D'abord il faut un peu de temps devant soi mais juste une bonne heure. Vous le sortez de votre frigo 15 minutes avant de commencer. Lorsqu'il s'est légèrement amolli, vous le dénervez. Il vous faudra trois bons quart d'heures. Vous étalez l'ensemble comme si c'était une ciabatta. Vous le salez, le poivrez de poivre noir, vous l'asperger avec modération de Pineau de Charentes. Vous retournez l'ensemble et vous refaites le même assaisonnement. Prenez ensuite trois morceaux de papier Reynolds que vous superposez de dix en dix centimètres, vous y déposer le foie d'oie préparé et le rouler comme un boudin. Ensuite vous prenez les extrémités du papier alu et vous le tourner comme si c'était un carambar afin de bien tasser la préparation. Il vous suffit alors de le cuire pendant douze minutes à cinquante deux degrés soit dans un four à vapeur, soit dans de l'eau à cette température constante. Et vous aurez pour vos fêtes un délicieux foie gras que vous pouvez servir avec, par exemple du spéculoos émietté.
Pour celles et ceux que cela intéresse, après ce court exposé théorique, nous vous proposerons mi-décembre 2004 un cours pratique dans la salle à manger de Froidmont. Mais revenons un instant à la recette : l'assaisonnement est très important. A vous de le saler selon vos désirs.
Il suffit parfois de quelques grains de sel pour changer le goût des aliments. Ces grains se fondent dans toutes nos préparations. Nous ne les voyons plus et pourtant ils jouent un rôle essentiel pour le plaisir du palais. Et il en va des aliments comme il en va de la vie. Toutes et tous nous avons à apporter notre propre petit grain de sel à la construction du monde. Il y a plusieurs variétés de sel, comme il y a une variété d'êtres humains. Aucun ne sera jamais complètement le clône de l'autre. Ce qui fait notre humanité, c'est entre autres notre unicité. Chacun de nous est un être unique et c'est précisément cette unicité qui permet toute la richesse de nos rencontres. Comme le monde serait ennuyeux s'il en était autrement.
Imaginez-vous un instant des millions de Philippe Cochinaux sur terre. La vie serait absolument insupportable. Déjà un, c'est suffisant. Et c'est exemple vaut pour chacune et chacun de nous. Nous avons donc à apporter notre petit grain de sel à la vie. Son goût se découvre à partir des dons que nous avons reçus et qui nous singularisent. Toutes et tous nous en avons au moins un. Et il est vrai que cela prend parfois du temps de les découvrir car trop souvent nous perdons notre temps à jalouser et à tenter d'acquérir ceux des autres. Non repartons plutôt de qui nous sommes, les dons sont en nous. Prenons le recul nécessaire pour les voir, les apprécier. Il y a en tout être humain, quel qu'il soit, quoiqu'il ait pu faire, un don, quelque chose de positif et de grand. Certains dons reçus sont parfois plus visibles.
Il est clair que le gai-luron se verra plus vite que la personne discrète. Et pourtant toutes deux ont leur place et participent à leur manière à l'harmonie de la vie. Puissions-nous nous les faire découvrir les uns aux autres car ils nous permettront de voir la vie autrement, de manière plus positive, plus heureuse, à l'instar du conte chinois. Ces dons qui sont en nous n'ont pas comme objectif de sommeiller. Ils sont des moyens offerts en vue de la réalisation d'une tâche. La tâche de notre vie.
Le Christ est venu, nous dit l'évangile, pour " porter la Bonne Nouvelle aux pauvres, annoncer aux prisonniers qu'ils sont libres, et aux aveugles qu'ils verront la lumière, apporter aux opprimer la libération annoncer une année de bienfaits accordée par le Seigneur ". Mais ça, c'était sa tâche à lui. Pas la nôtre. Notre tâche est différente et cependant, chacune et chacun de nous en avons une à réaliser. Elle pourrait se définir de la sorte : l'accomplissement du bonheur en Dieu. Telle serait notre vocation humaine. Aucune recette ne nous est proposée. A nous de chercher, d'errer parfois puis de découvrir la voie qui nous permettra de la vivre.
La réalisation de notre bonheur dépend de notre responsabilité. Et il passe par la découverte des dons qui nous façonnent. Il est donc essentiel non seulement de les connaître mais également de les accepter et de s'en réjouir car ce n'est que lorsque je prends conscience de tout ce que j'ai reçu et qui fait mon unicité, que je peux alors commencer à me réjouir des dons des autres. Non pas pour les jalouser ou les aduler mais tout simplement parce que je découvre que la somme de nos unicités participe à l'harmonie de la vie, à l'accomplissement du monde. Et une telle prise de conscience n'est-ce pas un premier pas sur le chemin du bonheur qui conduit à Dieu puisque toutes et tous nous sommes membres du Christ.
Amen.