'un me sert, mon Père l'honorera".

Le thème de l'"heure" parcourt tout l'évangile, dès la réponse de Jésus à sa mère à Cana (2, 4). En effet, Jésus n'est pas ballotté au gré des événements : depuis le début, il sait qui il est et qu'il doit accomplir la volonté de son Père. Au cadran de l'histoire, le moment solennel est arrivé, le grand tournant va être pris : le Fils de l'homme, le juge à qui Dieu donne le Royaume éternel (Daniel 7, 14), va être intronisé dans sa Gloire. Mais ce ne sera que par son passage à travers la mort.

Jésus comprend son destin par la petite parabole de la semence : celle-ci doit être jetée en terre, enfouie dans l'humus mais, au fond, elle ne meurt pas : elle porte en elle un germe de vie qui, du tréfonds de la nuit, va jaillir, monter et s'épanouir en gerbe. Le corps nous permet d'entrer en relation avec les autres mais ces liens sont étroits, limités, éphémères : Jésus comprend qu'il doit offrir son corps afin que, ensuite, ressuscité, relevé par son Père, il puisse entrer en relation avec les Grecs mais aussi avec le monde, avec les hommes et les femmes de toutes nationalités et cela, jusqu'à la fin des temps. Jésus sera enseveli comme individu : il ressuscitera en peuple.

Au contraire si un homme est attaché à son instinct de vie, s'il cherche à tout prix à préserver sa constitution corporelle, il demeure enfermé en lui-même, il reste éperdument seul. Il est condamné à se perdre puisqu'en voulant se sauver, il n'a pas aimé. Or seul l'amour permet de vivre et il n'est authentique que s'il se donne jusqu'à offrir son corps.

" Si quelqu'un veut..." : Tout sera réalisé par la croix de Jésus mais le chemin mortel dans lequel il pénètre en ce jour est celui que devra prendre quiconque veut être son disciple. Se mettre au service de Jésus n'est pas commencer une carrière valorisante, participer à une organisation admirée par les gens mais c'est "le suivre", marcher sans cesse vers "l'heure" du don de soi.

Mais au bout de cette démarche, le disciple fidèle recevra la Gloire éternelle du Père. Le service du Christ conduit à la divinisation, à l'accomplissement divin de l'homme, à l'humanité plénière parce que baignée d'amour.

L'AGONIE DE JESUS Cependant la perspective de l'horrible mort à laquelle Jésus est promis ne peut être évoquée sans frayeur : le Fils de l'homme reste un homme et il avoue sa tentation.

" Maintenant je suis bouleversé ! Que puis-je dire ? Dirai-je : " Père, délivre-moi de cette Heure" ?.....Mais non, puisque c'est pour cela que je suis parvenu à cette Heure ! ...Père, glorifie ton Nom". Alors du ciel, vint une voix qui disait : " Je l'ai glorifié et je le glorifierai encore". En l'entendant, la foule disait que c'était un coup de tonnerre ; d'autres disaient : "C'est un ange qui lui a parlé".

Dans son récit de la Passion, Jean ne rapportera pas l'agonie à Gethsémani : pour lui l'angoisse a saisi Jésus ici, en plein milieu du succès populaire et en compagnie de ses pauvres disciples aveugles. Jésus est seul ; il a sans doute déjà vu des crucifiés hurlant de douleur. La pensée de cette torture proche le remplit de terreur. Ne pourrait-il pas demander à son Père d'échapper à ce supplice ? Mais pour cela, il devrait ou s'enfuir ou se taire ou édulcorer son message. Par fidélité à son Père, il ne peut céder à cette lâcheté. L'HEURE de Dieu est là. S'il faut sauver les hommes, on ne peut que les aimer à en mourir. Jésus laisse à d'autres les fausses promesses, les "allons z'enfants" des militaires, les rodomontades des hommes politiques, l'aveuglement des multitudes, et notre terrible indifférence, nous qui voulons aimer sans en payer le prix.

Jésus exprime en public le cri de sa prière : "Père, glorifie ton Nom". Que Tu soit reconnu, débarrassé de toute caricature, adoré, enfin aimé ! Cela seul importe. Tel fut toujours le but de Jésus. Mystérieusement un bruit du ciel retentit : coup de tonnerre ? voix d'un ange ? Jésus, lui, l'interprète comme l'approbation de son Père : sûr de son Fils, Dieu sait que, enfin, grâce à la Pâque de son Fils, il va être reconnu dans sa vérité.

DEVANT LA CROIX LE MONDE SE JUGE.

Mais Jésus leur dit : " Ce n'est pas pour moi que cette voix s'est fait entendre, c'est pour vous. Voici maintenant que ce monde est jugé ; voici maintenant que le prince de ce monde va être jeté dehors ; et moi, quand j'aurai été élevé de terre, j'attirerai à moi tous les hommes". Il signifiait par là de quel genre de mort il allait mourir.

L'Heure approche où le monde va juger et condamner Jésus mais en fait, ce faisant, il se juge et se damne. Le Prince, satan, le diable, la mystérieuse puissance qui fomente tout le mal du monde va être chassé dehors, ou plutôt "jeté bas" tandis que Jésus sera "élevé" . Oui Jésus va être élevé puisque ses ennemis le fixeront sur le gibet comme un détestable blasphémateur justement châtié. Mais la crucifixion, toute horrible qu'elle soit, sera en fait l'élévation dans la Gloire divine !.

Jésus a refusé le pavois sur lequel la foule voulait le hisser, la scène sur laquelle on place les vedettes, les applaudissements que l'on adresse aux idoles. Son trône sera la croix ! Cloué entre ciel et terre, il apparaîtra, pour les croyants, comme le médiateur entre Dieu et les hommes. Et après avoir provoqué la fuite et la dispersion des Apôtres, le Crucifié attirera les humains jusqu'à la fin de l'histoire. Ainsi l'Heure de la Croix sera en même temps : Glorification du Père, Gloire du Fils, défaite de satan, honneur du disciple qui suit son Seigneur et unification des peuples. "Jésus est devenu pour tous ceux qui lui obéissent la cause du salut éternel " ( Lettre aux Hébreux, 5 - 2ème lecture)

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5e dimanche de Carême, année B

Auteur: Dollé Emmanuel
Temps liturgique: Temps du Carême
Année liturgique : B
Année: 2008-2009

 

Un vieux bénédictin, plein d'une sagesse fruit d'une longue vie à travailler, prier et méditer m'a un jour écrit : « une homélie n'est faite ni pour l'enseignement de la théologie ou de l'exégèse, ni pour un exercice de piété, ni pour des principes moraux ; chacune de ses disciplines ayant des lieux et des temps appropriés. Une homélie est faite pour annoncer la Bonne Nouvelle. » Il n'y a pas une unique façon dans être messager par les actes ou les paroles. Chacun avec son humanité, ses talents, ou ses limites tente tant bien que mal d'enseigner l'évangile qui ne peut se limiter au seul récit d'une histoire vieille de 2000 ans (comme on lirait des journaux de la 1ère guerre mondiale, avec curiosité mais sans que cela ne change quoique se soit à la vie du lecteur). Si la Nouvelle est Bonne, elle doit l'être encore aujourd'hui. Elle doit s'inculturer, s'incarner dans nos vies. L'essence même de l'Évangile est de nous aimer les uns les autres comme le Christ nous a aimé, parfois difficilement mais à chaque pas de nos vies un peu plus. À plusieurs reprises, Jésus enseigne qu'il est venu pour sauver et non pas pour juger. À sa suite, nous sommes invités à aider notre prochain à se laisser sauver par le Christ, plutôt que de l'enfermer dans un jugement radical et sans nuances. Aimer avec miséricorde (et la miséricorde n'est certainement pas une tolérance aveugle).

Ces derniers temps des actes du Vatican ont été diversement interprétés qu'il s'agisse de levée d'excommunication ou de paroles sur le sida. D'autres évêques jetant l'anathème sur une pauvre fillette brésilienne victime du comportement criminel d'un adulte qui lui, semble ignoré par la sanction. Il y a quelques mois un cardinal français avait des propos sottement antiféministes (les femmes dans l'Église : il ne suffit pas d'avoir one jupe, il faut encore avoir quelque chose dans la tête) et il y a quelques jours un autre évêque français faisant cette déclaration aussi stupide qu'antiscientifique (le virus du sida étant plus petit que le spermatozoïde n'est pas arrêté par le préservatif !). Mon propos n'est pas de faire ici la liste de ce que certains qualifient de disfonctionnement et que d'autres applaudissent. Mon propos est de réfléchir sur ce qui se passe, d'affirmer que la vie est préférable à la mort et que la miséricorde doit être spécialement attentive à ceux qui sont dans la détresse. La conscience plus ou moins éclairée de chacun permet de se positionner face à ces problèmes. Les uns sont blessés dans leur foi ou leur appartenance à l'Église, d'autres accusent les médias de déformer le message, d'autres encore manient avec prouesse la langue de bois (de brillants discours sans contenu). Mon propos ne porte pas sur un jugement public (et cela ne m'empêche pas d'avoir une opinion) mais d'aborder une question qui semble aussi importante que ce que la presse a dénoncé. Il s'agit de la radicalisation des positions, de la rupture d'une unité qui n'accepte plus les différences. Certains blessés ou ne pouvant accepter ce qu'ils entendent ou voient de la hiérarchie sont tentés de quitter l'Église (c.f. l'hémorragie en Allemagne et en Autriche). Quand on parle du Vatican, beaucoup pense l'Église. Certains ne se retrouvant plus dans son enseignement officiel sont tentés de faire le tri entre ce qui leur convient et ce qui leur est inacceptable au risque de se créer leur propre religion ! Mais l'Église n'est ni le pape ni la curie ni les évêques. L'Église est l'ensemble de ceux qui se réclamant du Christ et de son Salut miséricordieux. Avec le pape et les dignitaires de l'institution, nous sommes l'Église. Nous sommes, vous êtes l'Église non comme de moutons suiveurs ou des brebis égarées. Nous sommes l'Église comme des pierres vivantes. Chacun y a sa place et le Christ a besoin de chacun. Quelles que soient nos réactions ou nos amertumes, si nous osons nous réclamer du Christ, nous avons la mission d'être artisans de paix et d'unité à l'intérieur de notre groupe. La paix comme l'unité ne sont pas de diktats dans lesquels il faudrait se mouler, mais sont le fruit d'abandons réciproques, de reconnaissance de nos erreurs et de pas faits les uns vers les autres. Si Jésus avait attendu que nous soyons parfaits pour s'adresser à l'humanité, il ne serait jamais venu ! Combien de pas a-t-il fait non pour imposer sa perfection mais pour nous aider, nous inciter à sortir de notre misère et nous inciter à tendre vers sa perfection ? À la femme adultère, il dit : « ils ne t'ont pas condamnée, moi non plus je ne te condamne pas. Va et ne pêche plus. » Et il n'assortit pas sa miséricorde d'une condition suspensive au cas où elle réitérerait sa faute. Son exhortation à ne plus pêcher doit être assez forte pour la rendre forte. À Pierre qui fanfaronne un peu le soir de la Cène, il prédit qu'il aura renié trois fois avant le chant du coq. Il aurait pu lui dire ; je t'avais chargé d'être le roc sur lequel je bâtirai mon Église, je me rends compte que tu n'es pas très fiable. Au contraire, le Christ lucide confie l'Église à l'humanité telle qu'elle est, c'est-à-dire faillible. Avec une miséricorde infinie, les pas vers nous de Jésus ne le mènent pas à la gloire et au triomphe de ses idées mais sur une croix où il meurt supplicié comme le dernier des criminels. Ce coûteux et ultime pas du Christ réconcilie l'humanité pécheresse avec son créateur infiniment bon et miséricordieux, sans que nous le méritions. Il offre le Salut et la possibilité de participer à sa résurrection.

Nous inspirant du Christ venu à notre rencontre, essayons de faire quelques pas pour promouvoir la paix et l'unité au sein de notre Église tourmentée ces jours-ci. Église où chaque membre est autorisé à avoir des convictions et à les défendre, autorisé à faire entendre ses désaccords pour que les choses changent. Église où les grands ne peuvent se passer des petits. Église qui est le Corps du Christ que nous n'avons pas le droit de disloquer.

« Quand j'aurai été élevé de terre, j'attirerai tous les hommes à moi ». Ce 'tous les hommes' entendu à la fin de l'évangile, c'est le peuple de Dieu dont l'Eglise fait partie, autant l'Église des mitrés que celle des va-nu-pieds.

Si les racines meurent, la cime de l'arbre dépérit. La cime de l'Église doit vivre des racines que nous sommes. Si nous abandonnons notre besoin d'avoir raison à tout prix, si nous nous laissons mourir en terre comme le grain de blé de l'évangile, notre conviction pourra porter du fruit. La dépouille déposée au sépulcre a rendu la Résurrection possible.

5e dimanche ordinaire, année B

Auteur: Cochinaux Philippe
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : B
Année: 2008-2009

Désespérée, cette jeune fille avait un jour écrit à ses proches la lettre suivante : « J'ai conscience que cela peut vous choquer puisque « le bonheur vient de l'intérieur » est un mensonge. Par contre « l'argent me rendra heureux ». Dans trente ans, je raconterai à mes filles Qu'elles ne sont pas les choses les plus essentielles dans ma vie. Mon employeur saura Que j'ai mes priorités parce que l'activité professionnelle Est plus importante que La famille. Je vous dis cela Il y a longtemps Les familles restaient ensemble Mais ceci n'est plus vrai à mon époque C'est une société où tout est rapide Les experts me disent Que dans trente ans je célébrerai le dixième anniversaire de mon divorce Je ne peux accepter que Je vivrai dans un pays où je participerai à la propre construction de celui-ci. Dans le futur, La destruction environnementale sera la norme. Plus jamais il ne pourra être dit Que mes contemporains et moi-même nous nous préoccupons de la terre. Il sera évident que Ma génération est apathique et léthargique C'est stupide de croire que Il y a de l'espoir. » Elle se sentait bien seule au c½ur de son désespoir. Elle ne savait plus vers qui se tourner. Où est donc Dieu dans ce que je traverse, se demandait-elle ? Où se cache-t-Il ? Que fait-Il ? A l'instar de Job entendu dans la première lecture, elle se maintenait en vie par son cri surgissant du plus profond de son être. Au fil des semaines qui s'écoulaient, elle cherchait de l'aide autour d'elle car vivait en elle un désir indicible de sortir de cette situation, de cette prison qui l'enfermait dans un sentiment mortifère. Elle découvrit peu à peu que la réponse à ses questions était plutôt en elle. Elle partit alors à la recherche non d'un temps perdu mais de cette source intarissable qui jaillit au c½ur de notre c½ur, là où se noue en nous notre humanité et notre divinité. Elle comprit qu'il y avait en elle une forme d'appel à la Vie, offert par le Dieu de Jésus-Christ. Dans la foi, elle s'en retourna alors vers celui qui est venu parmi nous pour que nous puissions être levés, relevés par lui. Dieu nous aime debout dans notre c½ur alors que notre corps, lorsque la maladie, l'âge surviennent, nous positionne parfois dans diverses postures, pas toujours les plus confortables d'ailleurs. Cette jeune fille était un peu comme la belle-mère de Pierre. Le Christ s'est alors approché d'elle pour la relever, la ressusciter à la vie nouvelle. Comme le souligne Claude Lichtert, l'appel ne déracine pas puisque Simon a toujours un chez lui, une maison. L'appel de Dieu ne nous déracine donc pas de nous-même. C'est à nous et en nous qu'il s'adresse. Il y a en chacune et chacun de nous un tabernacle intérieur vers lequel nous pouvons toujours nous retrouver dans le champ de l'intimité divine. Il n'y a pas de déracinement et pourtant, le Christ nous invite en même temps à partir ailleurs, c'est-à-dire non pas à nous éloigner de nous-même mais à lire notre vie autrement et ce, sans en changer les mots. C'est d'ailleurs ce que fit la jeune fille. Un jour, elle relut la lettre qu'elle avait envoyée à ses proches et elle décida dorénavant de la réécrire à l'envers sans en changer un seul mot. Je me permets de la relire avec vous. C'est surprenant et cela donne ceci : « Il y a de l'espoir. C'est stupide de croire que Ma génération est apathique et léthargique. Il sera évident que Que mes contemporains et moi-même nous nous préoccuperons de la terre. Plus jamais il ne pourra être dit La destruction environnementale sera la norme. Dans le futur, Je vivrai dans un pays où je participerai à la propre construction de celui-ci. Je ne peux accepter que Que dans trente ans je célébrerai le dixième anniversaire de mon divorce Les experts me disent C'est une société où tout est rapide Mais ceci n'est plus vrai. A mon époque Les familles restent ensemble Il y a longtemps que Je vous dis cela La famille Est plus importante que les activités professionnelles Que j'ai mes priorités Mon employeur saura Qu'elles ne sont pas les choses les plus essentielles dans ma vie. Par contre, dans trente ans, je raconterai à mes filles « l'argent me rendra heureux » est un mensonge Puisque « le bonheur vient de l'intérieur ». Voici donc un texte, lu dans un sens il conduit au désespoir, lu dans l'autre sens, il conduit à la Vie puisqu'il y a l'espoir. Ne serait-ce pas ce que le Christ attend de nous ? A partir de ce que nous sommes, de ce que nous vivons, opérons un déplacement salutaire pour nous tourner vers la lumière de l'espérance. Sans nous déraciner de nous-même, partons vers cet ailleurs de Dieu. Nous sommes appelés à nous lever, à nous relever pour vivre de cette guérison toute intérieure. Le Père ne nous laisse pas seuls, il nous a donné son Esprit. Que Celui-ci vienne dans quelques instants sur toutes les personnes de cette assemblée qui le souhaitent pour recevoir ce merveilleux sacrement de la Vie. Amen

5e dimanche ordinaire, année B

Auteur: Van Aerde Michel
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : B
Année: 2008-2009

Le monde va mal : beaucoup de souffrances, de malades, de malheureux, comme ce Job que nous avons écouté. Peut-il y avoir un Dieu tout puissant et en même temps la souffrance, l'injustice et le non sens ? Je vous propose de réfléchir aux attitudes possibles devant le mal et de voir celles qui nous semblent chrétiennes ou non. 1° Parlons d'abord du stoïcisme, qui ne fait aucune référence à Dieu, soit parce qu'il n'existe pas, soit parce qu'il est trop loin comme le pense Platon. C'est une attitude très moderne, humaniste et pas très éloignée du bouddhisme, une attitude qui ne manque pas de dignité : « Anekou kai apekou » en grec, « sustine et abstine » en latin (supporte et abstiens-toi) ou, comme on dit en Haïti « Kenbe, pa lage » « Tiens bon, ne lâche pas ! ». Cette philosophie du IVè s. avant J.C. peut se résumer à la formule d'Epictète : « Ne demande pas que ce qui arrive, arrive comme tu veux, mais veuille que les choses arrivent comme elles arrivent, et tu seras heureux ». En quelque sorte glisse ta main dans le gant, accorde-toi à ce qui vient, même si c'est affreux, soumets-toi au Destin, à la Fatalité.Cette attitude a souvent été prêchée, mais est-elle chrétienne ? Jésus était-il stoïcien ? Socrate a toujours été reconnu par le pères de l'Eglise comme une figure du Christ, comme une sorte de prophète païen. Il est mort pour la vérité, condamné par les autorités, mais quand il boit la cigüe, il dit à l'un de ses disciples qui commence à pleurer : ne pleure pas, réjouis-toi plutôt car je quitte ce corps et je vais vers le monde parfait. Socrate reste serein, alors que Jésus souffre l'agonie au point de transpirer du sang. 2° La seconde attitude, à l'opposé de cette résignation, est celle de la révolte. La révolte contre Dieu. Comme le dit le philosophe Lactance, converti au christianisme, au 3ème siècle : « Si Dieu veut supprimer le mal et ne peut le faire, c'est qu'il n'est pas tout-puissant. Ce qui est contradictoire. S'il le peut et ne le veut pas, c'est qu'il ne nous aime pas. Ce qui est également contradictoire. S'il ne le peut ni ne le veut, c'est qu'il n'a ni puissance ni amour et donc qu'il n'est pas Dieu. S'il le peut et le veut...d'où vient donc le mal et pourquoi ne le supprime-t-il pas ? ». Dans cette lignée viennent un bon nombre de penseurs. « Puisque l'ordre du monde est réglé par la mort -écrit Camus-, peut-être vaut-il mieux pour Dieu qu'on ne croie pas en Lui et qu'on lutte de toutes ses forces contre la mort, sans lever les yeux vers un ciel où il se tait. » Ou encore : « Je refuserai jusqu'au bout cette création où des enfants sont torturés. » « La seule excuse de Dieu, c'est qu'il n'existe pas ! » écrit Stendhal. Aussi surprenant que cela paraisse, ces propos révoltés se retrouvent dans la Bible, de la part de Job bien sûr, mais aussi du prophète Elie quand il veut mourir et, plus encore de la part du prophète Jérémie quand maudit le jour de sa naissance et dit à Dieu « Tu n'es pour moi qu'un ruisseau trompeur aux eaux décevantes ». Chrétienne, cette attitude de révolte ? Jésus n'a-t-il pas crié : « Mon Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné ? » 3° La troisième attitude est à l'opposé de la précédente. Au lieu d'accuser Dieu, il s'agit de l'innocenter, lui ôter toute responsabilité dans l'existence du mal. L'argument de Leibniz est simple : si l'on pouvait voir la réalité dans son ensemble, on percevrait une harmonie globale. Le mal est nécessaire dans le monde comme les ombres dans un tableau. « Le mal est dans le monde, écrivait Paul Claudel, comme l'esclave dans un moulin, qui fait monter l'eau ». Les arguments sont parfois contradictoires : tout d'abord on dira que la souffrance est un châtiment, ensuite on dira que la souffrance est une épreuve que Dieu fait subir à ses préférés pour qu'ils en sortent grandis... Cette perception peut conduire à des extrêmes, à un goût morbide de la souffrance pour elle-même, avec d'horribles représentations de Dieu ; 1) Une vieille dame diabétique, amputée d'une jambe, qui dit par exemple : « J'espère que le bon dieu ne va pas me couper l'autre ». 2) Un visiteur de malade qui apprécie :« Le Bon Dieu doit vous aimer beaucoup pour vous envoyer une telle épreuve ! » La réponse est directe : « Dites-lui de cesser de m'aimer ! » 3) « Mon Père, pour Dieu, la souffrance, c'est un capital ! » m'a dit un jour un malade dans un hôpital de Lourdes. Je lui ai répondu : « Arrêtez, vous faites de Dieu à la fois un sadique et un capitaliste ! » 4° La quatrième attitude est celle d'une alliance avec Dieu pour agir avec lui et pour lui Dans l'histoire d'Israël, l'expérience fondamentale est celle de la libération de l'esclavage et du génocide. Dieu vient libérer son peuple, il fait alliance avec lui. Il le sauve en combattant pour lui et avec lui, en l'associant à sa propre libération. Dieu n'est pas « au-dessus », mais « au c½ur » de l'histoire humaine : notre combat est le sien. Il fait corps avec nous et si notre louange se chantera tout à l'heure : « par Lui, avec Lui et en Lui » c'est parce que notre lutte contre la souffrance et le mal se fait aussi « par Lui, avec Lui et en Lui » ! Le Christ n'a aucun discours théorique sur la souffrance : Il est contre, tout simplement ! Il ne l'explique pas, il la saisit. Elle devient lieu de combat, de mobilisation. La souffrance de l'autre me convoque à la responsabilité. La question n'est pas « Pourquoi le mal ? » mais « que faire contre le mal ? » Ce qui nous sauve, ce n'est pas la souffrance ni la croix (qui est un instrument de torture, au même titre que la guillotine ou la mitraillette), mais le crucifié. Comme le dit Claudel « Il n'a pas supprimé la souffrance mais il l'a remplie de sa présence ». Pour terminer, j'aimerais rappeler quelques évidences :
-  il n'y a que des vivants qui peuvent mourir.
-  il n'y a que ceux qui ont espéré, qui peuvent être déçus.
-  il n'y a que ceux qui se sont lancés dans des projets, qui peuvent connaître l'échec. De même : il n'y a que ceux qui aiment vraiment, qui peuvent souffrir. La présence de Dieu au coeur de notre souffrance, nous dit que notre désir ne peut être absurde, que notre vie ne va pas vers le néant. Nous croyons en la Résurrection du Christ et en celle de toutes les victimes, nous croyons en leur totale et définitive réhabilitation. Mais il y a de la souffrance dans le monde : « la création toute entière gémit dans les douleurs de l'enfantement. »

5e dimanche ordinaire, année B

Auteur: Devillers Raphaël
Temps liturgique: Temps ordinaire
Année liturgique : B
Année: 2008-2009

Mc 1:29-39

La fête de saint Paul, dimanche passé, ne nous a pas permis d'écouter la phrase capitale que Marc place en exergue à la vie de Jésus et qui définit le c½ur de sa mission telle qu'il va l'accomplir jusqu'à sa mort : "Jésus vint en Galilée. Il proclamait l'Evangile de Dieu : " Le temps est accompli et le Règne de Dieu s'est approché : convertissez-vous et croyez à l'Evangile".

L'ancien charpentier de Nazareth revient dans sa région qu'il va sillonner comme le héraut de la Bonne Nouvelle. Jusqu'alors les prophètes prédisaient une intervention de Dieu pour un futur indécis : aujourd'hui Jésus proclame que, au cadran de l'histoire, le moment est venu. Désigné comme Fils-Roi après son baptême, investi par la force de l'Esprit-Saint, Jésus inaugure ici et maintenant le Royaume de Dieu sur terre. Voilà "la Bonne Nouvelle" absolue, indépassable. Elle doit se dire. L'Evangile n'est pas d'abord un livre mais un cri, l'annonce d'un événement qui provoque une explosion de joie puisqu'il porte l'homme à son accomplissement Ce règne de Dieu ne s'enclot pas dans des frontières ni ne s'impose par la violence : il se propose. Que tout homme écoute l'appel et se décide librement. Au lieu d'attendre un changement de monde, qu'il se laisse changer lui-même, qu'il fasse confiance à Jésus et modifie sa mentalité, qu'il subvertisse radicalement sa façon de voir et sa manière de vivre. Le Règne de Dieu n'est pas l'indépendance nationale, la victoire sur les ennemis, la santé, la gloire, la réussite, la fin du mal, ni encore moins la domination de l'Eglise : il est l'accueil, le don total de soi au Père, la vie de fils de Dieu sur le modèle de Jésus, au souffle de l'Esprit dans l'Eglise.

L' ENSEIGNEMENT DE JESUS

Après cette PROCLAMATION initiale - qui ne peut jamais être remplacée ou supposée connue et qui doit toujours retentir comme pour la première fois -, vient la seconde sorte de prédication, l'ENSEIGNEMENT : il faut expliquer en quoi consiste la "conversion". Aussi, sans tarder, comme d'habitude, Marc montre Jésus en train d'exercer cette oeuvre ( = le texte de ce jour).

Accompagné de ses disciples, Jésus arrive à Capharnaüm. Aussitôt, le jour du sabbat, il se rend à la synagogue et là il enseigne.

La Galilée est une province où se côtoient les deux mondes, juif et païen ; Capharnaüm est une petite ville au bord nord-ouest du lac, au carrefour des routes internationales avec un bureau de douane. C'est là que Jésus établit son centre à partir duquel il rayonnera dans la région. En bon Juif pratiquant, Jésus, chaque 7ème jour, se rend à la synagogue où a lieu le grand office liturgique de la semaine : lectures de la Torah et chant des psaumes. Le responsable lui cède la parole et "JESUS ENSEIGNE".

Remarquons qu'il ne s'adresse pas à des païens mais à ses compatriotes croyants : c'est à eux d'abord qu'il faut révéler que maintenant les Ecritures s'accomplissent. Au lieu de vitupérer contre les m½urs dissolues et la corruption des païens (ce qu'il ne fait jamais), Jésus interpelle les croyants. Qu'ils ne s'assoupissent pas dans le ronron liturgique : la conversion n'est jamais accomplie une fois pour toutes. Il faut sans cesse "enseigner" les pratiquants. Curieusement Marc ne rapporte pas le discours de Jésus : ce qui compte, ce n'est pas le contenu mais son style, son mode d'enseigner :

"On était frappé par son enseignement car il enseignait en homme qui a autorité et non pas comme les scribes".

Les scribes faisaient de longues études et expliquaient les Ecritures en s'appuyant sans cesse sur des citations : "Jérémie a dit ceci...Mon Maître racontait cela...Les anciens interprétaient de cette façon...". Jésus, lui, qui n'est ni prêtre, ni lévite, ni docteur de la Loi, n'argumente pas à partir des autres. Son "autorité" ne signifie pas qu'il crie, qu'il fait des effets de manche, qu'il menace avec violence : sa simple parole porte en elle sa force. Alors que les orateurs utilisent des méthodes de rhétorique, fignolent des figures de style, cherchent des "trucs" pour plaire et convaincre, Jésus, lui, PARLE tout simplement. Et sa PAROLE est vraie car il n'y a aucune distance entre ce qu'il est, ce qu'il vit, ce qu'il pense et ce qu'il dit. Cette adéquation, cette vérité de l'être interpelle. Rempli de l'Esprit reçu après son baptême, Jésus n'a nul besoin de références. Il dit la Parole de Dieu "qui est vivante et énergique, plus tranchante qu'un glaive à deux tranchants" ( Hébreux 4, 12).

UNE PAROLE QUI AGIT

Or il y avait là un homme tourmenté par un esprit mauvais qui se mit à crier : "Que nous veux-tu, Jésus de Nazareth ? Es-tu venu pour nous perdre ? Je sais fort bien qui tu es : Le Saint , le Saint de Dieu !" Jésus l'interpelle vivement : "Silence ! Sors de cet homme !" L'esprit mauvais le secoua avec violence et sortit de lui en poussant un grand cri.

Dans l'Antiquité, les maux étaient souvent attribués à la présence de "démons", d'"esprits impurs" càd. opposés à la Sainteté divine. Il y a donc chez cet homme (aux apparences convenables sans doute) un refus secret et tenace de la Volonté divine. Il est possédé, donc esclave et les "enseignements" des scribes ont toujours échoué à le délivrer. Aujourd'hui, la Parole de Jésus est tellement prégnante de la force de l'Esprit qu'elle atteint cet ennemi caché dans le c½ur de l'homme. Immédiatement le démon se sent menacé et, extrêmement lucide, il discerne tout de suite la personnalité de ce nouveau prédicateur : ce Jésus de Nazareth n'est rien moins que le Saint de Dieu, càd. le Messie, celui qui vient mettre fin aux puissances qui aliènent l'homme, "le plus fort" qu'annonçait Jean-Baptiste, celui qui exorcise l'homme pour le rendre à lui-même.

Jésus lui intime le silence. Pourquoi ? Parce qu'il ne faut pas divulguer maintenant que Jésus est le Messie car ce titre est entendu dans le peuple comme un chef de guerre qui anéantira tous les ennemis d'Israël. Certes Jésus est bien le Christ, le Messie, le Saint de Dieu mais dans un sens radicalement autre - que l'Evangile va peu à peu expliciter.

Saisis de frayeur, tous s'interrogeaient : " Qu'est-ce que cela veut dire ? Voilà un enseignement nouveau, proclamé avec autorité ! Il commande même aux esprits mauvais et ils obéissent". Sa renommée se répandit dans toute la Galilée.

L'auditoire est sidéré : on était habitué à entendre des sermons incolores et insipides, des discours savants, des morceaux d'éloquence...qui suscitaient admiration ou bâillements mais ne changeaient rien. A présent lorsque Jésus entre dans une "synagogue" (une assemblée), le démon doit en sortir. Voici venu le Sauveur, le Libérateur, le seul capable de libérer l'homme de son esclavage intérieur. Car notre aliénation n'est pas d'abord psychique ou sociale mais spirituelle.

Le récent synode des évêques vient de rappeler l'importance capitale de la PAROLE DE DIEU, la nécessité primordiale de l'évangélisation. Nous déployons en vain des efforts gigantesques pour la catéchèse, les sacrements, les institutions, la morale chrétienne... : tout cela demeure souvent inefficace parce qu'on présuppose (à tort) que l'Evangile a été écouté et reçu. Il faut sans cesse, au préalable, annoncer, proclamer la Bonne Nouvelle. ENSEIGNER. - Le synode s'est plaint de la fréquente médiocrité des prédications, de la non pertinence des homélies. Comment laissons-nous le Christ s'exprimer ? "C'est le Christ qui parle tandis qu'on lit dans l'Eglise les Ecritures" ( Concile Vatican II - Liturgie § 7). Pourquoi les artistes et les acteurs préparent-ils mieux leurs textes que nous, prêtres et lecteurs, dans nos églises ?.....

 

6e dimanche de Pâques, année B

Auteur: Devillers Raphaël
Temps liturgique: Temps de Pâques
Année liturgique : B
Année: 2008-2009

Un seul Ordre : Nous aimer les uns les autres


Au centre même du grand Discours d'adieu de Jésus à ses disciples dans l'évangile de Jean, se dresse l'allégorie de la Vigne : le texte commencé dimanche passé se poursuit aujourd'hui en dévoilant la signification et l'effet de l'image. Au c½ur du monde et de l'histoire, Dieu le Père a planté la Vigne authentique : c'est Jésus son Fils qui "se ramifie" dans une multitude innombrable de "sarments" qui sont ses disciples. Il ne s'agit donc pas d'une "organisation" à faire fonctionner mais d'un corps vivant animé par l'Amour infini de Dieu.

Comme le Père m'a aimé, moi aussi je vous ai aimés. Demeurez dans mon amour. Si vous êtes fidèles à mes commandements, vous demeurerez dans mon amour - comme moi j'ai gardé fidèlement les commandements de mon Père et je demeure dans son amour.

On retrouve le célèbre "COMME" déjà vu au verset 4 et dans l'allégorie du Bon Pasteur ( Jn 10, 14-15) : il s'agit de bien plus que d'une simple comparaison. COMME veut aussi dire "PUISQUE ...PARCE QUE...". Jésus, Fils comblé par l'Amour de son Père, a intégralement transmis cet amour aux siens. Lire l'Evangile c'est voir précisément et exactement comment Dieu aime les hommes. Donc un disciple de Jésus n'est pas d'abord quelqu'un qui doit obéir, servir, aimer...mais un enfant qui EST AIME par DIEU SON PERE. Aimé inconditionnellement et intégralement.

Donc la prédication ne doit pas être d'abord (comme elle l'est trop souvent) un appel à l'action mais une révélation. La charité est à recevoir avant d'être donnée. La foi est accueil avant d'être activité.

C'est sans doute parce que nous ne sommes pas bouleversés par cet amour divin qui est allé jusqu'à la croix (pour-nous) que nos paroisses restent inertes. Elles sont passives parce que non émues, non passionnées. Elles ne souffrent pas de mauvaise volonté mais d'être mal ressourcées. En effet un sarment n'a pas à s'efforcer pour faire jaillir du fruit : il doit d'abord et sans cesse rester assoiffé de la sève qui lui vient du cep. Irrigué, il portera du fruit !

Je vous ai dit tout cela pour que ma joie soit en vous et que vous soyez comblés de joie.

Se recevant entièrement de son Père et se transmettant tout entier aux siens, indemne de tout égocentrisme et de toute culpabilité, Jésus vivait dans une JOIE perpétuelle. Certes il rencontrait des contradictions, il butait contre la haine de certains, l'indifférence de beaucoup et même l'incompréhension de ses proches mais toujours il correspondait à la Volonté de Dieu :" Je ne fais rien de moi-même...je fais toujours ce qui plaît à mon Père" ( Jn 8, 29). Donc il était lui-même : s'accomplissant en vérité, il était dans la joie qui n'est pas contentement et plaisir mais exultation de l'être achevé. En ne gardant rien pour lui, en révélant aux siens tous les enseignements de son Père, Jésus du coup nous transmet sa joie. Affronts et souffrances ne nous seront pas épargnés mais, à notre tour, nous expérimenterons que la Parole de Dieu apporte avec elle le bonheur de la Bonne Nouvelle.

LE FRUIT UNIQUE ET NECESSAIRE

Mon commandement, le voici : aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés. Il n'y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis. Vous êtes mes amis si vous faites ce que je vous commande. Je ne vous appelle plus serviteurs car le serviteur ignore ce que veut faire son maître. Maintenant je vous appelle mes amis car tout ce que j'ai appris de mon Père, je vous l'ai fait connaître. Ce n'est pas vous qui m'avez choisi, c'est moi qui vous ai choisis et établis afin que vous partiez, que vous donniez du fruit et que votre fruit demeure. Alors tout ce que vous demanderez au Père en mon Nom, il vous l'accordera. Ce que je vous commande, c'est de vous aimer les uns les autres.

Dès le début (évangile de dimanche passé), l'allégorie de la vigne parlait du fruit que devaient donner les sarments : le voici enfin précisé. Voici l'effet direct de la Vigne plantée en CROIX !

o Et la méditation de ces lignes doit être attentive et indéfinie ! -- Quelques points :


Ce fruit se ramène à une seule chose : "vous aimer les uns les autres". En effet le sarment n'est pas seul, il ne peut monopoliser l' amour, il ne peut le vivre qu'en communion avec les autres, ses frères et s½urs. Nous nous communiquons mutuellement les bienfaits de Dieu ! Est-il normal que beaucoup de chrétiens soient serviables, dévoués, engagés dans des ½uvres...en connaissant à peine ceux et celles avec lesquels ils partagent la même foi et la même Eucharistie ?... La conséquence première de la foi (la plus ardue, toujours à reprendre) est de constituer une communauté où les membres, différents les uns des autres, s'aiment vraiment. Un lieu où l'on se connaît, où l'on échange sur les merveilles de la Révélation, où l'on partage joies et peines.

 

Il est facile de se donner bonne conscience en jetant une maigre aumône à un mendiant inconnu : il serait plus normal et plus urgent de visiter un frère chrétien hospitalisé ou d'offrir sa résidence secondaire à une famille chrétienne qui a été obligée de fuir l'Irak.


Cet amour n'est pas facultatif et aléatoire mais commandé de façon très nette. On ne peut le remplacer par la piété, le décorum, le miracle, les exercices spirituels, les pèlerinages, le luxe liturgique.
Cet amour n'est pas émotif, sentimental, limité : puisqu'il est le don total du Christ en ses fidèles, ceux-ci se devront d'aller aussi loin que lui : donner leur vie pour leurs frères.
Voilà la révélation extraordinaire, entière, que nous avons reçue : elle fait que nous ne sommes plus de vagues croyants qui observent des pratiques sans en connaître le sens, des serviteurs tenus d'obéir à des ordres obscurs mais des "amis", des bien-aimés du Christ Seigneur. Nous sommes introduits dans les secrets de Dieu : que nous en soyons si peu fiers dit assez la médiocrité de notre foi !
Ne nous attribuons pas de mérites : c'est Christ qui nous a choisis. Une Eglise ( ek-klesia) est une assemblée "appelée-hors-de" par son Seigneur : elle n'est pas fondation d'hommes pieux. On ne va pas à l'église parce qu'on en a envie ou parce que la liturgie est bien faite mais pour répondre à un appel. La foi est une "vocation" (appel). L'amour crucifié appelle : quelle tristesse de voir tant de sourds, tant de traîne- savates !
Ce choix et cet amour constituent un "envoi" universel : la vigne du Seigneur doit pousser ses sarments jusqu'aux extrémités du monde pour que toutes les nations découvrent des communautés de disciples qui rayonnent cet amour de Dieu. "Si vous avez de l'amour les uns pour les autres, tous reconnaîtront que vous êtes mes disciples" ( Jn 13, 35)
Pour terminer revient le thème essentiel de la "prière" : en effet cette fécondité et cette extension universelle de la Vigne ne seront possibles que par la demande instante. C'est pourquoi les oraisons se font toujours "au nom de notre Seigneur Jésus..." c'est-à-dire par sa force, en tant que nous sommes ses sarments, ses amis. C'est en nous rapprochant du Christ (par la pratique de son commandement) que notre prière sera vraie et aura chance d'être exaucée.

 

R. Devillers , dominicain Tél. et Fax : 04 / 223 51 3 - Courriel : Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.

HOMELIE HEBDOMADAIRE : Envoi gratuit sur demande au courriel ci-dessus.